L'appel lancé lors des forums du vendredi et via les réseaux sociaux pour manifester contre la convocation du corps électoral a eu l'écho escompté. Universitaires, étudiants et citoyens ont répondu massivement à l'action de protestation. Un rassemblement pacifique, tenu hier à Constantine, a été réprimé par les forces de l'ordre et plusieurs personnes ont été violemment arrêtées. La machine de la répression qui s'est mise en branle dans plusieurs wilayas a confirmé, à partir de la capitale de l'Est, que le forcing électoral n'est plus une vue de l'esprit. Et pour ce faire, le régime en place déploie des moyens conséquents. Si aucun incident n'est à signaler lors des marches des vendredi et mardi, celle d'hier a dérogé à la règle. Elle a essuyé les effets d'une politique de représailles qui se manifeste avec insistance à chaque attroupement citoyen. L'appel lancé lors des forums de vendredi et via les réseaux sociaux pour manifester contre la convocation du corps électoral a eu l'écho escompté. Universitaires, étudiants et citoyens ont répondu massivement à une action contestataire pour rejeter, encore une fois, la feuille de route que le pouvoir veut appliquer contre la volonté populaire. C'est aussi pour dénoncer la politique du fait accompli qui vise à consacrer une consultation électorale, après l'adoption par les deux Chambres du Parlement, en un temps record, du texte de l'amendement de la loi électorale et de celui portant création d'une autorité indépendante des élections. En rejoignant le point de ralliement devant le palais de la Culture El Khalifa, vers 10h, les manifestants n'étaient pas surpris, outre mesure, de constater qu'un dispositif sécuritaire était déjà en place. Banderoles et pancartes brandies, ils se sont mis à scander les slogans habituels, hostiles au chef d'état-major et à tous les autres symboles du système. Au bout d'une quinzaine de minutes, des agents de la force publique se sont approchés du rassemblement pour visiblement le disperser. Face à cette tentative de les faire taire, les manifestants ont repris de plus belle le slogan «Dawla madania, machi askaria !». Plusieurs d'entre eux ont été empoignés et embarqués manu militari dans un fourgon, en dépit des protestations de la foule. De jeunes hirakistes ainsi que deux journalistes, Amor Chabbi, du site électronique Atlas Times et notre collègue Noureddine Nesrouche ont été emmenés au commissariat central de police dans le quartier du Coudiat. Les deux journalistes ont été libérés en fin de matinée. Les autres jeunes étaient toujours dans les locaux de la police à l'heure où nous mettions sous presse. Mais personne ne s'est laissé abattre par cette intervention musclée. «Beaucoup d'entre nous ont été molestés, d'autres interpellés, mais rien n'altèrera notre engagement», a déclaré un universitaire qui a tenté de s'interposer lors de ces arrestations. Les manifestants se sont mis à scander : «Dawla madania, machi boulicia !», pour entonner ensuite la célèbre chanson du hirak «Makanche el vote, wallah ma ndirouh !» (Il n'y aura pas de vote, il ne se fera pas). Et d'entreprendre, en forçant le cordon sécuritaire, une marche à travers les artères principales de la ville, encadrés par les forces de l'ordre. Interrompus plusieurs fois, les marcheurs ont réussi à mener leur action jusqu'au bout. Ce fut un test de mobilisation, en dehors des marches hebdomadaires, qui a tenu toutes ses promesses.