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Pourquoi cette exclusion programmée des compétences nationales ? (1re partie)
Publié dans El Watan le 08 - 02 - 2017

En 2016, à plus de 70 ans, Donald Trump (né le 14 juin 1946) est élu par le peuple américain pour prendre en main le destin de la première puissance mondiale. Mieux encore, à l'âge de 93 ans, Robert Mugabe est candidat en 2017 à la magistrature suprême du Zimbabwe ! Alors que chez nous, on assiste à une exclusion programmée des compétences nationales pour motif de «limite d'âge», un pseudo motif transformé en véritable arme de destruction massive de l'élite hospitalo-universitaire nationale.
Contrairement à ce que l'on pourrait croire, la situation lamentable dans laquelle se trouvent aujourd'hui la santé publique et la formation hospitalo-universitaire (HU) dans notre pays, en dépit des énormes moyens consommés, n'est ni le fait du hasard, ni le fruit de l'incompétence, ni de la responsabilité des professeurs chefs de service, dont l'avis n'a toujours été, au mieux, que consultatif ! C'est, malheureusement, l'aboutissement naturel d'une politique de déstabilisation programmée et minutieusement menée durant ces trois dernières décennies, et qui a débuté par la création des centres hospitalo-universitaires (CHU) en 1986 !
Il n'y a certainement pas de meilleur outil de déstabilisation que ces textes «réglementaires», qui, par leur application ou leur non-application, violent le principe d'égalité des citoyens et consacrent l'irrationalité, la médiocrité et l'inversion des données sélectives. Ce sont ces «textes» qui ont déclassé mondialement l'université et la médecine algériennes, qui ont entraîné une fuite massive de nos cerveaux, et qui ont fait perdre à nos citoyens la confiance en le système de santé de leur pays et les obligent à chercher des soins à l'étranger !
Une hypothèse de déstabilisation étant toujours difficile à admettre et surtout à prouver, j'ai essayé, dans un souci d'impartialité, de rapporter chronologiquement et fidèlement, dans le présent article, des faits, et seulement des faits, en m'appuyant essentiellement sur des textes réglementaires officiels, ainsi que sur une douzaine de mes contributions en rapport avec ce sujet et publiées, concomitamment à ces faits, dans la presse nationale durant ce dernier quart de siècle afin d'attirer l'attention des pouvoirs publics sur cette véritable conspiration contre l'Algérie indépendante (lire El Moudjahid du 16 octobre 1990, El Watan du 29 novembre 1995, El Khabar du 14 juillet 2001, La Nouvelle République des 28-29 et 30 décembre 2003, El Watan des 11, 12 et 13 juin 2004, 8 septembre 2004, 2 novembre 2005, 4 juin 2006, 3 septembre 2006, 6-7 juillet 2011, 19 juin 2013 et 16 janvier 2014). Il appartient au lecteur de faire le raccordement de toutes ces données réelles et vérifiables, de les analyser, de juger par lui-même et de tirer ses propres conclusions.
En 1978, l'Algérie ratifia, avec 134 pays, la déclaration d'Alma Ata (Kazakhstan soviétique), relative à la promotion des soins de santé primaires, et confirma son adhésion à cette politique de santé vivement recommandée alors par l'Organisation mondiale de la santé (OMS), en créant ses secteurs sanitaires (SS) en 1981. C'était là une véritable aubaine.
D'organisation simple : structure la plus importante (hôpital) autour de laquelle gravitent toutes les structures de santé situées dans une aire géographique déterminée, la daïra, et couvrant un bassin de population résidant dans cet espace (décret n°242-25 du 05 septembre 1981), le SS répondait harmonieusement à tous nos besoins, aussi bien de soins que de formation.
Un secteur sanitaire par daïra assurait :
1)- une couverture sanitaire de tout le territoire national, en garantissant des soins accessibles géographiquement et économiquement aux habitants des 548 daïras du pays ;
2)- des soins hiérarchisés, tant sur le plan technique (c'est le médecin généraliste qui voit en premier lieu le malade, le prend en charge et décide éventuellement de l'adresser chez le spécialiste pour des soins spécialisés ou pour une hospitalisation), que sur le plan administratif (tous les directeurs des SS et SSU sont placés sous la tutelle du directeur de la santé de leur wilaya, lequel est sous la tutelle du ministre de la Santé et fait en même temps partie du directoire de la wilaya présidé par le wali) ;
3)- une formation de qualité, vu qu'il ne pouvait être érigé en SS universitaire (SSU) que lorsque ses capacités de formation médicale, graduée et post-graduée, théorique et pratique, étaient effectivement réunies ;
4)- le respect du découpage administratif national (1SS/daïra) permet la participation active des collectivités locales, d'une part à la gestion du SS (par la présence des présidents d'APC dans le conseil d'orientation du SS), et, d'autre part, au financement des dépenses de santé par la satisfaction des besoins de santé de leur population (habitat, eau potable, nutrition, …) ;
5)- la possibilité d'accéder au statut de SSU et à l'ouverture d'une faculté de médecine incitera à la compétitivité des collectivités locales pour le développement réel de leur région.
Sans donner le temps de recul nécessaire pour évaluer objectivement cette organisation en SS, qui a pourtant fait ses preuves d'efficacité dans tous les pays où elle a été utilisée, et sans l'évaluer, on balaya d'un coup de plume les énormes avantages que procuraient les SSU et on créa, par plagiat, les centres hospitalo-universitaires (CHU) par décret n°86-25 du 11 février 1986. L'amélioration de la qualité des prestations, soins et formation de pointe, étaient les principaux arguments avancés par les partisans de ces CHU, dont la création n'a jamais fait l'unanimité. On paye très cher, à ce jour, le «prestige» de cette dénomination de «CHU», dont le seul «mérite» est la
surconsommation budgétaire.
Il y eut des années où les crédits alloués aux 13 CHU, implantés dans seulement 10 wilayas du Nord, ont dépassé les 31% du budget global de la santé, alors que les 216 structures restantes — 185 SS + 31 établissements hospitaliers spécialisés (EHS) implantés dans toutes les wilayas, se sont partagé les restes ! Nous sommes restés figés, durant plus d'un quart de siècle, dans seulement 13 CHU pour tous le pays, et dans presque les mêmes services HU de 1986.
Pourquoi ? Nous pouvions pourtant multiplier par ‘‘n'' nos capacités de soins et de formation, et donc améliorer considérablement la qualité de nos prestations, qualité constamment réclamée par le citoyen et revendiquée à chaque mouvement de protestation par les professionnels de ce secteur. Alors que, parmi les 548 daïras (= 548 SS potentiels) du pays, des dizaines de ces SS seraient aujourd'hui SSU !
A Alger, nous sommes restés, à ce jour, figés dans 4 CHU, hébergés dans des structures vétustes héritées de l'époque coloniale, et qui ne répondent plus ni à nos besoins de soins ni à ceux de la formation (Parnet, Mustapha Pacha, Maillot et le sanatorium de Beni Messous) ! Des centaines de postes de chefferie de service auraient été créés, postes qui auraient certainement épargné à nos aînés, aux derniers pionniers de la médecine algérienne, cette retraite de la honte, retraite qui usurpe leurs droits acquis et même leur dignité ! Quel gâchis !
Le véritable réquisitoire tenu officiellement lors d'une rencontre internationale en 2005, par l'un de nos ministres de souveraineté, alors en poste, prouve clairement que notre système de santé est unanimement contesté par tous, y compris les pouvoirs publics. Pourquoi l'avoir gardé ? : «En dépit des moyens importants alloués, le rendement reste faible.
La qualité est encore défaillante, les mauvaises conditions d'accueil et de séjour des malades, la pénurie de médicaments et les longues attentes au niveau des plateaux techniques, on parle beaucoup et on ne fait rien. Nous avons assisté à un effet de déplacement des ressources humaines informellement du public vers le privé. Il est temps de formaliser cette relation informelle. Notre système d'assurance est en crise…
La gestion de ces caisses durant ces dernières années en dit long… En cinq années, de 1999 à 2005, les dépenses de santé ont connu un excédent de 100%. Sur les 5 milliards de dollars alloués à ce secteur en 2005, 65% ont été destinés aux ressources humaines, 20% aux médicaments et 15% aux équipements…(sic)» (le ministre des Finances, A. Benachenhou, rencontre euro-méditerranéenne sur le financement des dépenses de santé, Alger, 9 avril 2005).
Même des experts étrangers se sont inquiétés pour notre système national de santé ! (A suivre)


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