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« La FIDH est extrêmement préoccupée par le maintien de l'état d'urgence » Mme Souhayr Belhassen. Présidente de la Fédération internationale des droits de l'homme
La présidente de la FIDH se dit « extrêmement préoccupée » par le fait que « le maintien de l'état d'urgence, souvent justifié et renforcé par le contexte global de lutte contre le terrorisme, soit la porte ouverte à des violations flagrantes des droits de l'homme et des libertés fondamentales, à commencer par les libertés d'association, de rassemblement, d'expression ». Selon elle, les défenseurs des droits de l'homme sont donc touchés de plein fouet par « ces mesures de répression » mises en œuvre par les régimes concernés, parmi lesquels l'Algérie et l'Egypte. Comment évaluez-vous la situation des droits de l'homme dans les pays du Maghreb ? Les libertés d'expression, de la presse, d'association et de rassemblement pacifique en particulier sont régulièrement mises à mal. Les scandaleuses retombées des élections en Tunisie, les nombreuses procédures judiciaires intentées à l'encontre d'organes de la presse marocaine et les interdictions récurrentes des rassemblements pacifiques, voire de réunions publiques en Algérie, illustrent les obstacles auxquels sont confrontées les sociétés civiles de la région. Bien qu'il soit impossible de dresser un bilan commun à ces trois pays, la situation étant sensiblement différente dans chacun d'entre eux, nous assistons toutefois aujourd'hui au mieux à une stagnation, voire à un réel recul en matière de respect et de protection des droits de l'homme. La politique répressive menée par le pouvoir tunisien à l'encontre des journalistes, des défenseurs des droits de l'homme et des militants de l'opposition n'est pas nouvelle, toutefois elle a atteint ces dernières semaines un niveau inégalé et nous sommes très inquiets de ce durcissement. Quel regard jette la FIDH sur la situation des droits de l'homme en Algérie ? La FIDH s'est à plusieurs reprises mobilisée auprès de ses organisations membres et partenaires pour faire état de ses préoccupations concernant la persistance de violations des droits de l'homme en Algérie. La persistance des pratiques de torture dans les centres de détention tel qu'attesté par le comité contre la torture des Nations unies et l'absence de réponses satisfaisantes apportées par le gouvernement algérien au besoin de vérité et de réparation pour toutes les victimes des violations graves des droits de l'homme commises pendant la décennie 1990 demeurent au centre des préoccupations de la FIDH. Par ailleurs, la situation des droits des migrants et des réfugiés en Algérie, notamment suite à l'adoption de la loi relative aux conditions d'entrée, de séjour et de circulation des étrangers dont certaines dispositions violent le droit international en matière de protection des droits de l'homme ainsi que du droit humanitaire, nous inquiètent particulièrement. Enfin, une partie considérable de la population algérienne continue à faire face à d'importantes difficultés d'ordre économique et social. Dans ce contexte, la FIDH s'inquiète de la systématisation de la répression des protestations d'ordre social. Aucune solution durable ne pourra en effet être trouvée sans qu'un dialogue soit initié avec les partenaires sociaux. Peut-on parler du respect des droits de l'homme quand on sait que le pays vit encore sous état d'urgence ? Plusieurs Etats de la région sont en effet concernés par le maintien prolongé de l'état d'urgence et le cortège des mesures et pouvoirs exceptionnels qui en découlent. La FIDH demeure extrêmement préoccupée par le fait que le maintien de l'état d'urgence, souvent justifié et renforcé par le contexte global de la lutte contre le terrorisme, soit la porte ouverte à des violations flagrantes des droits de l'homme et des libertés fondamentales, à commencer par les libertés d'association, de rassemblement et d'expression. Les défenseurs des droits de l'homme sont donc touchés de plein fouet par ces mesures de répression mises en œuvre par les régimes concernés, parmi lesquels l'Algérie et l'Egypte. Nous dénonçons également le fait que sous couvert de l'état d'urgence, des civils soient déférés devant des tribunaux militaires et des cours de sûreté de l'Etat, qui sont des juridictions dont nous savons bien qu'elles ne sont pas les meilleures garantes du respect des droits de la défense et du droit à un procès équitable. L'année 2009 est marquée également par le rapport du juge Goldstone sur la guerre à Ghaza. Quel commentaire faites-vous ? La FIDH a exprimé et réitéré son soutien aux conclusions et recommandations du rapport de la commission d'enquête de l'ONU conduite par le juge Goldstone. Pour rappel, en dépit d'un mandat initial plus restreint, la commission s'est engagée à enquêter sur les violations supposées des droits de l'homme par les deux parties, Israël et les groupes armés palestiniens. Par conséquent, compte-tenu de la méthodologie employée et des conclusions du rapport, il n'y a aucune raison de mettre en doute l'impartialité et la légitimité du rapport. Le rapport Goldstone a conclu que de graves violations, constitutives de crimes de guerre et de crimes contre l'humanité, avaient été perpétrées par l'armée israélienne dans la bande de Ghaza et par des groupes armés palestiniens et insiste sur la nécessité de rendre compte de ces violations. La FIDH rappelle que l'obligation d'enquêter sur les violations graves des droits de l'homme et de poursuivre en justice les responsables de ces violations incombe aux autorités israéliennes et palestiniennes, mais s'il s'avère que ces autorités n'ont pas les moyens ou pas la volonté pour ce faire. Alors, les mécanismes de la justice internationale devront être activés afin d'empêcher que ces crimes restent impunis. La FIDH va rendre public, dans quelques jours, un an après le début de l'opération « Plomb durci » à Ghaza, un rapport dans lequel elle rappelle que la justice demeure l'une des conditions à la paix et à la sécurité. La fin de cette année est caractérisée aussi par le calvaire de la militante des droits de l'homme sahraouie, Aminatou Haïdar, empêchée par le gouvernement marocain de rentrer chez elle. On n'a pas entendu la réaction de votre organisation, pourquoi ? L'état de santé d'Aminatou Haïdar, en grève de la faim depuis plusieurs semaines, inquiète vivement la FIDH. La confiscation de son passeport et l'interdiction qui lui est faite par les autorités marocaines de rentrer chez elle sont des violations de ses droits. Nous appelons les autorités marocaines à prendre les mesures qui s'imposent dans les plus brefs délais.