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Du climat des affaires en général et de sa réforme en particulier

La conférence relative au développement économique et social s'est déroulée il y a trois semaines. Deux thèmes majeurs ont été débattus : l'amélioration du climat des affaires et la relance de l'industrie, le premier étant un préalable au second. Il y a deux jours, le 26 novembre, une convention visant une assistance technique pour l'amélioration du climat des affaires en Algérie a été signée avec la Banque mondiale. Est-ce enfin la manifestation d'une volonté politique et définitivement le début d'une prise de conscience ? Dans cette contribution, nous allons nous arrêter sur les jugements internationaux du climat des affaires en Algérie et sur la réponse apportée jusque-là par les pouvoirs publics à cette question.
D'un côté, les jugements internationaux sur le climat des affaires en Algérie sont quelque peu sévères et généralement récusés par les pouvoirs publics. Ces derniers leur reprochent implicitement leur idéologie d'inspiration libérale ne tenant pas compte des spécificités nationales et contestent explicitement leurs sources d'information indépendantes, bien que des informations soient également collectées auprès d'institutions officielles telles que la Banque d'Algérie, la direction générale des Douanes et la direction générale des Impôts, entre autres, et que toutes les sources soient citées dans les rapports publiés.
D'un autre côté, les pouvoirs publics n'ont pas effectué, ou en tout cas pas assez, de réformes visant à améliorer l'environnement des affaires, particulièrement des petites et moyennes entreprises, aux yeux des institutions qui parrainent ces jugements internationaux. Mais ces derniers soutiennent que beaucoup de facilitations ont été accordées aux grandes entreprises, notamment en matière d'avantages fiscaux, ce qui constitue d'abord leur priorité.
Il existe plusieurs institutions internationales qui évaluent périodiquement le climat des affaires par économie pour livrer une opinion sur les difficultés administratives, l'attractivité, la compétitivité de chaque environnement ciblé et la qualité des institutions parmi lesquelles on peut citer la Banque mondiale, le Forum économique mondial de Davos, la fondation Heritage en collaboration avec le Wall Street Journal, l'Organisation mondiale de la propriété intellectuelle et l'International Institute for Management Development de Lausanne. Les objets d'étude et les méthodes d'évaluation diffèrent, bien qu'ils se recoupent généralement.
1. Le classement Doing Business de la Banque mondiale
Doing Business ou «Facilité de faire des affaires» étudie les réglementations applicables aux entreprises du secteur privé, notamment aux petites et moyennes entreprises, considérées comme des outils de croissance et de création d'emplois dans la plupart des économies dans le monde. En effet, selon la Banque mondiale, un secteur privé florissant contribue à une société plus prospère, car il permet à de nouvelles entreprises de créer des emplois et de développer des produits novateurs grâce à la transparence et à des niveaux adéquats de concurrence.
Doing Business présente des indicateurs quantitatifs sur les réglementations ayant une incidence sur dix étapes de la vie d'une entreprise. Il s'agit des : création d'entreprise, obtention du permis de construire, raccordement à l'électricité, transfert de propriété, obtention de prêt, protection des investisseurs, paiements des taxes et impôts, commerce transfrontalier, exécution de contrats et règlement de l'insolvabilité. Dans le classement DB2014, l'Algérie figure à la 153e place sur 189 économies. Dans le DB2015, elle est classée à la 154e place sur 189 économies. Son dernier classement aurait pu être pire si la Banque mondiale n'avait pas modifié sa méthode d'évaluation et qui reclasse ainsi l'Algérie à la 146e place dans le DB2014. En fait, depuis l'année 2007, son classement n'a cessé de se dégrader, passant ainsi de 116/175 dans le DB2007 à 154/189 dans le DB2015.
La mise en ligne des procédures, la simplification des documents, la diminution des coûts, la réduction des délais ainsi que la transparence et la responsabilité dans les transactions sont les cinq critères qui ont permis l'amélioration du classement d'un bon nombre d'économies dans le monde. Les changements constatés servent surtout les économies les plus défavorisées, où un nombre accru d'entreprises informelles est entré dans le secteur formel.
Pourtant, depuis 2007, plusieurs tentatives de mise en place de programmes de relance industrielle ont été initiées et un comité dédié à l'amélioration du climat des affaires en Algérie a été institué. Mais la relance attendue n'a pas encore eu les résultats escomptés, si l'on en juge par l'indigence de la contribution de la valeur ajoutée industrielle au produit intérieur brut du pays, et le climat des affaires ne s'est pas amélioré, si l'on en juge par le classement défavorable de l'économie algérienne.
2. L'indice de compétitivité globale du Forum économique mondial de Davos
Dans le classement de l'indice de compétitivité globale 2013-2014, qui s'est fondé pour son évaluation sur douze piliers regroupés dans trois sous-indices, l'Algérie figure à la 100e place sur 148 économies classées. Dans le classement 2014/2015, elle gagne 21 places, passant ainsi au 79e rang sur 114 économies classées. La gouvernance et l'innovation sont les deux critères qui ont permis l'amélioration du classement d'un bon nombre d'économies. Quant à l'Algérie, c'est son environnement macroéconomique solide (11e/114 selon ce critère) qui lui a permis de faire un bond en 2014-2015. Par pilier, le meilleur classement de l'Algérie est dû à son environnement macroéconomique, suivi de la taille de son marché (47e). Son plus mauvais classement est dû à l'efficience de son marché du travail (139e), suivi de son développement financier (137e), puis enfin de l'efficience de son marché de biens (136e).
Le sous-indice des exigences de base contient quatre piliers : institutions, infrastructures, environnement macroéconomique et éducation primaire et santé. Le sous-indice des amplificateurs d'efficacité contient six piliers : enseignement supérieur et formation, efficience du marché des biens, efficience du marché du travail, développement du marché financier, développement technologique et taille du marché. Enfin, le sous-indice des facteurs d'innovation et de sophistication contient deux piliers : sophistication des affaires et innovation. Les piliers du premier sous-indice constituent la clé de réussite pour les économies axées sur les facteurs. Les piliers du second sous-indice constituent la clé de réussite pour les économies axées sur l'efficience. Les piliers du troisième sous-indice constituent la clé de réussite pour les économies axées sur l'innovation. L'Algérie est rangée dans l'étape de transition des économies axées sur les facteurs (étape 1) vers les économies axées sur l'efficience (étape 2).
Le Rapport sur la compétitivité globale 2014-2015 indique que l'investissement dans les compétences et l'innovation est la clé de réussite pour améliorer la productivité et la compétitivité. Cet investissement doit être basé sur une croissance inclusive qui permet à chacun de contribuer et de bénéficier de niveaux plus élevés de prospérité. Les économies les mieux classées sont celles qui sont en mesure de former, d'attirer et de retenir les talents et qui introduisent constamment des produits et services nouveaux et à forte valeur ajoutée.
3. L'indice de liberté économique de la fondation Heritage et du Wall Street Journal
L'indice de liberté économique, créé en 1995, est un indicateur fondé sur un ensemble de dix critères économiques, créé par la fondation Heritage et le Wall Street Journal. Il s'agit des : liberté d'entreprise, liberté des échanges, poids des taxes et impôts, dépenses du gouvernement, stabilité monétaire, liberté d'investissement, dérégulation financière, protection de la propriété privée, lutte contre la corruption et libéralisation du marché du travail. Le classement 2014 de l'indice de liberté économique classe l'Algérie au 146e rang sur un total de 178 pays.
4. L'indice mondial de l'innovation de l'Organisation mondiale de la propriété intellectuelle
L'indice mondial de l'innovation (GII) établit un classement évaluant les résultats en matière d'innovation de 143 pays, sur la base de 81 indicateurs. Le GII est publié conjointement par l'OMPI, l'Université Cornell et l'INSEAD. L'édition 2014 du GII s'attache à étudier le rôle des individus et des groupes dans le processus d'innovation. Elle fournit des informations sur différents aspects du capital humain nécessaire pour parvenir à l'innovation, notamment une main-d'œuvre qualifiée, l'accès à l'enseignement supérieur, l'articulation entre capital humain, capital financier et capital technologique, la capacité à retenir les talents et la mobilisation des diplômés de l'enseignement supérieur. L'Algérie est classée 133e sur 143 pays dans le classement 2014 de l'indice.
5. La réponse des pouvoirs publics en matière de climat des affaires
La réponse apportée jusque-là par les pouvoirs publics en matière de climat des affaires a toujours été timorée. Récusant les jugements internationaux, parce que jugés sévères et en raison de l'image dégradée qu'ils donnent de l'économie algérienne, mais, dans le même temps, créant un comité dédié à l'amélioration du climat des affaires, les pouvoirs publics ont semblé jusque-là tergiverser. Faut-il alors s'attendre à l'amélioration du climat des affaires dans les prochaines années ? Les pouvoirs publics ont, en tous cas, exprimé leur volonté lors de la dernière conférence dédiée au développement économique et social et une convention visant une assistance technique pour l'amélioration du climat des affaires en Algérie vient d'être signée avec la Banque mondiale.
Néanmoins, si les pouvoirs publics souhaitent réellement réformer le climat des affaires en Algérie, il faut d'abord placer le comité dédié à cet effet auprès d'une autorité qui dépasse le niveau ministériel et lui tracer une feuille de route. Il faut ensuite se fixer un train de réformes et un agenda d'exécution. Il faut enfin banaliser l'évaluation des politiques publiques en rendant disponibles et pérennes les informations nécessaires. n


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