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Les familles victimes du terrorisme à M'sila
La tragédie continue
Publié dans El Watan le 23 - 08 - 2005

Les expéditions d'extermination et leur cortège d'atrocités, perpétrées durant les années 1990 par les terroristes islamistes contre les populations rurales, ne semblent pas emballer outre mesure les autorités locales pour soustraire les victimes du terrorisme de leur profonde précarité. Ces autorités locales frappées d'inertie ont fini par considérer cette catégorie de citoyens comme une tribu ou fraction de tribu, sollicitée uniquement en cas d'utilité circonstancielle, sinon pour le reste du temps, c'est l'implacable marginalisation.
Sollicitée pour la politique de la concorde civile, cette catégorie de citoyens s'est prononcée pour, sans rechigner, sans pour autant que cette caution ait produit, après coup, les effets escomptés envers les 90 familles des 115 personnes assassinées par les terroristes islamistes pour la seule commune de Medjedel. Aux yeux du chef de bureau de l'Organisation nationale des victimes du terrorisme et ayants droit (ONVTAD) de Medjedel, « la politique de la concorde civile qui a occulté les besoins incompressibles de cette catégorie de citoyens n'a été bénéfique que pour les criminels mis dans la peau de repentis, qui avec la bénédiction des autorités locales ont raflé logements et emplois. » « Sinon pour les victimes du terrorisme, a-t-il soutenu, cette politique a été une véritable honte, qui s'était résumée en tout et pour tout au méprisable contenu d'un couffin par famille à l'occasion du mois sacré du Ramadhan ». Cette appréhension de la concorde plutôt discriminatoire n'a généré que frustrations, lesquelles se sont accentuées jusqu'à devenir insoutenables. Illustrant cette discrimination, Ammar Bougaâ, chef du bureau de l'ONVTAD de Medjedel, a cité le cas du repenti de Medjedel qui, dira-t-il, « tirant profit du statut de repenti que lui a conféré la politique de la concorde, a décroché un logement et un emploi au niveau de l'APC, au moment où les victimes du terrorisme n'arrivent pas à s'inscrire sur la liste des bénéficiaires du filet social ». « Ce même repenti, a-t-il ajouté, qui ne se serait pas séparé de son arme (kalachnikov), n'avait pas manqué de faire valoir son statut et de bénéficier de la considération qui dépasse celle des 115 personnes assassinées réunies ». « Ce repenti occupe présentement le poste de travail que tenait mon père à l'APC et faisait partie du groupe terroriste qui avait procédé à l'enlèvement de mon père avant son exécution par ce même groupe en 1996 », a-t-il soutenu avec indignation. Cette discrimination apparaît au grand jour dans le cas de la famille Maâmouri, dont le père, Rabah, était la première victime qui tombait sous les balles assassines de la horde islamiste le 6 août 1993 dans la commune de Medjedel, et la première victime, à l'échelle de la wilaya de M'sila, croit-on savoir. Cet assassinat perpétré devant toute la famille a été fatal pour le jeune Maâmouri Youcef, âgé à peine de 8 ans, qui ne s'est plus remis de l'image insoutenable de son père baignant dans son sang. De par cet ignoble acte et à défaut d'une prise en charge psychologique précoce, la vie de cet enfant semble avoir basculé, en prenant une autre voie, celle des handicapés mentaux émargeant sur le registre de cette catégorie de malades, avec un taux d'incapacité de 85 %, selon le médecin psychiatre traitant. Outre la situation contraignante de cet enfant handicapé, qui n'a pas eu droit à une pension comme tout autre handicapé, la vie de cette famille depuis l'assassinat du père a basculé dans la misère avec son cortège de frustrations.
Lettre au Président
« La pension du père (10 000 DA), lit-on dans la correspondance adressée au président de la République, n'arrive pas à couvrir les besoins incompressibles d'une famille de six membres dont un handicapé », à telle enseigne, précise-t-on dans cette missive, que « cette famille a été dans l'obligation de se désister d'un logement social acquis en 2000, à cause de la cherté du loyer qui s'élevait à 3000 DA par mois ». Pour pallier cette contraignante situation, cette famille avait tablé sur un emploi pour la fille, Fatima, un emploi comme femme ménage au niveau d'une quelconque administration, l‘essentiel étant de décrocher un salaire supplémentaire pour atténuer la précarité de cette famille. C'était compter sans l'implacable mépris des autorités locales envers cette catégorie de citoyens, et également d'autres organismes, à l'image de la CNAS, qui n'a pas daigné répondre à cette jeune fille en dépit de l'existence du poste, croit-on savoir. On a l'impression que tout le monde s'est ligué contre les familles victimes du terrorisme, à l'image de victimes du massacre de Louibda dont l'atrocité, l'intensité et l'horreur étaient identiques aux massacres de Bentalha et de Raïs. Massacre où 43 personnes (25 hommes et 18 femmes) ont été égorgées et 4 jeunes filles enlevées et qui n'en finit par d'être occulté par les autorités locales ne s'embarrassant pas du devenir des familles victimes de ce massacre. Pis encore, ces familles, exclues des avantages qui leur étaient destinés, ont été contraintes à l'exil et résident pour la plupart à Diar Chioukh, dans la wilaya de Djelfa. On reste sidéré face à cette accumulation de mépris envers cette catégorie de citoyens, dont plus de 40 enfants sont orphelins de père et de mère et portent en eux les stigmates des horreurs du massacre. Les séquelles des atrocités sont à chaque fois ravivées par l'indifférence ambiante qui les entoure, et rien ne semble faire infléchir la volonté des autorités à occulter leur existence. Cette situation est rendue plus incompréhensible et plus grave quant à la marginalisation délibérée des familles victimes du terrorisme, quand l'ONVTAD ne souffle mot et applaudit à tout rompre lorsque le Pouvoir accouche dans ses fantasmes quelque chose qui réhabilite le terroriste, absout les crimes des bourreaux du père de Youcef et les violences des filles de Louibda.


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