Le maire de Paris sera, à partir d'aujourd'hui, à Alger pour une visite de deux jours pleins pour faire le point sur la coopération avec la ville et la wilaya d'Alger depuis la signature en janvier 2003 d'un accord d'amitié et de coopération à l'Hôtel de ville de Paris entre Bertrand Delanoë et Abdelmalek Nourani, ex-wali d'Alger, dans le cadre des manifestations de l'Année de l'Algérie en France.Le maire de Paris a déjà visité Alger en décembre 2001 dans le cadre d'une tournée maghrébine. En décembre dernier, il a effectué des visites analogues à Rabat et Casablanca, et à Tunis. Si l'histoire et la mémoire de Paris sont traversées de nombreux épisodes en relation avec l'Algérie, les liens qui unissent les Algériens résidant à Paris à la capitale française sont également profonds et anciens. Une histoire faite de sang et de sueur d'Algériens, mais aussi de fraternité. C'est ainsi qu'on retrouve parmi les défenseurs de la Commune de Paris en 1870 des Algériens. Sans aller jusqu'à l'immigration à laquelle il a été fait appel dès le début du XXe siècle. « Ma tâche de maire est certes d'améliorer concrètement la vie de mes concitoyens. Mais il est au moins aussi essentiel de participer à tout ce qui affirme l'héritage historique, renforce le lien et permet de vivre ensemble aujourd'hui », affirme Bertrand Delanoë dans son livre La Vie, passionnément * (à la page 63). C'est à son initiative que la Ville de Paris a, pour la première fois, mémorisé le 17 octobre 1961 en 2001 et le 19 mars 1962 en 2004, deux dates importantes de l'histoire commune à la France et à l'Algérie. Des initiatives courageuses qui ont suscité de nombreux remous et marques d'hostilité de la part notamment des nostalgiques de l'Algérie française. « Osons la vérité historique. C'est une des forces de notre civilisation », écrit encore Bertrand Delanoë dans son livre (page 62). Sur la plaque apposée sur le pont Saint-Michel, ces mots : « A la mémoire des Algériens victimes de la répression sanglante lors d'une manifestation pacifique. » Il semblerait que chaque fois qu'il passe sur le pont Saint-Michel et qu'il remarque que la plaque a été souillée ou taguée, Bertrand Delanoë demande qu'elle soit aussitôt nettoyée. « Il ne suffit pas de dénoncer les atrocités commises par les nazis - parfois avec la complicité active de responsables français. Depuis, nous nous sommes encore rendus coupables de crimes contre l'humanité. Le reconnaître n'est pas seulement un devoir à l'égard des victimes et de leurs descendants, mais aussi un devoir de mémoire de nos propres valeurs piétinées. C'est pourquoi une plaque a été scellée sur le pont Saint-Michel, là où, le 17 octobre 1961, des manifestants algériens ont été précipités dans la Seine, alors que Maurice Papon était préfet de police de Paris. Nous devions commémorer ce sombre événement, qui n'est toujours pas officiellement reconnu », rappelle-t-il dans son livre (page 62). Au sujet des résidents étrangers non communautaires à Paris, et parmi lesquels les Algériens représentent une part importante, Bertrand Delanoë nous avait affirmé, à l'occasion d'une rencontre avec des journalistes représentant des médias étrangers accrédités en France, alors qu'il était candidat à la Mairie de Paris : « J'aime tous les Parisiens et j'ai besoin de tous les Parisiens pour mettre Paris en mouvement. » Et il ajoutait : « Je me suis toujours battu pour le vote de tous les étrangers, sans exception, aux élections locales après un certain temps de résidence en France. Parce que c'est plus démocratique, parce que c'est plus juste et parce que c'est plus efficace. Pour moi, c'est un des sujets des prochaines échéances nationales. En attendant, j'ai souhaité qu'il y ait des Français d'origine étrangère sur nos listes. Certains sont d'origine européenne, d'autres d'origine maghrébine. La communauté maghrébine est très importante à Paris (...). J'ai décidé, si je suis élu, de créer des conseils de résidents étrangers pour compenser ce manque dans la loi et consulter les résidents étrangers sur leur vie. » Depuis, Bertrand Delanoë est passé de la promesse à l'acte. Les ressortissants étrangers de l'Union européenne (UE) ont le droit de vote aux élections locales depuis la loi d'avril 2000, mais cette disposition ne concerne pas les étrangers non communautaires. C'est pourquoi le maire de Paris a voulu créer un conseil consultatif dénommé Conseil de la citoyenneté des Parisiens non communautaires qu'il préside. C'est à Khadidja Bourcart, adjointe au maire chargée de l'intégration et des étrangers non communautaires qu'a été confiée cette responsabilité. Selon des chiffres de l'INSEE, en 1999, la Ville de Paris comptait 166 585 étrangers hors Europe communautaire, âgés de 20 à 60 ans et plus. Les Algériens, au nombre de 27 816, représentaient 17% de l'ensemble de ces étrangers résidents. En termes de représentation nationale, les Algériens arrivent en tête. Les Marocains étaient 17 476 (10%) et les Tunisiens 12 692 (8%). Les trois pays du Maghreb représentaient à eux seuls 35% de la totalité des étrangers non communautaires avec 57 984 personnes. L'ensemble des étrangers (communautaires et non communautaires) étaient en 1999 au nombre de 308 266, soit 14,5% de la population parisienne. (*)Bertrand Delanoë, La Vie, passionnément, éd. Robert Laffont