La quatrième édition de Scène'DZlive s'est terminée jeudi dernier à la salle Ibn Zeydoun après quatre soirées concerts sur autant de genres de musique. Le gnawi en pleine expansion a clôturé les essais en plein public avec les groupes Djmawi Africa, Harmonica, le très roots Diwane Dzaïr et une apparition en solo de Faïz du groupe Index. Nu sur scène, la guitare en cache-sexe, ce dernier a soutenu la cadence honorable qu'il a collectionnée depuis ses débuts en groupe. Deux compositions à peine en guise d'apéritif, l'une bien rôdée, avec des Allah Allah ! et Sidna sidna !, thèmes récurrents du répertoire gnawi plus pour leur portée rythmique qu'en raison de leur contenu propre. Le deuxième morceau, inédit, s'est trouvé dans une évocation succincte des héros de l'antiquité berbère. Faïz lâche l'assistance pour laisser place à une formation massive. Harmonica, deuxième apparition de la soirée, pèse six musiciens, vents, rythmes, basses et guitares mêlés. L'assemblée serait presque parfaite, n'était un acharnement rythmique basé sur une sonorisation qui avait la tête ailleurs ce soir-là. Des jeunes de 18 à 28 ans chantent et regrettent leurs 20 ans et les « yammat » (journées) de jeunesse, répertoire anachronique qui aurait plus été du ressort des cheikhs du chaâbi. Le banjo Hammam Hmidou, archaïque en rythmique, est séduisant quand les choses se calment sur scène. Sur l'istikhbar, il se montre mélodique, serein, avant que la formation au complet n'entame une entrée fracassante et pour ainsi dire inattendue. Harmonica négocie un virage en catastrophe et va du chaâbi à une sauce Manu Chao non dénuée d'intérêt, n'était le caractère déjà entendu de la partition. La troupe use d'une dernière corde pour coller sa composition sur un plaqué country. Le groupe Djmawi Africa en troisième partie fait des étincelles. Un : en raison du charisme vocal de son chanteur, Djamil Ghouli à la guitare. Deux : grâce à l'amour de la musique partagé et célébré par la troupe, une dizaine de musiciens interprètes. Le public n'y est pas indifférent, le résultat en est un entassement au pied de la scène traversé de réminiscences de slams de hard rockers passés quelques jours auparavant. Le groupe sort ses propres compositions. Inconnu chez les disquaires, il montre plutôt une fraîcheur de jeunes premiers. Dans Zawali, titre imparable pour s'acheter une popularité dans la jonction des revenus non déclarés et du Snmg à 10 000 DA, la grille progresse comme sur les rails d'un chemin de fer. Ellil touil (la nuit est longue) baigne dans une partition bluesy. Le reste est une reprise des titres phares des dernières années dans le répertoire gnawi et musiques traditionnelles du Maghreb qui ont pris leurs marques à partir de la rive nord de la méditerranée, terre de substitution. Quatrième et dernière partie de la soirée. Le temps s'arrête. Trois musiciens : un karkabou, une derbouka du Sud et un gumbri d'origine. Diwan Dzaïr fait son entrée, joue « sa » musique. Les arrangements n'ont plus cours. Le jeu se fait brut. Sur les cordes d'un gumbri du fond des temps et la peau génétiquement intacte d'une chèvre du millésime. Les frères Behas et l'acolyte Salim Khiat gardent une contenance séculaire et évitent la fioriture. Benaïssa tient son gumbri comme le dernier interprète du genre. Le visage en feu, fouetté d'un sourire aveugle et abyssal, il termine la soirée sur des marmonnements indéchiffrables, pendant que, derrière, la fête, celle des gens du Nord, foule le sacré de l'instant.