Vingt ans après l'exécution du dictateur roumain Nicolae Ceausescu, le 25 décembre 1989, les lieux symboliques du « génie des Carpates » attirent les touristes. Emblème de la folie des grandeurs de l'homme fort roumain, la Maison du peuple, son palais pharaonique qui nécessita de raser 7 km2 de quartiers historiques de Bucarest, est aujourd'hui la destination numéro un pour les touristes visitant la capitale roumaine. En été, ils sont un millier par jour pour la plupart venus d'Israël, de France ou d'Allemagne. Le palais contient un million de mètres cubes de marbre, 200 000 m2 de tapis et 900 000 m3 de bois. Plus de 20 000 ouvriers et 200 architectes ont participé, jour et nuit, à sa construction démarrée en 1984. A la chute de Ceausescu, cinq ans plus tard, 60% du bâtiment étaient réalisés. Il a été ouvert au public en 1994. « Qu'on le veuille ou non, le palais devient le symbole de Bucarest », déclare Traian Badulescu, porte-parole de l'Association roumaine des agences de tourisme. M. Badulescu fait partie des 40 000 personnes dont les maisons furent détruites pour construire la Maison du peuple. Ce fut une tragédie pour beaucoup de gens, certains se sont suicidés. Selon plusieurs avis, ce bâtiment doit être mis en valeur puisqu'il existe. « C'est une partie négative de l'histoire mais elle ne doit pas être effacée », dit-on, rappelant qu'en Russie ou en Hongrie, les vestiges du communisme sont devenus une niche touristique. A 150 km à l'ouest de Bucarest, dans la petite ville de Scornicesti, la maison natale de Ceausescu attire aussi de nombreux touristes étrangers. Construite il y a une centaine d'années, sans électricité, elle dispose de trois petites pièces : la chambre à coucher où dormaient Ceausescu, ses huit frères et sœurs et leurs parents, la cuisine, avec une petite table ronde et des cruches en argile et la chambre d'amis, décorée de photos des parents et des grands-parents du dirigeant. Temporairement fermée, la maison doit être rouverte aux visiteurs au printemps, explique encore Emil Barbulescu, le neveu du dictateur, qui, en voisin, s'occupe de la demeure. Cet ancien chef départemental de la redoutée police politique de Ceausescu, la Securitate, est nostalgique de cette période où les gens, selon lui, ne se souciaient guère du lendemain. « Aucune période historique ne peut être effacée », dit celui qui a en projet d'ériger une statue en mémoire de Ceausescu. Dans le reste du pays, des anciennes villas officielles du couple Ceausescu sont aussi intégrées dans les circuits touristiques. A Bucarest, un restaurant nommé comme l'ancien journal du Parti communiste, La Scanteia, a, pour sa part, choisi de jouer un peu ironiquement sur la nostalgie avec des murs rouges, des emblèmes communistes et des plats rappelant l'époque de Ceausescu... simples en raison des pénuries alimentaires de l'époque.