A l'occasion de la célébration de la journée mondiale de la Liberté de la presse, la Fédération internationale des journalistes (FIJ) a présenté, lors d'une conférence de presse tenue hier en son siège à Bruxelles, son rapport sur la situation de la liberté de la presse dans le monde. Fait nouveau, Statewatch, une organisation européenne qui milite pour les libertés civiles, a été associée à ce rapport annuel. Le constat de la plus grande association mondiale de journalistes est inquiétant, pour ne pas dire alarmant. « La liberté de la presse est plus que jamais menacée », a déclaré le secrétaire général de la FIJ, Aidan White, avant d'ajouter : « Y compris dans les pays dits développés et démocratiques. » Selon la fédération, l'une des raisons de cette menace sur les libertés a trait à la lutte contre le terrorisme international qui, pour légitime qu'elle soit, est utilisée par des pouvoirs en place pour bâillonner toute opposition, voire toute critique. « La réponse des gouvernements à la menace que représente le terrorisme est hors de proportion. La guerre au terrorisme aboutit à un défi pour la culture mondiale des droits de l'homme et des libertés civiles établis il y a presque 60 ans », indique le rapport. Selon la FIJ, la pression est telle sur le travail des journalistes et les menaces directes ou indirectes si évidentes que « les médias et le journalisme indépendant souffrent d'une pesante atmosphère de paranoïa qui conduit à des niveaux dangereux d'autocensure ». Plus inquiétant, le rapport estime que « les gouvernements créent secrètement de gigantesques bases de données afin de surveiller leurs citoyens » et que « de nouvelles réglementations internationales sont adoptées dans un processus secret de blanchiment de la politique ». Une enquête menée par la FIJ dans une vingtaine de pays-cibles conclut qu'« environ la moitié des normes minimales établies dans la Déclaration universelle des droits de l'homme sont menacées par la guerre contre le terrorisme (...). Et une atmosphère de peur et d'incertitude est créée et les libertés civiles balayées, même au sein d'Etats réputés tolérants et pluralistes », a déclaré Aidan White. Face à cette situation, un appel a été lancé lors de la conférence de Bilbao (Espagne), tenue début avril, pour la création d'un large front « de groupes d'intérêts incluant les journalistes, les syndicats et les activistes des droits de l'homme pour faire campagne contre les atteintes aux libertés civiles et aux droits démocratiques ». Les conclusions de ce rapport et les recommandations de la conférence de Bilbao seront prises en compte par la direction mondiale de la FIJ qui se réunira le mois prochain à Rome, ont affirmé les conférenciers. Lors du débat ayant suivi la conférence, répondant à une question sur la situation de la presse en Algérie, le secrétaire général de la FIJ s'est dit particulièrement inquiet face au recul des libertés et l'acharnement de la justice contre les journalistes. « Le sort de Mohamed Benchicou, en prison depuis près d'une année, n'honore ni l'Algérie ni la sympathie pour le peuple algérien, encore moins le président Bouteflika », a-t-il conclu.