La Turquie, qui soutient le Gouvernement d'union nationale (GNA) reconnu par l'ONU, a menacé dimanche de prendre pour «cible» les troupes du maréchal Khalifa Haftar, si les attaques contre les «intérêts» turcs en Libye se poursuivaient. «Nous soulignons que si nos missions et nos intérêts sont visés en Libye, les forces de Haftar seront considérées comme des cibles légitimes», a mis en garde le ministère turc des Affaires étrangères dans un communiqué. «Les attaques contre des missions diplomatiques, y compris notre ambassade à Tripoli, l'aéroport Mitiga (le seul en service dans la capitale libyenne, ndlr), les avions civils se préparant à décoller et autres infrastructures civiles et celles dans lesquelles des civils sont tués ou blessés constituent un crime de guerre», a ajouté Ankara. La communauté internationale a «la responsabilité collective» de stopper le «putschiste Haftar», a encore déclaré le ministère. Ankara a renforcé ces derniers mois son appui, notamment militaire, au gouvernement d'union qui siège à Tripoli face aux troupes de Khalifa Haftar, qui ont déclenché, en avril 2019, une offensive en vue de s'emparer de la capitale libyenne. La Turquie a évité au GNA une déroute militaire. Son implication dans le conflit a permis un rééquilibrage des rapports de force sur le terrain. Haftar est quant à lui soutenu par les Emirats arabes unis, l'Arabie Saoudite, la France, l'Egypte et la Russie. Le conflit libyen a évolué au fil du temps en guerre par procuration qui a pour objectif le contrôle, entre autres, du gaz et du pétrole libyens. Des morts et des blessés L'avertissement d'Ankara intervient au lendemain d'intenses raids contre Tripoli. Plus de 80 missiles ont ciblé en effet samedi des quartiers résidentiels à proximité de l'aéroport de Maitigua, dans la banlieue-est de Tripoli, ainsi que la zone de Gasr Bab Ben Ghashir, provoquant des morts et des blessés. Le conseil présidentiel du GNA a attribué les attaques aux forces de l'autoproclamée Armée nationale libyenne (ANL) dirigée par Khalifa Haftar. Pour sa part, la Société Brega, de commercialisation des produits pétroliers, a annoncé que ses réservoirs de kérosène se trouvant dans l'entrepôt de l'aéroport international de Maitigua ont été gravement endommagés. Jeudi dernier, deux roquettes ont par ailleurs ciblé le parc Al Chatt, à Zawiyet Al Dahmani, un quartier où se trouvent les sièges de la Radio télévision libyenne, du ministère des Affaires étrangères, l'hôtel Mehari, l'ambassade de Turquie et la résidence de l'ambassadeur d'Italie, surplombant la corniche de la capitale. Selon le ministère de l'Intérieur du GNA, deux personnes, un policier et un civil, ont été tuées à la suite de bombardements aveugles à Zawiyet Al Dahmani. Le président du conseil présidentiel du Gouvernement d'union nationale, Fayez Al Sarraj, a qualifié les bombardements dans la région de Zawiyet Al Dahmani d'«acte criminel barbare», dénonçant les attaques répétée contre des quartiers résidentiels. Pour sa part, la Mission d'appui des Nations unies en Libye (Manul) a dénoncé le «ciblage systématique des quartiers civils», précisant avoir recensé, entre le 1er et 8 mai, la mort de 15 civils et 50 autres blessés par des tirs d'obus. La Manul a souligné que ces attaques constituaient des «crimes de guerre et contre l'humanité» et a promis de les transmettre au groupe d'experts de la Cour pénale internationale.