Alors que le rapport de Mustapha Farouk Ksentini est entre les mains du président Abdelaziz Bouteflika, les organisations des familles des disparus continuent à exiger « justice et vérité ». Même si, jusqu'à présent, rien n'a filtré du contenu du rapport, le Collectif des familles des disparus en Algérie (CFDA) et SOS Disparus trouvent à redire sur le travail de près de 19 mois de la commission ad hoc, présidée par Me Ksentini depuis le 20 septembre 2003. Les deux organisations s'insurgent contre l'« exonération de l'Etat de sa culpabilité en attribuant les disparitions à des agents isolés ». Elles considèrent aussi que la commission veut dédouaner l'Etat de toutes ses obligations octroyant des indemnisations aux familles concernées. Elles précisent cependant que l'indemnisation de toutes les familles pour les souffrances endurées est un droit aussi naturel que l'est le droit à la justice et à la vérité, avant de rappeler qu'il n'est pas question pour les familles « de troquer la justice et la vérité contre l'argent ». « La commission ad hoc a indiqué avoir comptabilisé 6146 cas de disparitions du fait d'agents de l'Etat. Nous demandons ainsi à Me Ksentini d'expliquer aux familles comment 6146 agents de l'Etat ont pu échapper aux ordres de leurs supérieurs », ont-elles souligné dans un communiqué commun transmis hier à notre rédaction. Et de renchérir : « Me Ksentini a-t-il demandé aux agents impliqués où étaient les 6146 personnes disparues, car c'est avant tout cette vérité qui intéresse les familles ? » Ce qu'attendent les familles, c'est « une vérité » qui nécessite, soutiennent les deux organisations, un courage politique pour que l'Etat reconnaisse non seulement sa responsabilité, mais aussi sa culpabilité. Elles attestent également que « les familles des disparus n'ont jamais cessé de déposer des plaintes devant les tribunaux algériens, plaintes qui identifiaient souvent les personnes responsables de ces disparitions ». Mais, selon les termes du communiqué, ces familles se heurtent à l'incompétence ou plutôt à l'impuissance de la justice. Le CFDA et SOS Disparus, ayant réservé une fin de non-recevoir au projet d'amnistie générale, estiment que les visées d'un tel projet ne sont autres que celles de vouloir effacer « les crimes et ne laisser donc plus de place à la justice ».