Aït Voutchour, petit village pittoresque de Grande Kabylie, coincé entre une tradition millénaire d'ennui et une grosse montagne à poils drus. Au moment où Nadia, la femme de Tifour, et Aljia, émigrée en vacances forcées au village, ont entrepris de s'évader pour aller à la mer, quelqu'un a tapé à la porte, se présentant comme un employé de Sonelgaz. Ce qui a étonné Nadia, les agents de la compagnie d'électricité étant aussi rares dans la région que les gazelles sahariennes à Tizi Ouzou. En ouvrant la porte avec méfiance, Aljia a découvert un jeune homme tout cabossé, plus proche du bendir usagé que de l'employé de Sonelgaz. Je suis un vacancier. Compteur ? a-t-il fait en se protégeant la tête comme si on allait le frapper. Passant de la méfiance à la compassion, Aljia a offert un café au jeune homme. C'est comme ça qu'elle et Nadia ont compris. Le jeune vacancier a été victime d'une blague des anciens de Sonelgaz division Kabylie, qui l'ont envoyé dans les villages relever les compteurs, prenant des coups à chaque passage. Y en a même un qui a voulu me délester en me coupant la tête, a-t-il avoué en pleurant. Il a dit que je consommais trop d'air. Ayant été infirmière il y a quelques années, Nadia a pansé les blessures du jeune homme. Ça te dis de nous emmener à la mer ? lui a-t-elle subitement demandé. Comment ? Avec une malle à outils, a répondu Aljia. Avec une quoi ? Une Marutti, a précisé Nadia. Le temps de ramasser les six enfants qui jouaient dehors avec des bombes lacrymogènes périmées et tout le monde s'est casé dans la Marutti. Au moment de démarrer, Anis, l'aîné des garçons de Nadia, a demandé : C'est qui ça ? a-t-il fait en désignant l'agent cabossé. C'est notre alibi. Toutes vitres ouvertes, la Marutti a fièrement dévalé les sentiers de montagne. Direction la mer. Et Papa ? Papa sera tellement ivre ce soir qu'il oubliera qu'il est marié, a répondu Nadia. A suivre