Le sommet extraordinaire de la Communauté économique des Etats de l'Afrique de l'Ouest (Cédéao) s'est ouvert hier à Ouagadougou, capitale du Burkina Faso. Elargie à la Mauritanie, au Tchad et au Cameroun, cette rencontre est consacrée à la lutte anti-djihadiste au Sahel. Dans son intervention à l'ouverture du sommet, le président de la commission de la Cédéao, Jean-Claude Brou, a fait état de «2200 attaques ces quatre dernière années, 11 500 morts, des millions de déplacés», une «activité économique considérablement affectée» et des «conflits intercommunautaires exacerbés» au Sahel. De son côté, le président burkinabè Roch Marc Christian Kaboré a indiqué que «les menaces transcendent les frontières». «Nous sommes tous exposés, aucun pays n'est à l'abri», a-t-il déclaré, rappelant que «l'escalade de la violence a déclenché une crise humanitaire sans précédent» dans son pays et que «des écoles et infrastructures de santé (ont été) fermées et des symboles de l'Etat détruits». «Il ne se passe pas un jour sans perte humaine, nous assistons à la banalisation de la violence, à la terreur au quotidien», a déclaré de son côté le président nigérien Mahamadou Issoufou, soulignant «l'urgence de la situation alors que la menace s'étend vers le sud». Et de s'interroger en conséquence : «Faut-il trouver un substitut au dispositif actuel (…) ou le renforcer ?» En marge du sommet, il a toutefois affirmé qu'il souhaite «un renforcement avec de l'aide financière, des équipements ou des hommes». D'autant que, «s'il faut mettre en place un autre mécanisme, on va perdre du temps, or on n'a pas le temps. Il y a urgence. Il s'agit d'agir vite». Conscient des limites de la force, il a appelé en juillet à la formation d'une «coalition internationale» sur le modèle de celle qui a lutté contre le groupe Etat islamique (EI) en Irak et en Syrie. Forces inertes Le sommet intervient alors que les attaques liées aux groupes islamistes dans cette région s'intensifient au fil des années depuis 2015. Constat alarmant malgré la création de la force multinationale du G5 (Burkina Faso, Mali, Mauritanie, Niger, Tchad) qui devait comprendre 5000 hommes. Officiellement lancée par la France en 2017, cette initiative est loin d'être effective faute de moyens financiers et d'équipements. Elle complète l'action de la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations unies pour la stabilisation au Mali (Minusma) dont le mandat est d'aider les autorités maliennes à stabiliser leur pays. La France a déclenché en janvier 2013 l'opération militaire «Serval», pour freiner l'avancée des islamistes qui contrôlent le nord du pays vers le centre et le sud, à laquelle a succédé en août 2014 l'opération «Barkhane», dont le rayon d'action s'étend à l'ensemble de la zone sahélo-saharienne. Mais les groupes sont loin d'être anéantis. Le 29 juin 2018, le quartier général de la force conjointe du G5 Sahel, à Sévaré, au centre du Mali, est attaqué. Le bilan officiel fait état de trois morts, deux militaires et un civil. Le Groupe de soutien à l'islam et aux musulmans (GSIM), principale alliance djihadiste du Sahel liée à Al Qaîda, a revendiqué l'attentat. Entre-temps, les Etats du G5 Sahel attendent toujours de recevoir une partie des 420 millions d'euros promis par leurs partenaires européens. Le 19 août dernier, une attaque djihadiste contre une base militaire dans le nord du Burkina Faso, avait fait 24 morts et 7 blessés. Alors qu'à la mi-juillet, les autorités de Ouagadougou ont prorogé de six mois l'état d'urgence, en vigueur depuis décembre 2018 dans plusieurs provinces du pays.