Le groupe socialiste, radical et citoyen (SRC) a déposé une proposition de loi visant à accorder le droit de vote aux étrangers pour les élections municipales en France. La droite accuse Martine Aubry, la première secrétaire du PS, de vouloir faire monter le FN aux régionales. La proposition de loi a peu de chance d'aboutir. L'objectif de la gauche n'est pas de faire aboutir son projet. Elle sait très bien qu'elle est minoritaire au Parlement. Le PS cherche à mettre le gouvernement dans l'embarras. Le but est déjà atteint. Le vote des étrangers a réussi à éclipser le débat controversé sur l'identité nationale. Pour la droite, cette proposition vise à faire monter le Front national au détriment de l'UMP, parti au pouvoir. A voir les réactions enflammées, parfois très violentes, des ténors de la droite, le parti de Martine Aubry a déjà réussi son coup. Le PS joue sur deux leviers : intégration et position du candidat Sarkozy. Le groupe SRC estime que « l'engagement plusieurs fois réitéré du président de la République en faveur de cette mesure, les déclarations favorables de plusieurs ministres, dont ceux de l'Intérieur et de l'Immigration, ces dernières semaines, ainsi que l'expression majoritaire des Français, montrent que les esprits évoluent et qu'il est possible de réaliser cette avancée, si chacun est de bonne foi ». Pour la gauche, ce serait « une manière de sortir de l'atmosphère malsaine créée par le débat sur l'identité nationale ». Le président français n'a pas réagi publiquement, mais a envoyé au front ses ministres. « Le Parti socialiste a ressuscité, une fois encore, une fois de plus, l'idée du vote des étrangers aux élections locales. J'y suis totalement défavorable parce que j'estime que le droit de vote est fondamentalement lié à la citoyenneté », tranche le Premier ministre, François Fillon. Nicolas Sarkozy s'était dit personnellement favorable en 2008 à accorder le droit de vote aux élections locales à des étrangers installés en France depuis dix ans et « sur la base de la réciprocité », mais n'a pas minoré l'hostilité de son parti sur ce point. Et c'est son ministre de l'Immigration et de l'Identité nationale, sûrement pour adoucir son côté droitier, qui a remis la question sur le tapis en se disant favorable au vote des étrangers aux élections locales d'ici à une dizaine d'années. Face à l'offensive de ses anciens camarades, il fait un rétropédalage de circonstance en jugeant le débat prématuré. Le droit de vote des étrangers aux élections locales est un engagement de longue date du Parti socialiste. Il était déjà parmi les 110 propositions de François Mitterrand lors de la campagne présidentielle de 1981. Une proposition remisée au placard dès son accès à l'Elysée. L'Assemblée nationale l'a votée en 2000, mais le gouvernement de Lionel Jospin ne l'a pas faite passer alors devant le Sénat. L'ancien Premier ministre socialiste a répété qu'il y était « personnellement favorable ». « Le fait que le président de la République, à un moment, ait dit cela et que la gauche y reste attachée, devrait permettre de faire avancer le dossier. Mais je crois qu'il faudrait le faire à ce moment-là de façon unanime pour que, selon les moments où c'est proposé, on ne taxe pas d'arrière-pensée électorale tel ou tel », conclut Lionel Jospin. Quant aux Français, ils sont 55% à se déclarer favorables au vote des étrangers (hors UE) aux élections locales, tandis que 42% y sont opposés. Depuis les élections municipales de 2001, les citoyens de l'Union européenne résidant en France peuvent voter aux scrutins européens et municipaux, à l'inverse des extra-communautaires.