La presse égyptienne a une longue histoire. Depuis 1860, existe une presse au pays des pharaons. Car s'il est établi que les Egyptiens ont le verbe facile, leur plume l'est tout autant. Et ce n'est sûrement pas par hasard que l'Egypte a toujours été « la Mecque » des intellectuels et des écrivains en langue arabe. La presse en Egypte se confond avec le mythique El Ahram, diffusé et apprécié aussi bien en Egypte que dans les autres pays arabes. El Ahram, ce sont 4 millions d'exemplaires tirés quotidiennement sur les rotatives de l'Etat, un tirage record qui le place dans le top ten aussi bien au Moyen-Orient que dans le monde. Son légendaire directeur de la publication Hassen Haïkel a fait des émules et son ombre plane toujours sur l'immeuble cossu qui abrite le siège du journal sur l'avenue Ramsès. En seconde position, mais loin derrière, on retrouve le quotidien El Gomhoria, qui tire à 200 000 exemplaires/jour. Malheureusement, malgré les compétences en son sein, la presse égyptienne n'arrive pas à passer la vitesse supérieure du fait de son aliénation totale au Pouvoir en place. Les cinq quotidiens qui composent le paysage médiatique égyptien sont tous publics. La presse indépendante, ce n'est pas pour demain même s'il existe deux journaux d'opinion - Wafd et El Ahrar - qui ne marchent jamais sur les plates-bandes du parti au pouvoir, El Hizb El Watany, le PND. Et si l'Egyptien ne trouve pas ce qu'il cherche en politique dans ces cinq quotidiens, il lui restera à se divertir avec les... 900 titres spécialisés, hebdos pour la plupart, essentiellement une presse people à l'anglaise, et 22 mensuels régionaux. Avec ses 40 000 exemplaires tirés chaque semaine, Ouyoune est un hebdo à tirage moyen qui traite des faits de société, de sport et de cinéma. Son président du conseil d'administration et directeur de rédaction Ahmed Fadel totalise 46 années dans le métier et ne cache pas son admiration pour la presse algérienne qui reste « un exemple de compétence et de maturité pour le monde arabe ». « Je suis conscient que la presse égyptienne n'est pas totalement libre, comme je reste convaincu qu'elle le sera bientôt. Le multipartisme est encore à l'état embryonnaire chez nous et ce n'est qu'avec son développement que la presse suivra. Cinq quotidiens, c'est peu, mais l'Egyptien, très porté sur le sport et les potins mondains, se gargarise avec les centaines d'hebdos spécialisés », fera-t-il remarquer. « Aujourd'hui, on prépare l'élection présidentielle de septembre, mais le résultat est connu d'avance (cinquième réélection de Hosni Moubarak : ndlr). Les partis dits d'opposition existent, mais ils ne sont libres d'activer et de critiquer le Pouvoir qu'intra-muros. Autrement, ce serait une atteinte au Pouvoir, un crime de lèse-majesté », nous dira Ahmed Fadel. Des propos très courageux, surtout si l'on sait que le vice-président du conseil d'administration et directeur de publication de l'hebdo est un... colonel de l'armée égyptienne encore en activité et qu'il n'avait pas apprécié les propos de son directeur de rédaction même si, en notre présence, il ne lui a été fait aucun grief.