A Amman, les experts algériens du renseignement, aidés par les éléments des services de pays amis, travaillent d'arrache-pied depuis jeudi soir pour retrouver Ali Belaroussi et Azzedine Belkadi, les deux fonctionnaires du ministère des Affaires étrangères, enlevés le 21 juillet 2005 à Baghdad par le groupe du chef d'Al Qaîda en Irak, Abou Moussab Al Zarqaoui. La diffusion, hier sur internet, par les kidnappeurs d'un enregistrement vidéo montrant les deux otages a eu pour effet de renforcer leur sentiment quant à la possibilité de récupérer les diplomates sains et saufs. Ce sentiment est de mise même si l'enregistrement vidéo a été précédé d'une condamnation à mort de Ali Belaroussi et de Azzedine Belkadi. Ne tenant aucunement compte des lectures pessimistes qui ont suivi la diffusion du communiqué du groupe de Zarqaoui annonçant la condamnation à mort des deux diplomates par un « tribunal islamique », les experts algériens se satisfont de savoir que les deux otages sont vivants. « Tout est possible maintenant que nous savons qu'ils sont vivants », a confié une source proche du dossier. Ali Belaroussi et Azzedine Belkadi ont été montrés les yeux bandés. Au cours de l'enregistrement, de moins d'une minute, ils ont fourni leur identité, leur âge, leur fonction et leur adresse en Algérie. Les deux otages n'ont pas donné d'indications supplémentaires. En revanche, ils semblaient physiquement en bonne santé et parlaient d'une voix sûre. Evoquant l'importance des efforts déployés pour faire relâcher Ali Belaroussi et Azzedine Belkadi, Abdelaziz Belkhadem, le représentant personnel du Président Bouteflika, a affirmé que le gouvernement a mis en œuvre « tous les moyens pour récupérer sains et saufs » les deux diplomates. « Le gouvernement algérien tente toutes les possibilités et utilise toutes les pistes pour faire la lumière sur cette affaire et les libérer sains et saufs », a indiqué l'ancien ministre des Affaires étrangères, hier, à la radio nationale. Faisant état de « contacts avec le gouvernement irakien » et évoquant une « sensibilisation des chefs des tribus », M. Belkhadem a précisé que ces contacts ne se limitaient pas « aux canaux diplomatiques ». « Nous explorons chaque piste qui pourrait nous amener à les faire revenir chez eux », a-t-il dit. A une question sur les motivations des auteurs de l'enlèvement, M. Belkhadem a souligné que « la qualité des relations qui ont toujours existé entre les peuples irakien et algérien fait que rien n'explique cet enlèvement et rien n'expliquerait qu'on puisse intenter à leur vie ». « Le peuple algérien a toujours soutenu le peuple irakien dans son unité, dans son intégrité territoriale et sa souveraineté sur son pays », a-t-il ajouté, avant d'exprimer le souhait que « les appels faits par le peuple algérien puissent aider à ramener les deux diplomates à leurs familles ». Des sources autorisées, citées par l'APS durant la même journée, ont souligné le fait aussi que « tout est mis en œuvre H/24 pour obtenir des informations sur le sort des deux otages et que l'Etat assume pleinement ses devoirs à travers tous ses canaux pour obtenir leur libération dans les délais les plus courts possible ». Conscients de la nécessité d'agir vite, les experts algériens ont ainsi engagé une véritable course contre la montre pour analyser la masse impressionnante d'informations recueillies sur le terrain, exploiter les différentes pistes possibles et rentabiliser les contacts établis depuis leur arrivée dans la capitale jordanienne. L'espoir de faire libérer les deux diplomates reste permis d'autant que les représentants des chefs des principales tribus irakiennes - qui ont condamné fermement le rapt - ont pris l'initiative, durant la journée d'hier, de faire le déplacement à Amman pour apporter leur aide et soutien à l'équipe dépêchée sur place, il y a sept jours. Inédit, le geste des tribus irakiennes, avec lesquelles le gouvernement algérien a toujours entretenu des contacts fraternels, peut avoir une importance capitale pour parvenir à démêler cette affaire de kidnapping. En désavouant sans ambiguïtés le rapt, les guides des tribus irakiennes - qui ont la réputation d'avoir une grande influence au sein de la société irakienne - pourraient ainsi contraindre le groupe de Zarqaoui à faire une entorse à sa « règle », qui veut que ses otages soient exécutés, et à libérer les deux Algériens. L'hypothèse reste plausible, d'autant que Zarqaoui, qui semble, pour le moment, évoluer en Irak comme un poisson dans l'eau en raison du chaos et de la confusion ambiants, pourrait craindre d'avoir la société irakienne sur le dos. Surtout que les Irakiens portent en estime le peuple algérien qui les a soutenus dans des moments pénibles. Au moment où les opinions nationale et internationale intensifient leur mobilisation pour faire libérer Ali Belaroussi et Azzedine Belkadi et continuent de condamner leur rapt, le GSPC a publié, hier, un nouveau communiqué, dont l'authenticité n'est pas établie, à travers lequel il demande au groupe de Zarqaoui d'interroger les deux otages, en leur fournissant des « motifs » pour les exécuter. Le GSPC, qui a renouvelé son allégeance à l'organisation terroriste Al Qaîda au début de la semaine et qui s'est « félicité » de leur enlèvement, présente les diplomates comme étant hostiles à « l'édification d'un Etat islamique » et « impliqués » dans la crise algérienne.