Le Président n'a jamais parlé d'amnistie générale », a déclaré Ahmed Ouyahia, chef du gouvernement, à l'hebdomadaire français Le Point du 6 octobre, répondant à la journaliste qui estimait que « certains Algériens ne sont pas allés voter, refusant l'amnistie des meurtriers ». « La charte prévoit qu'une loi va instaurer un mécanisme pour les redditions : les services de sécurité remettront ceux qui se rendront à une juridiction. Mais les islamistes partis à l'étranger en 1992, et qui n'ont donc pas commis de crime de sang, doivent être amnistiés », a-t-il ajouté. Ouyahia a précisé que « parmi les dizaines de milliers qui ont été jugés et condamnés, certains seront graciés ; d'autres verront leur peine commuée. Il y avait 21 000 personnes dans le maquis en 1994-1995, il en reste un millier ». Abordant le contexte économique algérien marqué notamment par l'accord d'association avec l'Union européenne (UE) et les discussions autour de l'adhésion à l'Organisation mondiale du commerce (OMC), le chef du gouvernement a indiqué que « le cap de l'économie libérale est irréversible ». « L'ouverture économique avec l'Europe dans sa partie non agricole est bénéfique pour l'Algérie, malgré un passage douloureux qui risque de nous faire perdre 500 000 emplois. Le plus difficile sera quand nous arriverons à l'abolition des droits de douanes dans l'agriculture », a nuancé Ouyahia. Et la manne financière du pétrole ? « Notre premier souci est de ne pas nous endetter, mais nous ne gérons pas chichement. L'Etat va investir 55 milliards de dollars, plus 5 milliards pour le Sud et les Hauts-Plateaux, d'ici à 2009 », a dit Ouyahia qui a prévenu que « la situation est factice », évoquant les soubresauts du marché pétrolier. « En 2004, nous avons vendu, hors hydrocarbures, pour 780 millions de dollars et avons importé pour 18 milliards. Si le cours du pétrole s'effondre et que dans trente ans nous n'en avons plus, ce sera l'Ethiopie ! D'où notre volontarisme pour soutenir l'agriculture et l'industrie », a appuyé Ouyahia. « Exporter 10 milliards de dollars hors hydrocarbures va nous demander dix ans », a-t-il estimé. La signature du traité d'amitié entre Paris et Alger reste-t-il d'actualité après les déclarations du Président Bouteflika conditionnant cette signature par la reconnaissance des « torts » de l'ancien colonisateur ? « Nous désirons cet accord et la turpitude de la loi votée le 23 février [consacrant l'aspect bénéfique du colonialisme] ne s'inscrit pas dans le sens de ce que voulaient les deux pouvoirs exécutifs », a déclaré Ouyahia, assurant que les rapports avec la France « sont des meilleurs ». « L'Algérie pense que, pour passer à une étape supérieure, il faut tourner la page du passé. Il existe entre nous suffisamment d'intelligence politique et de savoir-faire diplomatique pour trouver une solution », a dit le chef du gouvernement. « Le colonialisme est un fléau mondial qui a laissé des lézardes profondes. Et Chirac a dit des choses à Madagascar sur les événements de 1947. Nous n'avons pas le désir de gêner les autorités françaises, mais il faut admettre le passé, et il y aura du côté algérien une réponse digne », a conclu Ahmed Ouyahia.