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Quid de la transition énergétique ?
Publié dans El Watan le 09 - 10 - 2017

Des témoignages, ils en servent à l'envi : le Premier ministre, Ahmed Ouyahia, vient d'instruire le groupe Sonatrach de reprendre l'exploration du gaz de schiste, le solaire n'étant plus, à ses yeux, une priorité immédiate, alors qu'il n'y a pas si longtemps, il avait laissé entendre que l'heure était venue pour les énergies renouvelables de se faire une place au soleil : «L'Algérie doit, aujourd'hui plus que jamais, se libérer du tout-pétrole/gaz naturel.» Et partant : «Nous ne pouvons qu'applaudir la stratégie de développement de la filière des énergies renouvelables adoptée par le gouvernement.»
«Certes, notre pays a d'importantes réserves de gaz naturel, parmi les plus grandes au monde, mais jusqu'à quand ces réserves vont-elles tenir ? Jusqu'à quand resterons-nous dépendants de la rente pétrolière ? Nous devons, sans attendre, nous tourner vers d'autres sources alternatives, car dans 20 ans, 30 ans, ces réserves ne vont plus tenir», clamait haut et fort le patron du Rassemblement national démocratique (RND) dans la foulée du meeting populaire qu'il avait animé, le 13 avril 2017, à Annaba dans le cadre de la campagne électorale pour les dernières législatives.

Revirement
Toujours à propos des grandes mutations énergétiques à venir, Ahmed Ouyahia avait également laissé comprendre dans son discours électoral, qu'il était loin, bien loin, d'adhérer aux scénarios alarmistes qui fusaient d'un peu partout autour du gaz non conventionnel : «Nous sommes pour l'exploitation du gaz de schiste, bien que beaucoup de voix d'ici et d'ailleurs, se soient élevées pour pousser le gouvernement à y renoncer, pour les prétendus grands dangers que ferait courir à l'environnement et à nos eaux souterraines le fracking (fracturation hydraulique).
Aux Etats-Unis, grande puissance énergétique, qui plus est, est très vertueuse en matière environnementale, le schiste dont l'exploitation a progressé de manière spectaculaire, pèse actuellement le tiers du volume de gaz fourni. Leur volume de production avoisine actuellement les 40 milliards de pieds cubes par jour et ils projettent d'atteindre le double dans 25 ans. Grâce à la diversification énergétique, les Américains disposent désormais de réserves gazières de près d'un siècle de vie. Idem pour le Canada, autre grande puissance non moins sensible aux questions écologiques, qui occupe la 2e place en termes de production de gaz de schiste, après les Etats-Unis, avec une production de plus de 4 milliards de pieds cubes/j», plaidait-il du théâtre Azzedine Medjoubi de Annaba mi-avril dernier.
Plus d'un mois plus tard, Abdelmalek Sellal, alors Premier ministre, prendra le relais, mais pour annoncer de manière officielle la suspension des opérations d'exploration du gaz de schiste, privilégiant le développement des énergies renouvelables, et ce, en réponse au soulèvement écologique et citoyen contre les risques de pollution des ressources en eau pouvant découler de l'usage de la fracturation hydraulique, ayant marqué l'année 2015.
Toujours sous le gouvernement Sellal, le ministre de l'Energie, Nourredine Boutarfa, ne cessait de répéter dans plus d'une de ses sorties médiatiques, notamment celle du 19 avril 2017, que «le gaz de schiste ne fait désormais plus partie des priorités énergétiques et que l'avenir est aux énergies renouvelables, le pays étant en mesure de produire de l'électricité solaire en quantité importante de par son climat singulier». Paradoxalement, deux années auparavant, le même Boutarfa, alors à la tête du groupe Sonelgaz, affirmait : «Le gaz conventionnel et les énergies renouvelables suffiraient à absorber la demande du pays. Les énergies renouvelables ne sont pas une priorité. Le plus urgent aujourd'hui c'est de satisfaire le consommateur, car l'Algérien a besoin d'avoir son électricité, qu'importe l'origine.»
Curieux revirement. Aujourd'hui, de plus en plus affolé par la sévère contraction continue des ressources financières, c'est un autre virage à 180° qui sera pris par les pouvoirs publics sur la question de l'exploration du gaz de schiste. Option qui redeviendra une priorité et sera présentée comme le contre-choc pétrolier le plus efficace et le moins «nuisible»: «Nous estimons que Sonatrach a les capacités nécessaires pour expliquer aux Algériens qu'il ne s'agit pas d'une démarche aventurière, mais d'une option visant à garantir l'avenir en matière énergétique», soutenait, en effet, Ahmed Ouyahia depuis le pôle pétrochimique d'Arzew (Oran) où il était en visite dimanche 1er octobre. Ainsi, le Premier ministre ne fait que réaffirmer sa détermination à puiser, contre vents et marées, dans les ressources en hydrocarbures non conventionnels.
Car, faut-il le rappeler, c'est sous son règne que le premier accord de coopération dans le domaine de l'exploration et du développement des gaz de schiste avait été signé (28 avril 2011) entre l'italien ENI et Sonatrach, qui était également en pourparlers avec les deux géants, Shell et Exxon Mobil. Et pas seulement. Il avait même été mis au point un plan d'investissement d'envergure de 20 ans dans la perspective de produire ce type de gaz à l'horizon 2020 et l'ambition d'atteindre des performances susceptibles de peser au moins le tiers de la production totale de gaz naturel du pays en 2040.

Importantes réserves
C'est donc une nouvelle guerre d'influence opposant les géants pétroliers qui se profile à l'horizon. D'autant que, d'après une étude réalisée au printemps 2011, sur des financements de US Energy and Information Administration, l'Algérie disposerait de 231 billions de pieds cubes (6440 milliards de mètres cubes), techniquement récupérables. Une révision à la hausse de ces ressources a été effectuée trois ans plus tard par le département américain de l'Energie, suggérant un chiffre plus élevé, soit 707 billions de pieds cubes (19 800 milliards de mètres cubes). Des ressources, certes très peu négligeables, mais qui ne peuvent être exploitées, du moins pour l'instant, du fait de l'effondrement des cours pétroliers, à en croire nombre d'experts dans le domaine énergétique, nationaux et étrangers.
Des experts nationaux et étrangers, à l'instar de Gille Bonafi, membre du Comité intergouvernemental des experts de l'Organisation des Nations unies (ONU), avaient mis en garde, il y a tout juste une année, contre l'inopportunité, de par leur faible probabilité de rentabilité, des investissements projetés par nos autorités dans la filière du schiste. «L'Algérie devrait investir 300 milliards de dollars dans les hydrocarbures de schiste qui ne sont rentables qu'avec un baril de pétrole autour de 80 dollars, ce qui ne sera pas le cas avant longtemps. D'ailleurs, aux USA, l'industrie des schistes est à bout de souffle et les faillites s'enchaînent», avait-il indiqué. Plus précis, l'Algérien Tewfik Hasni, ancien vice-président de Sonatrach, reconverti au consulting en transition énergétique, mettra quant à lui l'accent sur la lourde contrainte des coûts de revient des forages de puits : «Le coût du forage d'un puits non conventionnel revient à la coquette somme de 15 à 20 millions de dollars.»
Partant, «les projections du groupe Sonatrach qui visent à parvenir à une production 20 milliards de m3 de gaz en forant 200 puits par an sont complètement irréalistes.» A en croire Tewfik Hasni, les Américains, dont l'expérience et le savoir-faire sont à chaque occasion brandis par Ahmed Ouyahia, manière de justifier l'opportunité de sa curieuse décision relative au retour à l'exploration/exploitation du schiste, ont dû procéder au forage de «7000 puits en six ans pour parvenir à une production de 20 milliards de m3 de gaz de schiste».
Bien qu'elle apparaisse comme une solution de rechange pour faire face à la menace d'épuisement des hydrocarbures conventionnels qui se dessine, ainsi qu'à la crise financière qui s'abat sur le pays, «il y a un grand risque que l'espoir placé en l'option du développement des exportations d'hydrocarbures non conventionnels à partir de l'exploitation des réserves du gaz de schiste dans le Sahara algérien soit déçu, et ce, même si les dangers écologiques s'avéraient maîtrisables», tranche le politologue et économiste allemand Hartmut Elsenhans, expert, spécialiste des économies rentières dont et surtout l'Algérie.
Les arguments de cet éminent professeur de sciences politiques à l'université de Leipzig (Allemagne) sont clairs : le risque que ce produit puisse constituer une nouvelle rente, dont va, encore une fois, profiter une poignée de «privilégiés» : «Beaucoup de pays ont bénéficié de richesses naturelles pour leur industrialisation, dont d'abord l'Angleterre, si riche en charbon. Mais les richesses naturelles y étaient utilisées pour créer une industrie compétitive, qui, du fait de la disponibilité de ressources naturelles, pouvait conquérir des marchés à l'extérieur et élargir les marchés internes à cause des revenus de masse qu'elle assurait. La richesse naturelle des états-Unis a contribué à des revenus ruraux importants, qui constituèrent des marchés pour l'industrie locale. Le même lien entre richesses naturelles et revenus de masse existait au Canada, en Australie, et en Nouvelle-Zélande», nous explique-t-il.
Or, poursuit-il, «une richesse comparable au Brésil ne conduisit pas au développement pendant le XIXe siècle, justement parce qu'elle était transformée en une rente pour les privilégiés. Si les ressources naturelles conduisent à la création de rentes, ceux qui sont au contrôle de ces rentes ne sont plus exposés au fouet de la compétition».

De la rentabilité du gaz de schiste
S'agissant des coûts d'extraction/production, sur lesquels reposent les objectifs attendus de l'exploitation et l'exportation du gaz de schiste, cet économiste, auteur de plusieurs ouvrages sur les rapports Nord-Sud et les stratégies de développement dont beaucoup ont été publiés, notamment en Algérie, pense que «le prix de ces hydrocarbures non conventionnels sera élevé, en Algérie comme partout dans le monde. Il n'y a pas de différences de coûts de production entre l'Algérie et le reste du monde qui permettraient l'appropriation d'une rente différentielle», et ce, bien que les conclusions de plusieurs analyses «très sérieuses» du coût de revient du gaz à partir des schistes algériens par rapport aux schistes de l'Amérique du Nord aient été maintenues dans la confidentialité, tient-il à préciser.
Il semble, par contre, persuadé des nouvelles opportunités hautement avantageuses que le gouvernement algérien s'apprête, une fois encore, à offrir à ceux qui détiennent la technologie, autrement dit, les colosses de l'industrie gazière : «Les prix élevés constituent un revenu pour les producteurs des technologies nouvelles appliquées à la production de ces hydrocarbures de schiste, au développement desquelles l'Algérie n'a pas pris part et ne peut pas espérer prendre part si elle veut être compétitive au niveau des coûts. Mais la productivité de l'Algérie pour ces hydrocarbures correspondra à la moyenne internationale, ce qui ferait que ses retards de productivité soient ici les plus bas.» Un point de vue que partagent, du moins en termes de rentabilité, plusieurs analystes intervenant sur différentes tribunes dédiées à l'actualité sur le gaz dans le monde.
«La rentabilité des puits de forage de gaz de schiste est loin d'être optimale pour l'instant, les coûts d'extraction étant très élevés et les cours de revente encore bas. Même aux Etats-Unis, plusieurs compagnies de premier rang ont délaissé l'activité du fait d'une rentabilité trop médiocre.
L'Algérie ne veut donc pas en l'état s'engager dans une activité qui, sur le papier, lui coûterait plus qu'elle ne lui rapporterait», avait estimé un analyste, en juin dernier. Nonobstant des dommages qu'il peut causer à l'environnement, le schiste algérien aurait de faibles chances de trouver preneur de l'autre côté de la Méditerranée. D'autant que, à en croire des médias européens spécialisés, au Portugal, par exemple, l'un des principaux acheteurs européens de gaz algérien, les schistes américains commencent à se répandre sensiblement. Aussi, à plusieurs groupes pétroliers européens, notamment le britannique BG Group et l'espagnol Gas-Natural, autre grand client de l'Algérie, des compagnies US, sont, depuis l'an dernier, liés par des contrats à long terme.


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