Fin mai 2001, et en pleine crise de Kabylie qui en était à ses débuts avec son lot de morts et de blessés, un remaniement gouvernemental est annoncé. La principale « victime » fut le ministre des Finances Abdelatif Benachenhou, remplacé alors par un ancien ministre du Commerce, Mourad Medelci. C'était à l'ère du gouvernement Benflis, et au moment où l'actuel chef du gouvernement occupait le ministère de la Justice. Près de quatre années plus tard, Benachenhou, le ministre des Finances au gouvernement d'Ahmed Ouyahia, est donné partant par... la rumeur. Des spéculations vont bon train ces derniers jours quant à son départ du gouvernement, pour cause, dit-on, d'incompatibilité de vision avec l'actuel chef du gouvernement. Benachenhou est accusé, à tort ou à raison, d'être un adepte de l'orthodoxie financière. Et il se trouve que depuis sa dernière sortie médiatique, l'actuel argentier du pays n'a fait que corroborer les supputations des journalistes, souvent accusés d'être en mal de scoop. En effet, Abdelatif Benachenhou en rétorquant qu'il « ne bloque pas le développement de l'Algérie », lors de la cérémonie de signature d'une convention pour le financement du logement entre le gouvernement et le Fonds arabe de développement économique et social (Fades), s'est montré sur la défensive, alors qu'il n' y a pas si longtemps - considéré comme l'un des plus proches du président de la République -, certains n'ont pas écarté sa nomination à la tête de l'Exécutif. Mais y a-t-il au fait une méthode Benachenhou ou perd-il simplement une bataille dans une guerre de positions entre clans au pouvoir ? C'est toute la question, car à trop vouloir chercher des lignes de fractures idéologiques ou programmatiques entre membres d'une équipe réunie pour le seul objectif de mettre en œuvre un programme présidentiel connu de surcroît depuis 1999, laisse quelque peu pantois plus d'un observateur ! Abdelatif Benachenhou, pour qui « le ministère des Finances n'a pas vocation à geler l'argent mais plutôt à financer ce qui sert le développement de l'Algérie », ne s'est pas illustré par des remises en causes de la politique suivie par le gouvernement. Quant au financement par l'Etat des grands chantiers entamés ou à venir, tel le Métro d'Alger, l'autoroute Est-Ouest, la nouvelle aérogare d'Alger et bien d'autres chantiers en cours, c'est suite à la défection des investisseurs étrangers que l'Etat a décidé de prendre à bras-le-corps de tels financements. A moins que le ministre ne fasse allusion qu'aux dépenses « superflues » de l'Etat, dont les excès sont un secret de polichinelle, comme en témoigne la pléthore de séminaires, rencontres et autres conclaves budgétivores, aux antipodes de toute rationalité économique. En réaffirmant sa conviction de ne pas être un obstacle pour le financement des projets « pour peu que les conditions acceptables soient respectées », le ministre insinue des gaspillages qu'il se garde de bien nommer. Mais même s'il semble aussi que la manne financière dégagée pour les quatre années à venir laisse piaffer d'impatience les rentiers de tout bord, la question qui mérite cependant que l'on s'y attarde, est ce revirement dans l'option à prendre pour la sélection des types de financement. Le retour au financement des ces projets par l'Etat peut être considéré comme une sorte de désaveu cinglant à l'égard d'un ministre dit pourtant l'un des hommes du président ? Cela dit, il reste que Benachenhou avait critiqué, on s'en souvient, la faible croissance du secteur public et, partant, la lenteur enregistrée dans la mise en mouvement des privatisations. A ce niveau, il était déjà entendu qu'il visait, selon l'opinion commune, le chef du gouvernement Ouyahia. S'il ne fait aucun mystère de son désaccord avec le chef de l'exécutif, c'est pourtant Harchaoui qui, pour la riposte, ne s' est pas gardé de lui porter l'estocade au nom du RND, dont le chef n'est nul autre qu'Ahmed Ouyahia.