Ouvert au partenariat et aux importations avec un marché en roue libre depuis le début des années 2000, l'industrie pharmaceutique algérienne pourrait, avec l'entrée en vigueur de l'accord d'association avec l'Union européenne, se retrouver prochainement ballottée par des importations dont le volume global a sensiblement augmenté à partir de 2004. Que ce soit les antihypertenseurs, antireflux gastro-œsophagien, neuroleptiques, anti-infectieux, antirhumatismaux..., qu'ils soient en préceptes ou en génériques, ces médicaments produits en Algérie sont également acquis auprès de laboratoires occidentaux dont plus de 70% sont français. L'importance du marché algérien a imposé à ces laboratoires de déployer des efforts pour consolider leurs positions. Déjà frileux en matière d'investissement malgré le cahier des charges qu'ils ont approuvé, ces laboratoires se sont rétractés. La mise en route de l'accord d'association les en a définitivement dissuadés pour se verser uniquement dans le circuit de la distribution. Alors que les sources de crédit se multiplient autant que l'apparition d'opérateurs privés, Saïdal a depuis longtemps étendu ses activités, ouvert son capital, créé des sociétés mixtes en partenariat avec des professionnels nationaux et étrangers et entamé des opérations d'exportation à destination de plusieurs pays africains et arabes. Estimés à 600 millions de dollars/an jusqu'à 2002, les besoins nationaux en médicaments ont dépassé en 2004 la barre du milliard de dollars. « Il faut chercher les causes de cette augmentation des besoins dans la surfacturation et les transferts de fonds douteux », avait déclaré M. Aoun, le PDG du groupe Saïdal, lors du club de la presse organisé à Annaba en juin 2004. Il s'est par la suite confirmé que certains fournisseurs et importateurs n'étaient rien d'autres que des sociétés-écrans ou des laboratoires fictifs. La plupart ont constitué leur trésorerie en pratiquant le dépôt en consignation. Bien que largement répandue, cette formule n'empêche pas celle du paiement d'une partie des livraisons qui n'est plus une exception. « Que Saïdal soit mise sur un pied d'égalité que les laboratoires étrangers et les importateurs et nous saurons démontrer notre professionnalisme », avait affirmé le même responsable comme pour dénoncer le déséquilibre dont est victime son groupe par rapport à ses concurrents. D'où la difficile cohabitation du groupe Saïdal et des importateurs pharmaceutiques. Sans l'exprimer clairement, outre la surfacturation et l'application sans vergogne de la procédure du dumping, Saïdal reproche aux seconds de s'intéresser exclusivement aux médicaments Over The Counter « OCT ». C'est-à-dire des médicaments commercialisés le plus souvent sans ordonnance et objet du plus gros volume des importations algériennes. Selon des cadres du même groupe, laboratoires et importateurs délaisseraient les médicaments éthiques moins rentables et plus complexes concernant des maladies chroniques comme le diabète, l'asthme, le cancer ou la tuberculose. « Comment se fait-il que l'on ne s'inquiète pas de ces pénuries programmées de ce type de médicaments à l'image de l'insuline, Ventoline et autres. Le démarrage de l'unité de production d'insuline à Constantine, prévu pour 5 millions d'unités/an et un coût d'investissement de 1.148 MDA a échaudé certains dont la cupidité n'a pas de limite », affirme Faouzi M., cadre du groupe Saïdal. Ce qui donne une explication à la tendance actuelle des laboratoires et importateurs à créer des réseaux régionaux et à assurer un service de livraison régional. Concurrence Bon nombre ont ouvert des représentations, mettent en place des réseaux de délégués médicaux, sponsorisent les manifestations scientifiques et créent des programmes d'aide et de coopération avec les autorités locales et nationales. « Combien de fois notre PDG s'est-il fait remarqué par ses attaques virulentes contre ceux que l'on qualifie de mafia des médicaments en Algérie. Combien de fois, en termes à peine nuancés, a t-on dénoncé l'attitude des pouvoirs publics algériens taxés de laxisme et de favoritisme en faveur des laboratoires étrangers. Ces dénonciations sont restées sans impact sur le marché national. Au même moment, la concurrence s'est intensifiée sous la pression d'une importation massive de médicaments étrangers », estime notre même interlocuteur. Bon nombre d'opérateurs économiques intervenant dans le circuit de la production des médicaments, à l'image de Solupharm, ont, à maintes reprises, pointé un doigt accusateur vers le gouvernement. « Quelle suite a été donnée par les pouvoirs publics à la dénonciation d'un ministre qui aurait favorisé un laboratoire étranger sur un marché portant fourniture de médicaments. En contrepartie, ce ministre s'est retrouvé avec sa clinique totalement équipée avec du matériel et des équipements de dernière génération. C'est votre journal qui a communiqué cette information restée sans suite », considère Faouzi M. Rappelons qu'au lendemain de sa prise de fonctions, Amar Tou, désigné ministre de la Santé, a découvert qu'une douzaine de dossiers de projet d'investissement dans la production des produits pharmaceutiques avaient été bloqués par son prédécesseur. Nul de ses proches collaborateurs n'avait pu fournir une quelconque réponse sur cette anomalie tout autant que sur celle d'une dizaine d'autorisations de mise sur le marché également bloquées. Bien qu'ils n'aient pas encore planifié une délocalisation pour s'implanter en Algérie, permettant de fait la réduction des coûts de production et pouvant servir de base à l'exportation, les laboratoires étrangers multiplient les opérations de charme. Elles sont destinées aux pharmaciens et officines algériens. D'où les coûts de certains médicaments très loin des bourses modestes.