Haï El Hawdine (la cité des deux bassins) est à l'origine un centre de transit ouvert en 1978 qui devait abriter provisoirement les occupants des chalets coloniaux et de baraques situés sur le tracé de l'autoroute Dar El Beïda-Zéralda. La promesse ferme d'un relogement dans des délais, qui ne sauraient excéder deux années, va se transformer au fil des années en un mince espoir d'un recasement hypothétique. Au tout début, c'était beau et ça plaisait si bien à ces expropriés, qui retrouvaient la chaleur d'un foyer, même construit en éléments préfabriqués au milieu d'un décor soigné. Vingt-sept ans après, c'est un constat d'échec par rapport à la démarche des pouvoirs publics. Yahia Hadibi, un ancien membre du comité de... quartier, revient sur le déroulement de l'opération de l'expulsion de leurs habitations précaires, au motif d'utilité publique : « A l'époque, J'étais âgé à peine de huit ans lors de notre installation dans ces chalets en compagnie de 39 familles, venues du quartier de Triolet, des alentours du parc zoologique de Ben Aknoun et du lieudit la côte à Bir Mourad Raïs. Notre présence au centre de transit des deux bassins ne devait pas. En principe, dépasser un délai de deux ans. Hélas ! Nous sommes aujourd'hui à notre vingt-septième année. Comme vous pouvez le constater, à l'instar de mes voisins, je suis âgé de 35 ans, marié et père de deux enfants. » Un provisoire qui dure Notre interlocuteur réfute le terme de bidonville et se dit satisfait de leurs conditions de vie avant l'intrusion d'indus occupants, facilitée en cela au début des années 1990 par le Dec. « Notre centre de transit suscitait déjà des convoitises, et en 1990, fortes de l'appui du Dec de l'époque, 40 familles, qui avaient des proches exerçant à l'apc, ou venues de l'intérieur du pays, se sont ajoutées au chiffre déjà grandissant de Haï El Hawadine. Ces indus occupants ont érigé des baraques avec des moyens de fortune. Ce qui a fait perdre son esthétique à notre site. L'opération avait également pour but de compenser certains attributaires de logements à Dély Ibrahim, qui ont été détournés. » La cohabitation entre les habitants et leurs hôtes encombrants ne s'est pas faite sans casse, puisque le cadre est englué actuellement dans une misère extrême. Une escapade à l'intérieur du centre de transit renseigne sur l'état de précarité sociale qui frappe de plein fouet ces malheureux. Les plaques de goudron, qui remontent au temps du conseil de la Révolution, s'en vont en plaques entières et laissent entrevoir des crevasses béantes. Les façades des chalets, qui abritent des chambres surchargées, ont connu sans doute des jours meilleurs. La peinture s'effrite et le bois s'émiette. Pire, des flaques d'eau stagnent à proximité des chalets et dégagent des odeurs nauséabondes. « Il n'y a pas que ça ! Les usagers de la station de transport urbain de Ben Aknoun font leurs besoins naturels sur le mur de clôture du centre de transit. Personne n'est à l'écoute de notre détresse. La preuve, les pouvoirs publics ont érigé le mur de la honte pour cacher notre malheur aux hôtes de l'Algérie à l'occasion de la tenue du sommet arabe. Aïchine fi bladna au noir. Nous ne sommes pas dupes. Notre relogement, si relogement il y a, va profiter assurément à ceux qui convoitent nos terrains pour en faire un lotissement », a ajouté notre interlocuteur. En conséquence, les résidents ne veulent plus entendre parler de relogement. Ils revendiquent tout simplement le droit de construire leur propre maison dans une commune qui a vu naître leurs enfants. A priori, lorsqu'en 1995, c'est le Dec, lui-même, qui se présente aux habitants du centre de transit pour leur demander d'honorer des ordres de versement relatifs à l'acquisition de leurs parcelles de terrain auprès de l'Agerfa. Nourredine Kherroub, un recasé de Triolet, a déclaré : « Mon père a procédé au versement de la somme de 74 250 DA à l'Agerfa pour une parcelle de 148 m2. Nous sommes toujours dans l'attente de l'acte de propriété. » M. Hadibi abonde dans le même sens : « Le Dec a bloqué, sans aucune raison, l'opération au niveau de l'Agerfa et l'ancien wali délégué de Bouzaréah a déclaré sur les ondes de la radio El Bahdja que nous sommes incapables d'acheter ces lots de terrain. » M. Ali Ferfar, membre de la délégation du centre de transit, exhibe un document de la direction de l'urbanisme de la wilaya d'Alger, n° 16/96 du 25 mai 1996, adressé au Dec de Ben Aknoun et portant approbation de l'aménagement d'un lotissement à usage d'habitation, sis à Ben Aknoun au profit de l'Agerfa. L'arrêté portant permis de lotir, date du 5 juin 1996 et a reçu l'aval de l'ensemble des autorités de la wilaya d'Alger. D'ailleurs, il est clairement stipulé dans son article 1 : « L'Agerfa est autorisée à lotir une parcelle de terrain d'une superficie de 21 510 m2 en 77 lots, sis au lotissement les deux Bassins à Ben Aknoun. » Suivent, ensuite, la répartition des lots et leurs contenances. « Nous demandons tout simplement la régularisation de nos lots de terrain pour lesquels nous avons effectué des versements. L'octroi de l'autorisation du permis de construction est subordonné à la présentation des actes de propriété », a tenu à préciser notre interlocuteur. En attendant une issue heureuse à cet imbroglio administratif, les riverains vivent au rythme d'un feuilleton qui n'en finit pas. Voulant en savoir plus auprès du premier magistrat de la commune, nos tentatives d'entrer en contact avec le P/APC de Ben Aknoun se sont avérées malheureusement vaines, en dépit des bons offices du chef de cabinet. Parallèlement aux démarches de ces malheureux, on se souvient que le ministre des travaux publics, Amar Ghoul, avait, lors de l'inauguration de la trémie de Ben Aknoun, ordonné aux responsables locaux de trouver une solution pour ces familles. Cette cruelle situation dure maintenant plus de six mois. Station urbaine : source de désagréments En ce qui concerne la station du transport urbain, située à proximité de la trémie, cette source de désagréments représente un réel danger pour les riverains et un frein pour le trafic routier. Les transporteurs privés roulent sur les plates-bandes du transporteur historique l'Etusa, dans une anarchie indescriptible. Un poteau électrique gît de tout son long dans les espaces verts pleins de détritus. En outre, l'attente au niveau des abribus est pénible en raison de la pestilence des lieux. Le transfert, ordonné pourtant par le ministre des Travaux publics, tarde à se concrétiser dans les faits. C'est là autant de désagréments pour lesquels nous aurions aimé recueillir l'avis du P/apc. Malheureusement, le rendez-vous que nous a promis le chargé de la communication de l'Apc est renvoyé à chaque fois aux calendes grecques.