Nicolas Sarkis est le directeur de la revue Pétrole et gaz arabes (PGA) et dirige également le Centre arabe d'études pétrolières dont le siège se trouve à Paris. En connaisseur avisé du monde de l'énergie, il a bien voulu revenir sur le scandale de corruption qui a éclaboussé Sonatrach et d'en analyser les répercussions autant sur l'image que sur les activités du groupe. Sonatrach est actuellement au centre d'un scandale de corruption qui a conduit à l'arrestation de nombre de ses hauts cadres. Quel est, selon vous, l'impact d'une telle situation sur le groupe ? Dans tous les pays du monde, Sonatrach est perçue comme une société modèle qui a pu se développer très rapidement et en plus sur des périodes relativement très brèves. C'est une société qui, par ailleurs, a réussi le pari de s'internationaliser. Sonatrach a pu bénéficier, jusque-là, d'une image extrêmement positive. Maintenant, il est vrai que le groupe traverse malheureusement depuis des mois disons une zone de turbulences. Mais quoi qu'il en soit, il faut rester prudent dans l'analyse de la situation. Mais vous ne pouvez quand même pas dire qu'un tel scandale est passé inaperçu à l'étranger ? Vous devez savoir que les informations que nous avons sont uniquement celles qui paraissent dans la presse. Tant que l'instruction n'a pas connu son épilogue, nous ne pouvons rien dire. Les personnes soupçonnées ou accusées de corruption sont supposées innocentes jusqu'à preuve du contraire. Il faut respecter la présomption d'innocence. C'est pour cela que je dis qu'il faut être prudent. En même temps, il faut espérer que ces accusations sont exagérées ou ne sont peut-être pas exactes. Mais quoi qu'il en soit, le mal est effectivement fait, car cette affaire a quand même causé des dégâts importants. Je dois reconnaître que beaucoup de gens se posent des questions. Seulement, il faut espérer que Sonatrach s'en sortira dans les meilleures conditions possibles. De quelle nature sont les dégâts causés par cette affaire de corruption ? Je veux tout simplement dire que quand les gens lisent ce qu'il y a dans la presse et entendent qu'il y a corruption et que, par exemple, un haut responsable a été écarté et que ces parents ont profité de ses positions, soyez certain que cela n'est pas une très bonne publicité pour Sonatrach. Les gens qui connaissent l'Algérie et Sonatrach sont parfois étonnés et parfois même scandalisés. Mais dans tous les cas, la situation fait mal tout autant qu'elle fait mal à tous les Algériens qui savent ce que représente Sonatrach pour l'Algérie, pour leur économie et pour l'indépendance de leur pays. Vous suggérez donc de dépasser très vite ce scandale… Ce que je sais c'est que Sonatrach a besoin d'une bonne image de marque et de mener sa mission dans les meilleures conditions possibles. Cela travaillera autant les intérêts de l'Algérie que ceux des partenaires de Sonatrach. Et cela qu'il s'agisse des pays importateurs de pétrole et de gaz ou des pays qui projettent d'investir en Algérie. Heureusement que l'Algérie ne manque pas de cadres capables de prendre la relève de ceux qui ont été écartés de leur poste et de faire traverser à Sonatrach ce que j'ai appelé une zone de turbulences. Quoi qu'il en soit, ce sont des choses qui arrivent. Cela s'est déjà produit dans d'autres pays et puis le monde ne s'arrête pas là. Mais vous ne dites pas si cette situation peut déboucher, dans l'immédiat, sur une remise en cause de certains contrats ou de certains partenariats ... La situation présente peut, en effet, constituer un frein et, par conséquent, retarder les choses. Mais de là à croire que l'affaire dont vous parlez peut remettre en cause des partenariats qui ont de très bonnes raisons d'être, ça je ne le pense pas. Ceci dit, cette affaire peut être un handicap dans certaines négociations en cours pour la conclusion de contrats portant sur des ventes ou des investissements. Elle peut aussi avoir un effet sur la coopération. Mais dans l'ensemble, je crois que la situation est provisoire. Au pire, elle se traduira par le report de certains projets. Le nouveau PDG de Sonatrach peut-il, selon vous, relever le défi de redorer le blason de Sonatrach ? Je le crois vraiment. M. Cherouati est quelqu'un qui a une très bonne réputation et une excellente expérience. Je suis persuadé qu'il assumera pleinement ses responsabilités. Des responsabilités qui, il faut le dire, sont très lourdes dans le contexte actuel. Pour le bien de Sonatrach, il faut vraiment lui souhaiter tout le succès qu'il mérite.