La couleur des prochaines élections générales, prévues en 2007, a été annoncée prématurément. L'auteur : Abdelaziz Belkhadem. En effet, le secrétaire général du FLN s'en est pris, jeudi 2 juin, avec des mots à peine voilés, à la formation dirigée par l'actuel chef du gouvernement, Ahmed Ouyahia. Présidant une conférence des élus de la région Centre à Zéralda (Alger), le chef en second du vieux parti a lancé des fléchettes empoisonnées, sinon des mises en garde à l'endroit des autres partis de l'Alliance. « Nous disons toujours oui à l'Alliance présidentielle, mais il faut qu'elle s'inscrive dans un cadre défini pour qu'il n'y ait pas de compétition déloyale à travers des pratiques et des procédés malhonnêtes qui transgressent les règles du jeu démocratique », a-t-il souligné. Allusion faite beaucoup plus au RND - son sérieux rival qui compte retrouver son hégémonie de 1997 à la faveur des prochaines élections - qu'au MSP affaibli depuis qu'il est au gouvernement. Cette déclaration de Belkhadem n'est en fait qu'un prélude à un chapelet d'avertissements adressés à qui veut entendre. « Nous allons barrer la route à ceux qui abusent de leur autorité pour nuire au FLN en usant de procédés et de moyens illégaux. Nous refusons l'utilisation des postes au pouvoir comme strapontins, pour atteindre des fins personnelles, familiales ou régionalistes », a-t-il martelé, avant de lâcher le gros morceau : « la campagne pour les doubles élections législatives et locales de 2007 a commencé. » Il a donné, à l'occasion, des consignes et des instructions aux élus de son parti. Il leur a rappelé la nécessité de « redoubler de vigilance », d'« être plus attractif », de « faire du porte-à-porte », d'« aller dans les villages », d' « approcher le maximum de gens, de femmes et de jeunes », de « convaincre les intellectuels de rejoindre les rangs du parti » et d'être surtout « à l'offensive ». « Vous êtes la vitrine du parti », a-t-il enchaîné, avant de les exhorter à rester « fidèles à vos électeurs » et « propres ». Belkhadem a déclaré également que la direction du parti prendra les mesures nécessaires allant jusqu'à exclure du FLN les élus s'étant alliés à des formations concurrentes contre leur parti. « Il n'y a pas de place dans notre parti pour des militants saisonniers », a-t-il attesté. Il a ensuite appelé les élus à multiplier leurs efforts afin de concrétiser le programme du parti et celui du chef de l'Etat qui est également président du FLN. « Nous ne sommes pas seulement la locomotive de la réconciliation nationale et de l'amnistie générale, mais nous sommes ceux qui l'ont mise en marche. Nous devrions faire tout pour réussir ce projet », a-t-il insisté. C'est la priorité du FLN. « Les délestés » Les rapporteurs des commissions des élus, étant intervenus bien avant Belkhadem, ont axé l'essentiel de leurs rapports - remis ensuite écrits à l'instance exécutive du parti - sur leur « dénuement » de toute protection et donc leur incapacité d'agir pour honorer leur engagement face à l'administration centrale qui contrôle tout. « Le pouvoir central nous a délestés de nos prérogatives », déclarent des élus. Belkhadem les a, juste après, rassurés : « la direction est avec vous, à condition que vous soyez corrects et honnêtes. » Il a appelé ainsi à réhabiliter l'élu en tant que représentant légitime du peuple. « Si l'on veut restituer le pouvoir au peuple, il faut réhabiliter l'élu à tous les niveaux et lui donner suffisamment de prérogatives afin qu'il puisse accomplir sa mission et répondre aux aspirations des citoyens », a-t-il clamé, tout en indiquant que son parti va militer pour cela à travers sa majorité au Parlement. « Nous allons clarifier les choses avec le ministre de l'Intérieur pour qu'on sache où commencent les prérogatives des élus et où elles se terminent », a-t-il promis. Rappelant que le pouvoir politique appartient au FLN avec une majorité partout, Belkhadem, également ministre d'Etat, a précisé que son parti usera de son pouvoir pour contrer tout code communal ou de wilaya allant dans le sens contraire à la volonté des élus. Il les a invités à cet effet à réfléchir d'ores et déjà sur cette question. Sans trop s'éloigner de la guéguerre existant entre son parti et celui d'Ouyahia, Belkhadem a exprimé le refus de sa formation de la campagne « Mains propres », entamée il y a quelques semaines. Mais, « nous demandons l'application de la loi à tout le monde ». Critique adressée directement au chef du gouvernement, connu pour être derrière la première campagne « Mains propres » en Algérie dont beaucoup de cadres supérieurs de l'Etat, innocents, avaient payé pour d'autres. La sortie de Belkhadem, jeudi dernier, n'est pas la seule, car d'autres conférences régionales des élus ont été animées par de hauts cadres du parti dans différentes wilayas. Une conférence nationale des élus se tiendra dans les jours à venir.