La visite avortée d'Ouyahia à Rabat n'est qu'une des multiples péripéties de l'impasse diplomatique dans laquelle se trouvent l'Algérie et le Maroc. Depuis 1975, année de la marche verte qui a donné le feu vert au projet colonial de la monarchie alaouite, le conflit du Sahara-Occidental n'arrête pas d'alimenter la tension, souvent à travers des épisodes inquiétants. En 1976, un convoi humanitaire d'appelés algériens du service national a été bombardé à Amgala et du sang a coulé dans des heurts opposant les armées des deux pays. A intervalles réguliers, ressort l'insensé projet marocain de « récupération » d'une partie du territoire algérien, à l'origine déjà de la « guerre des sables » de 1963, qui avait vu les FAR envahir l'Algérie, alors exsangue, sortant juste de sa longue guerre de Libération contre l'occupant français. C'est le « Grand Maroc », ce rêve colonial qui ne veut pas s'arrêter au seul territoire du Sahara-Occidental et qui cherche à devenir réalité sur le dos de l'Algérie. Longtemps, les yeux du Palais royal se sont fermés lorsque les terroristes du GIA, opérant à la frontière algéro-marocaine, avaient trouvé refuge sur le sol de la monarchie. Les semeurs de mort, le Maroc les voit depuis sévir sur son propre sol. Aujourd'hui, personne ne croit à la « spontanéité » des rassemblements de Marocains devant des consulats algériens en Europe, particulièrement en Espagne. Derrière eux, il y a bel et bien la main du « makhzen » marocain. L'objectif est double : duper l'opinion publique internationale sur la nature de la question sahraouie et attiser la tension entre l'Algérie et la Maroc afin de détourner l'attention du peuple marocain des graves difficultés dans lesquelles se débat son pays. Comment désamorcer la colère sociale et freiner la désaffection populaire à l'égard du Palais royal si ce n'est en pointant du doigt « l'ennemi potentiel » qu'est l'Algérie ? C'est cette stratégie de la tension et du pire qui a été choisie, dont une des conséquences ne peut être que la guerre. Est-ce cette dramatique issue que cherchent les dirigeants marocains ? Il existe pourtant une autre, tout à l'opposé et que préconise la communauté internationale : amorcer un processus de décolonisation du territoire sahraoui. C'est la voie de la sagesse, car elle ouvre la porte à la fin du calvaire imposé aux Sahraouis depuis 1975, en même temps qu'elle permet la normalisation des rapports avec l'Algérie. Dans la lancée, tous les peuples de la région profiteront à travers l'édification d'un grand Maghreb sur des bases saines et durables.