On aime bien les patronages. ça procure chez les adeptes d'un tel rite une espèce de jouissance intérieure, un sentiment de bonheur indicible qui les élève au-dessus du commun des mortels. Ils sont nombreux à en faire un usage plus qu'abusif. C'est un état d'esprit qu'il faut accepter et comprendre. Le ministère de la Culture, bien évidemment, ne veut pas être à la traîne. Il chapeaute et patronne à tour de bras. Le premier festival du théâtre en Méditerranée est placé sous sa vénérable coupe. On proposait, en soirée et dans le cadre de cet événement culturel, Britannicus, une pièce de Jean Racine. L'annonce est faite par le biais d'un affichage plutôt discret et parcimonieux. Mais ce n'est pas là le seul handicap. Le spectacle se déroulait à Sidi Fredj. Un beau trajet nocturne qui dissuade bien des amoureux du théâtre et qui, plus est, ne roulent pas sur l'or. Loin s'en faut. Ajoutons à cela le prix des places, excessivement cher : 700, 1000, 2000 et 2500 DA. Un coup de massue à refroidir dans la minute qui suit le plus ardent des spectateurs. Il me semble que, avec de telles lacunes, le festival ne sera pas uniquement itinérant, mais très certainement fantomatique, furtif et invisible. Dans une cité qui souffre beaucoup du manque d'activités culturelles, s'entêter à ne plus tenir compte de la tarification, de l'accès rapide et commode aux spectacles, c'est persister à aiguiser les frustrations, les envies et les désirs inassouvis. Décidément, il manquera toujours quelques centimes pour faire un dinar. Et à ce rythme-là, nul doute que les troupes qui seront appelées à se produire dans le cadre de ce festival joueront devant des gradins vides, des salles plus que clairsemées, des théâtres atrocement déserts. Et je ne le souhaite vraiment pas. Un petit geste ne va pas ruiner les organisateurs du festival. Plus on est nombreux, et mieux on en profite.