Constantine, comme la plupart des grandes villes d'Algérie, reste un pôle très attractif pour le commun des Algériens. Ce n'est donc pas une surprise que les prix des logements, que ce soit en location ou en propriété, prennent une pente ascendante et que l'accès à un toit reste une chimère. Et comment, quand on sait qu'un logement évolutif à « l'état brut » coûte la bagatelle de 800 000 DA au minimum et que pour la location vous ne l'aurez jamais à moins de 5000 DA. Même les appartements situés dans des cités où il ne fait pas bon vivre sont inaccessibles, à l'image d'un simple F4 à la cité Daksi qui se négocie entre 4 et 5 millions de dinars. « C'est vrai que ces prix semblent, a priori, très élevés. Mais, croyez-moi, tout cela répond à une très forte demande, surtout en ce qui concerne les étages inférieurs fortement prisés par les professions libérales », nous dira le propriétaire d'une agence immobilière. Ces prix s'expliquent aussi par la rareté, sinon l'absence totale de projet de construction au sein du périmètre urbain de Constantine, ce qui fait que tout ce qui existe au chef-lieu de wilaya se négocie au prix fort. Un cas complexe Car vouloir acheter un appartement par la voie administrative relève actuellement de l'impossible. Il reste quand même la CNEP Banque qui proposait dernièrement à ses abonnés des F3 et des F4 à la mégacité de Boussouf à 2 et 2,7 millions de dinars. Des logements encore trop peu accessibles pour les bourses moyennes, surtout si l'heureux lauréat doit débourser la moitié de la somme cash, ce qui n'est pas évident. Ces mêmes logements sont depuis plusieurs années la chasse gardée des « gros » clients de la CNEP Banque qui bloquent « quelques » milliards à l'approche de la livraison des appartements qu'ils revendent au moins deux fois le prix sans y loger une seule journée. Et lors de la dernière livraison du quota de décembre, le premier lauréat avait plus de... 4 millions de dinars d'intérêts sur son carnet. C'est vous dire que même si vous êtes d'accord pour vous endetter à vie avec la CNEP Banque, avec des taux d'intérêts qui vous feront payer à échéance le double, il n'est pas évident de décrocher le sésame pour le logement. Il y a aussi les appartements bâtis lors de la colonisation, mais qui coûtent parfois plus chers qu'une villa. Cela va de 2,5 millions de dinars pour un F3 à l'immeuble Picasso, à plus de 10 millions de dinars pour un F5 au Coudiat ou à la rue Abane Ramdane. Il reste au « pôvre » Constantinois la possibilité d'acquérir un lot de terrain qui peut se négocier entre 3500 DA le mètre carré et...100 000 DA ! Mais dans les deux cas, bâtir par la suite relève du parcours du combattant tant les entraves administratives et les prix exorbitants des matériaux de construction et de la main-d'œuvre restent hors de prix. Du côté des entrepreneurs, ce n'est pas la joie, non plus. Entre l'élaboration d'un dossier, l'attente et la concrétisation du projet, plusieurs d'entre eux abandonnent en cours de route. « Le jour où je postule pour un marché est le début du cauchemar pour moi, nous dira un entrepreneur qui a trente ans de métier entre les mains. Cela commence par la constitution du dossier qui reste un lourd fardeau. Après le dépôt, il faut faire intervenir toutes les connaissances, surtout si au passage vous avez décroché le marché et qu'il vous faut le fameux permis de lotir délivré par l'APC à grands coups de... corruption à peine déguisée. Des fois, on est même obligé d'offrir un, voire plusieurs lots de terrain ou appartements pour pouvoir entamer les travaux. A la fin, et si c'est un marché public, vous ne serez payés qu'après plusieurs mois. Et à cause de cette pratique du secteur public, j'ai failli mettre la clé sous le paillasson à trois reprises. » La problématique du logement à Constantine n'a pas donc varié d'un iota depuis des lustres, car aussi bien pour le demandeur que pour le promoteur, Constantine reste un cas très complexe sur lequel plusieurs walis ont buté, et le Rhumel ne cessera pas de sitôt de gémir des poids de la démographie, en constante évolution, et « des logements pour tous ». Sauf à ceux qui en ont vraiment besoin.