Square Port Saïd, Alger. Sous les arcades, Hakim, 33 ans, compte et recompte les billets en liasses, le regard circulaire. « L'euro est en baisse. Je le vend à 11,50 (100 euros pour 11 500 dinars) et je l'achète à 11,35 (11 350 dinars pour 100 euros) », dit-il tout en maniant des doigts le gros paquet de billets. Une fourchette représentative des tendances du marché informel au centre-ville. La bourse parallèle d'Alger accuse une baisse de la monnaie européenne et un léger réveil du dollar. Les 100 dollars coûtent sous les arcades du square 9350 dinars à la vente, et 9300 dinars à l'achat. Il y a un mois, les 100 dollars étaient cotés en moyenne à 9000 dinars à l'achat et à la vente. Alors que les 100 euros pouvaient plafonner à 11 800 dinars. Les nombreux agents de changes clandestins confirment la baisse estivale de la monnaie européenne. Le cours officiel de la Banque d'Algérie donne 100 euros à 9008 dinars à l'achat et à 9561 dinars à la vente. Alors que 100 dollars sont cotés à 7311 dinars à l'achat et 7758 à la vente. Les liquidités européennes ramenées dans les bagages des immigrés en vacances en Algérie seraient un facteur déterminant de cette baisse. « Il y a beaucoup d'euros en circulation, les cours chutent automatiquement », explique un agent itinérant qui travaille sur rendez-vous avec des commerçants et des hommes d'affaires dans l'Algérois. Il évoque également le contexte européen et mondial qui a connu une chute de la devise européenne au profit d'une légère hausse du dollar US. Ce dernier est peu échangé dans les marchés d'Alger. « Sauf pour les commerçants qui vont en Chine et qui certainement vont profiter de cette aubaine », ajoute l'agent itinérant pressé de partir pour un rendez-vous sur les hauteurs d'Alger. Hakim, pour sa part, trouve que le marché reste au ralenti et le square Port Saïd perd peu à peu son rôle central de bourse parallèle. « Tout le monde vend aujourd'hui et partout. A Chéraga, Bab El Oued, Rouiba, etc. Il suffit d'avoir un magasin, même pas une arrière-boutique, pour faire dans les devises », ajoute-il. Il est là depuis une année. « J'ai quitté mon emploi dans une usine de production de lait parce que le salaire était misérable et je n'étais même pas déclaré », raconte Hakim. Ses bénéfices au square sont aussi aléatoires que les cours et la demande. « Il arrive que des jeunes d'ici échangent jusqu'à 100 000 euros en un coup. Mais c'est rare », dit-il. Son voisin, sous l'ombre d'une arcade, confirme ses dires et pense que les étrangers de plus en plus visibles dans les rues de la ville vont booster ses entrées d'argent malgré la baisse de l'euro. « L'Etat doit ouvrir des bureaux de change. C'est incontournable. Il n'est pas aisé de travailler de cette manière dans la rue. En plus, l'Etat ne gagne rien ici », regrette Hakim, qui affirme que les agressions sont assez rares. « Les gens se connaissent ici. Les agresseurs, les policiers, les gens qui vendent et achètent », relève-t-il.