Algérie-Tunisie: signature d'un accord de coopération et de partenariat dans le domaine de l'Enseignement supérieur et de la recherche scientifique    Présidentielle en Equateur: Noboa prend la tête du scrutin (dépouillement à 45%)    Biskra: coup d'envoi du Festival culturel international de la poésie arabe classique    2025, l'année de la réussite de l'Algérie    Hamlaoui présente trois projets d'aide pour les femmes du mouvement associatif    «Pour l'Algérie, c'est le moment idéal pour négocier un accord avec l'empire américain, qui est désormais en position de faiblesse»    Démantèlement d'un réseau de trafic de drogue impliquant le Maroc    Vers l'installation d'un comité technique restreint, chargé de déterminer la répartition des quotas    Tirer les leçons de la crise de 1929 et celle de 2008    Apanage des seules élites algériennes francophiles    La JSK perd deux précieux points sur son terrain    Pourquoi a-t-il choisi l'Algérie et non pas...?    Ballalou dévoile les sites culturels et naturels proposés pour inscription    L'ambassadeur d'Algérie en Egypte s'enquiert de l'état de santé du joueur Kendouci    Rencontre du président de la République avec les opérateurs économiques : l'Algérie connaît un développement global et intégré    Attaf copréside à Addis-Abeba avec son homologue éthiopien les travaux de la 5e session de la commission mixte algéro-éthiopienne    Le président de la République annonce la création prochaine de deux instances chargées de réguler l'importation et l'exportation    Hadj 2025 : le ministère de la Santé organise une journée de sensibilisation au profit des membres de la mission médicale    Judo / Championnat d'Algérie juniors : CS Ouled El Bahia garçons et MC Alger filles sacrés par équipes    Saisie de 66 kg de cocaïne à Adrar    APN: le directeur de l'ONPO passe en revue les derniers préparatifs du hadj 1446h/2025    Ghaza: le bilan de l'agression génocidaire sioniste s'alourdit à 50.944 martyrs    Projection en avant-première du film d'animation "Touyour Essalam", à Alger    «Pour l'Algérie, c'est le moment idéal pour négocier un accord avec l'empire américain, qui est désormais en position de faiblesse»    Recrutement de surveillants de plages saisonniers    Apanage des seules élites algériennes francophiles    Avec 9 joueurs, l'ESS prive l'ASO d'une égalisation    L'Algérie exprime sa vive protestation suite à la décision de la justice française de placer en détention provisoire son agent consulaire en exercice    "Oueld E'ttir" un projet moderne pour une meilleure mise en valeur du patrimoine chaabi    Football: l'équipe du FLN, porte-voix de la Révolution algérienne    Un climat de terreur    Inhumation du Lieutenant-colonel Djoulem Lakhdar à Tissemsilt    La Fifa organise un séminaire à Alger    Khaled Ouennouf intègre le bureau exécutif    150e Assemblée de l'UIP à Tachkent: la députée Farida Ilimi élue membre de la Commission de la santé    L'Algérie et la Somalie demandent la tenue d'une réunion d'urgence du Conseil de sécurité    30 martyrs dans une série de frappes à Shuja'iyya    La Coquette se refait une beauté    Le Parlement persiste et signe    Lancement imminent d'une plate-forme antifraude    Les grandes ambitions de Sonelgaz    La force et la détermination de l'armée    Un rempart nommé ANP    Lutte acharnée contre les narcotrafiquants    Cheikh Aheddad ou l'insurrection jusqu'à la mort    Un historique qui avait l'Algérie au cœur    Des partis politiques continuent de dénoncer la position du gouvernement de transition au Mali contre l'Algérie    Création «prochaine» de délégations de wilayas de la société civile    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



Nadia Maïzi. Professeur à MINES ParisTech, spécialiste de modélisation et d'aide à la décision pour les enjeux énergétiques et climatiques, membre du GIEC : « Il faut réfléchir localement pour trouver des solutions »
Publié dans El Watan le 10 - 03 - 2021

* L'Afrique du nord, qui renferme l'un des plus grands déserts du monde, semble particulièrement exposée au réchauffement climatique et à la désertification ? Quel est votre point de vue là-dessus ?
Les problèmes liés à la raréfaction de l'eau seront prépondérants et pourraient avoir des impacts sur l'activité touristique mais également sur les différents usages de l'eau dans cette région du Nord de l'Afrique, et en Algérie notamment. Le réchauffement climatique induit la fonte des glaces qui a pour conséquence une élévation du niveau (de la mer de l'ordre de 30 centimètres par siècle). Pour un pays comme l'Algérie, la vie en bord de mer se trouve déjà changée : les côtes méditerranéennes, lors d'événements météorologiques extrêmes, voient un recouvrement de leur rivage amplifiant la question de la hausse du niveau de la mer. De plus, le réchauffement modifie les caractéristiques de l'eau au niveau physicochimique, renforçant le phénomène d'acidification qui engendre une perturbation de l'écosystème et joue sur la biodiversité surtout marine et côtière : la méditerranée devient beaucoup plus chaude alors que cette mer est plutôt peuplée d'espèces vivant en eau froide, ce qui a des répercussions sur la pêche. Ainsi, à l'échelle de la Méditerranée, les effets des changements climatiques vont avoir des répercussions à la fois sur plusieurs secteurs : l'agriculture et la pêche avec la diminution des rendements de ces activités ainsi que le tourisme.
* Les changements climatiques, la hausse des températures et raréfaction des ressources hydriques vont donc induire une réaction en chaîne à tous les niveaux pour des pays déjà peu arrosés comme l'Algérie.
Les changements climatiques se traduisent par des événements extrêmes comme les vagues de chaleur ou des inondations qui pourraient être plus fréquents et plus violents. Et puis des périodes de sécheresse qui pourraient être plus nombreuses et qui pourraient être marquées par des jours de très grosse chaleur avec des températures importantes. Mais ça, on l'expérimente déjà : chaque année, il fait de plus en plus chaud, de plus en plus tôt. Il y a des pics de chaleur extrêmes.
Une des graves conséquences est la raréfaction de l'eau, à l'échelle de la région méditerranéenne : des études évaluent qu'il y aura une diminution des ressources en eau pour les pays du sud de la Méditerranée de 10 à 30 % d'ici 2050.
On peut observer cette raréfaction dans le secteur de l'énergie où l'eau joue un rôle important : par exemple, dans le secteur hydroélectrique, même si il est peu développé en Algérie, un certain nombre de réservoirs sont déjà bouchés ou vont l'être à cause de la variabilité climatique et des moindres précipitations, ce qui rend la production électrique inefficace.
Il y a également des problèmes d'intrusion saline dans les nappes phréatiques à cause de l'élévation du niveau de la mer. Cela crée des nouvelles zones sans eau potable disponible. C'est le cas en Algérie où il devient urgent de mettre en place des systèmes pour limiter cette pollution.
La hausse des températures a également un effet sur les oueds qui perdent leur teneur en oxygène et leur capacité d'autoépuration et d'auto nettoyage. Comme il y a moins de ruissellement, les polluants se concentrent ce qui a un effet direct sur la pollution de tous ces cours d'eau.
* Donc, les changements climatiques vont se produire à long, à moyen et à court-terme...
Les paléo-climatologues font des carottages pour connaître le climat sur de très longues périodes et observent les phénomènes liés à dynamique très lente, où un réel changement de climat s'opère, comme par exemple le passage d'une ère glaciaire à une ère plus chaude, avec des disparitions d'espèces; les autres phénomènes de dynamique temporelle plus rapide, sont ceux que l'on observe tous à l'échelle de notre vie, avec les fluctuations de la météo. Dans l'analyse de ces phénomènes, il y a la part qui vient du climat régional propre, et celle qui vient de l'interaction de l'homme avec son environnement. Pour prendre un exemple, je citerais les travaux de l'américaine Diana K. Davis, de l'Université du Texas, qui a travaillé sur le lien entre l'histoire de l'environnement en Algérie et la colonisation (NDLR : « Les mythes environnementaux de la colonisation française au Maghreb » de Diana K. Davis). Elle y explique que l'Algérie est, depuis plusieurs milliers d'années, un pays aux conditions climatiques semi aride où il y a peu de forêts et donc naturellement peu boisé. Pourtant, les Français à partir de 1830, ont commencé à répandre le mythe d'une désertification qui viendrait des habitudes agropastorales des populations locales nomades, avec leur cheptel et de leur exploitation traditionnelle des terres. Or, D. K. Davis indique dans son travail de recherche en s'appuyant sur de nombreux travaux académiques que l'Algérie n'a jamais été un pays recouvert par des forêts que quelques cheptels auraient décimées. Les français se sont plutôt servi du prétexte que ces terres auraient été dégradées par des pratiques agropastorales pour mettre en place un modèle agricole qui n'était finalement pas adapté aux conditions climatiques locales : leur exploitation productiviste des terres avec des machines mécaniques les ont asséchées et acidifiées alors que le fait de les travailler traditionnellement avec un socle léger pour le labour et l'utilisation des techniques de jachère, pour les laisser reposer, était beaucoup plus adapté au climat local.
* Il faudrait donc revenir à des méthodes plus adaptées au sol et au climat local ?
Oui, il me semble qu'il faut réfléchir de cette façon là, c'est-à-dire localement, réfléchir avec le contexte qui est proposé par la terre sur laquelle nous vivons et de laquelle on veut tirer nos moyens de subsistance, pour essayer de trouver des solutions. Et ce qui très dangereux est de se faire imposer des schémas qui peut être fonctionnent ailleurs mais qui ne fonctionneront pas localement. On peut par exemple revenir sur la faillite du fameux « barrage vert » lancé dans les années 70, ce projet qui devait retenir la progression du Sahara avec la plantation d'arbres sur 1500 kilomètres. Non seulement les pasteurs qui vivaient dans ces régions ont été obligés de s'établir hors de cette zone, et on sait qu'aujourd'hui ce projet est considéré comme un échec écologique parce que la plupart des arbres plantés ont eu un très bas taux de survie.
C'est l'exemple type d'un projet qui s'est basé sur une analyse biaisée, dans le prolongement de la vision coloniale qui utilisait le prétexte de la désertification pour imposer son schéma d'organisation agricole en dépit de ce que les populations locales pratiquaient depuis des siècles. Et aujourd'hui, on a l'impression qu'il y a une continuation de cette façon de faire que cela soit pour le climat ou même l'énergie. Le déploiement en Algérie de schémas via l'aide au développement, via les propositions de l'ONU, via les projets de la banque mondiale, qui sont finalement des visions externes, se base souvent sur une mauvaise analyse du terrain. Ceci s'inscrit dans le prolongement de la thèse que développe cette auteure américaine qui indique que les millions de dollars d'aide internationale qui vont être consacrés à la lutte contre la désertification au Maghreb sont mal orientés et ne semblent pas être motivés par des études nouvelles basées sur des visions indépendantes des questions et problèmes spécifiques à l'Algérie.
Faire un état des lieux de la situation locale est primordial pour construire des réponses adaptées à l'impact du changement climatique et pour ne pas se précipiter sur des réponses court-termistes comme : il n'y plus de gaz, je vais exploiter les gaz de roche mère (gaz de schiste), il n'y a plus d'eau, je vais en importer. Il me semble que ces réponses ne sont pas adaptées pour les générations futures. Il serait préférable que soit élaboré au préalable un vrai état des lieux, pour permettre la construction d'un vrai projet écologique, économique, social, pour l'Algérie. Pour vraiment appréhender et dés lors, mieux se prémunir contre tout ce qui risque de se produire et qui serait aggravé par la crise climatique que l'on connaît.
Propos recueillis Djamel Alilat
Advertisements


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.