Le jour tant attendu, et appréhendé par des milliers de lycéens, est arrivé. A l'issue d'une année scolaire houleuse, c'est le moins que l'on puisse dire, quelques centaines de milliers d'élèves de classes de terminale ont débuté, avec anxiété, les examens du baccalauréat. Le coup d'envoi a été donné, hier, avec l'épreuve de langue arabe. Et les sujets ont différemment été appréciés par les candidats. Il est près de midi aux abords du lycée El Idrissi. Le temps imparti à la composition est sur le point de prendre fin, et des groupes épars se sont formés aux alentours du portail du centre d'examen. Module phare pour les étudiants littéraires, nombre d'entre eux estiment, soulagés, que le sujet, accessible, est « un geste pour faciliter les épreuves, après une année catastrophique ». « Reste maintenant à savoir si cette indulgence s'appliquera aux autres matières », s'inquiète un lycéen, interrompu par son amie qui souffle, sombre, « mais aussi et surtout à savoir si les correcteurs seront tout aussi arrangeants ». Et si certains pensent s'en être sortis avec brio, d'autres fulminent comme ce jeune : « Je suis tout simplement nul en arabe et la littérature n'est pas mon fort… Ma copie procurera moult fous rires à la personne qui s'en chargera de la corriger », prédit, mi-amusé, mi-dépité, un adolescent. Il est maintenant plus de 12h30 et l'épreuve est bel et bien finie. Les retardataires sortent lentement, les joues rouges et le front crispé. Ils rejoignent, avec de grands gestes, leurs camarades. S'ensuivent de longues conversations animées, durant lesquelles interjections et cris fusent. De prime abord, la scène est un grand classique du genre, et n'a rien d'inhabituelle. Mais de loin seulement. Entre littérature et football Car à tendre l'oreille, l'esprit de certains adolescents, pour ne pas dire tous, ne sont pas uniquement à la littérature arabe, classique ou moderne. Car, sitôt sortis d'examen, les élèves après avoir posé quelques questions d'usage, concernant telle ou telle question, les dialogues ont vite fait de virer aux commentaires footballistiques. « Non mais, est-ce que tu arrives à croire que Ghezzal n'ait pas marqué ! », s'exclame une jeune fille à l'adresse de sa camarade. « A se demander quelle prestation ils pourront bien faire face à l'Angleterre s'ils joueront comme l'ont fait contre les Emiratis ! », s'énerve, pessimiste, un jeune homme devant un lycée à Bab El Oued. « Heureusement que les Verts n'ont pas joué comme contre la Côte d'Ivoire. Sinon, nous n'aurions pas pu dormir », se réjouit, quant à elle, une mère de famille. On l'aura donc compris, le périple de l'équipe nationale de football préoccupe tout autant que le sujet sur lequel les lycéens ont eu à plancher. « Et encore, ils ont limité les dégâts en organisant le baccalauréat avant le début de la Coupe du monde », tempête la maman d'une lycéenne. Et encore ! Car ils auront été nombreux à avoir délaissé leur révision le temps de l'un des matchs amicaux des Fennecs. « Ce n'est pas tant que la préparation au Mondial soit plus importante, mais cela nous change les idées », explique un jeune homme, serre-poignet à l'effigie des Verts et cahier à la main. « Et puis la langue arabe n'est pas si importante que cela pour nous, filière gestion. D'où cette décontraction… », tente d'avancer, pas très assuré, son copain. « Nous savons que ces quelques jours sont déterminants pour nos vies futures », confie, un tantinet studieuse, une jeune fille. « Mais franchement, nous sommes vraiment pressés d'en finir ! », conclut-elle avec un sourire. Son camarade ajoute, à brûle pourpoint : « Pour pouvoir regarder les matchs tranquillement ! », dit-il dans un rire franc. Alors, oui, comme depuis toujours, les bacheliers appellent de tous leurs vœux un succès. Mais cette année, ils espèrent le fêter en même temps qu'une victoire des Verts au Mondial…