Malgré l'euphorie causée par la victoire des Verts et en dépit des appels pressants du ministre de l'Education nationale pour la reprise des cours, les syndicats autonomes de la Fonction publique demeurent imperturbables. Ils refusent de renoncer à leur mouvement de grève, qui entame aujourd'hui sa troisième semaine. Lors d'une conférence de presse animée hier par l'Intersyndicale, les cinq syndicats du secteur de l'éducation ont affiché une position commune quant à la non-reprise des cours tant que le gouvernement ne s'engage pas par écrit à la prise en charge de leur plateforme de revendications. « Nous voulons du concret et non un engagement verbal. Nous voulons des écrits et des décrets », affirment les représentants des syndicats. Dans la même journée et pratiquement à la même heure, M. Benbouzid lance un appel à l'adresse des enseignants pour « la reprise des cours dès aujourd'hui et au rattrapage, dans les meilleurs délais, de tous les cours perdus ». En effet, intervenant au cours d'une conférence nationale portant sur l'évaluation des programmes pédagogiques, le ministre de l'Education s'est dit persuadé que « le débrayage se poursuit à contre-courant des intérêts des enseignants eux-mêmes, alors que les pouvoirs publics ont accueilli favorablement les doléances des différents syndicats ». Le ministre dit regretter que les perdants dans cette affaire soient les élèves qui « continuent de subir les aléas d'une scolarité fortement perturbée qui, si elle venait à perdurer, diminuera irrémédiablement leur capacité à faire face aux examens annoncés ». M. Benbouzid a également interpellé chaque enseignant « pour qu'il évalue la mesure et la portée des réponses positives apportées par le ministère, en accord avec le gouvernement pour une prise en charge effective des préoccupations des enseignants », estimant que ce sont de « réelles avancées que chacun de nous doit mesurer ». Dans ce contexte, le ministre pense que « la meilleure voie pour traduire dans les faits cette volonté de prise en charge des problèmes socioprofessionnels des enseignants consiste en le dialogue et le travail en commun entre les différents syndicats et le ministère de l'Education nationale, dans le cadre de commissions mixtes de travail et de concertation ». La première commission mixte sera chargée de faire aboutir le dossier du régime indemnitaire, notamment à la lumière de la décision prise par le Premier ministre concernant la rétroactivité du versement de toutes les primes et indemnités, y compris l'indemnité d'expérience pédagogique (IEP) et l'indemnité d'amélioration des performances pédagogiques (IAPP), à la date de janvier 2008. La deuxième commission, qui se réunira lundi, prendra en charge le dossier des œuvres sociales du secteur. Elle s'attellera à examiner « les meilleures voies pour assurer une représentation objective des travailleurs à travers la participation des différents syndicats auxquels ils sont affiliés, dans la gestion des œuvres sociales du secteur », a-t-il expliqué. Elle aura aussi pour objectif de garantir « une gestion saine, transparente et rigoureuse du fonds des œuvres sociales au bénéfice de l'ensemble des travailleurs du secteur », a ajouté le ministre. En guise de réplique à ces déclarations, les syndicats autonomes tiennent d'abord à préciser que la reconduction de la grève pour la troisième semaine est une décision de la base et les enseignants ont choisi cette option de par leur expérience. « Nous avons habitué le pouvoir à suspendre notre action de protestation dès qu'il nous promet la prise en charge de nos doléances, et par la suite, il ne respecte pas son engagement. Cette fois, nous ne céderons pas, nous voulons que le ministre ou le gouvernement nous assurent par écrit quant à la satisfaction de nos revendications connues de tous », ont pesté les porte-parole des syndicats, en rappelant qu'ils ne sont pas des perturbateurs mais des représentants des travailleurs éreintés et lassés par un pouvoir qui ne propose pas de solutions radicales à leurs problèmes. « Avant d'être des syndicats, nous sommes des parents d'élèves soucieux de l'avenir de nos enfants ; l'amélioration de nos conditions de travail se répercutera positivement sur les élèves, donc la responsabilité d'une année blanche incombera au pouvoir », ont affirmé les représentants des syndicats, qui ont vivement critiqué le recours à l'installation de commissions qui n'est rien d'autre qu'un stratagème du pouvoir, pour, selon les syndicats, « noyer les revendications » et les remettre aux calendes grecques. « L'exemple de l'élaboration du statut particulier du secteur pour lequel une commission a été installée et a travaillé pendant plus d'une année pour enfin voir le ministère imposer sa mouture est des plus édifiants », observent les syndicats. Avant de dénoncer la campagne médiatique orchestrée par la tutelle portant sur les appels à la reprise des cours à partir d'aujourd'hui, les cinq syndicats rappellent que les enseignants ont dépassé le stade de la peur et, à cet effet, ils ont décidé d'organiser, en plus de l'arrêt de travail, des sit-in au niveau des 47 directions de l'éducation de wilaya et un rassemblement national à hauteur du Palais du gouvernement, le jour même de la tenue de la tripartite.