L'euro s'est déprécié cette semaine par rapport au dollar ; il est légèrement remonté vendredi après avoir touché son plus bas niveau depuis mars 2009. Il valait 1,2737 dollar après avoir plongé, jeudi, sous les 1,26 dollar. Il reste cependant tributaire de l'évolution de la situation dans la zone euro où les dirigeants essayent tant bien que mal de maintenir une fragile union monétaire. L'Algérie pourrait profiter de cette crise qui secoue l'Europe. L'expert en finances Mourad Goumiri, joint hier par téléphone, estime cependant qu'il ne faut pas pour autant se réjouir trop vite car il faudra attendre au moins un mois pour constater l'impact de cette nouvelle donne. « Il y aura des pertes d'un côté et des gains de l'autre. Mais il faudra attendre au moins un mois pour voir les répercussions venir », note-t-il d'emblée. D'après lui, le renforcement du dollar sera bénéfique pour l'Algérie dès lors qu'il va consolider les réserves de change, confortant ainsi la politique de la Banque d'Algérie. « Une grande partie de nos réserves de change sont placées en bons du Trésor américain. Il faut faire un arbitrage entre la sécurité et la rentabilité. Or, ce n'est pas demain la veille que les Etats-Unis d'Amérique vont tomber. La garantie du Trésor américain est absolue. On voit mal la Banque d'Algérie faire des placements plus rémunérés mais à risque », fait valoir M. Goumiri. La hausse de la valeur du dollar avantagera l'Algérie davantage si elle s'accompagne d'une augmentation du prix du baril de pétrole, relève encore l'expert. La faiblesse de l'euro pourrait être une bénédiction pour l'économie algérienne, notamment pour le commerce extérieur si elle perdure, signale-t-il. Près de 56% des importations de l'Algérie sont en provenance de la zone euro, donc libellées en euros, alors que les exportations, constituées à plus de 95% d'hydrocarbures, le sont en dollars. Dans ce cas de figure, les produits importés seront moins chers mais il n'est pas sûr que les importateurs, les commerçants et les opérateurs économiques répercutent cette baisse dans le circuit local, souligne M. Goumiri. Seules les entreprises publiques pourraient le faire, ajoute-t-il. « Il n'y a pas de transparence dans le marché local. Ça ne fera que renforcer les rentes des monopoles. Le commerce interne est complètement opaque », dit-il à ce propos. Il en est de même pour le taux de change. Ainsi, si la Banque d'Algérie tient compte des variations de la valeur du dollar et de l'euro pour le calcul du taux de change, les acteurs du marché parallèle de la devise se gardent d'apporter le moindre changement, observe notre interlocuteur. Mais ces conséquences ne seront palpables qu'à long terme, insiste-t-il. « Si demain la Banque centrale européenne prend des mesures structurelles, les choses vont revenir à leur place », avertit-il. « Si la Grèce tombe, il y aura une sorte d'effet domino qui va s'enclencher », indique l'expert en rappelant que seule l'Allemagne s'en sort avec un déficit « dans les marges », tandis que les autres pays européens tels que le Portugal, l'Espagne et, à un degré moindre, la France, l'Italie et la Grande-Bretagne, sont dans la zone rouge. « Les Européens vont tout faire pour éviter cet enchaînement », notamment à travers la mise en place d'un fonds de soutien pour les membres de la zone euro en difficulté financière, fait remarquer M. Goumiri.