L'affaire de près de 200 milliards de centimes de créances de l'Entreprise nationale des corps gras (ENCG) de Maghnia (huile et savon) est toujours d'actualité. Et même si plusieurs personnes ont été mises en détention dont l'ex-Pdg, le directeur financier, un expert et un client, les observateurs estiment que la base de ce scandale n'a pas encore été explorée, en ce sens que l'origine de cette hérésie financière, ce sont les détournements, les faux en écriture et les conventions de complaisance. Stratégie, diversion ou complication du dossier ? Toujours est-il, beaucoup de zones d'ombre continuent d'entourer ces scabreuses transactions qui menacent aujourd'hui l'avenir d'une entreprise, naguère florissante, et la liberté de personnes liées directement ou indirectement à cette affaire. L'instruction suit toujours son cours au tribunal de Maghnia, mais ceux qui suivent ce dossier épineux ne s'empêchent pas de s'interroger : « Nous avons l'impression qu'on s'intéresse plus aux clients, qui ne sont pas tous au-dessus de tout soupçon, qu'aux véritables responsables à l'origine de l'accumulation de ces dettes étouffantes. Honnêtement, qui approuvait les conventions basées sur des hypothèques et des garanties imaginaires ? Qui autorisait l'enlèvement des produits à des prête-noms ? C'est quand même curieux d'avoir continué à approvisionner à crédit des clients qui n'avaient pas encore honoré leurs créances. Cela a été fait. Qui en est responsable ? Autant de questions qui méritent des réponses. Aujourd'hui, selon des avocats, on a le sentiment qu'on est en train de chercher la vérité sur les berges de la rivière, alors que la vérité ne peut se trouver qu'au fond, et le fond, on ne l'a pas encore atteint. Est-ce qu'il est trop profond ou n'ose-t-on pas y aller ? Pourtant, tout est clair. » Une clarté pas évidente pour tous... Des familles de détenus continuent de clamer l'innocence de leurs proches : « Pourquoi n'a-t-on pas arrêté le massacre au début, quand tout le monde se servait ? A l'époque, tout était permis. Aujourd'hui, on trouve que les garanties et les hypothèques n'ont aucune valeur. Des pères de famille sont en prison et on cherche à en mettre d'autres parce qu'à un moment donné, ils ont établi des contrats avec l'entreprise. Est-ce possible que tous ceux qui avaient signé un contrat avec l'ENCG soient suspects ? Jusqu'à preuve du contraire, est présumée innocente toute personne qui n'a pas été reconnue coupable, et la justice est tenue de respecter cette loi. » Nos interlocuteurs parlent aussi de détention préventive abusive : « Pour l'objet de l'instruction, des personnes sont écrouées et on ne sait pas combien durera l'instruction. Entre temps, elles croupissent toujours en prison. Et les droits de l'homme dans tout cela ? » En attendant, l'ENCG tente de survivre, avec l'épée de Damoclès sur ses cheminées : la privatisation...