Assia rêve d'une vie facile, mais pas trop. Assia veut se marier, mais un peu. Assia aime la vie, mais préfère une bonne série télé. Assia pense à l'avenir, mais les week-ends, adore les fêtes, mais surtout quand c'est la sienne. Assia est musulmane, mais par habitude, Algérienne par accident. Assia a 28 ans, est jolie comme un bouquet de printemps, mais changeante comme un nuage d'automne, chaude comme un sirocco d'été, mais souvent aussi froide qu'un vent d'hiver. Car le véritable problème d'Assia est qu'elle cuisine le doute comme un boulanger pétrit de la farine ou un PCO torture du suspect. Si Assia sait, elle sait surtout qu'elle ne sait rien, si Assia a tout appris, elle sait qu'elle a encore trop de choses à apprendre. Assia est en proie au doute depuis de nombreuses années, plus exactement depuis le jour où, préadolescente sous la douche, s'est demandée si elle était garçon ou fille, adulte ou enfant, homme ou animal, citoyenne du monde ou localement locale. Assia a grandi depuis, mais le doute est resté : faut-il voter ou non ? Faut-il partir ou rester ? C'est pour toutes ces raisons mais pas seulement que Assia, pour ce Ramadhan, a décidé d'en finir avec le doute, une fois pour toutes. Assia le sent mais pas trop, si le Ramadhan a commencé avec le doute et finit dans la même incertitude puisque la lune refuse toujours d'être divisée par un nombre entier, il n'est plus possible de vivre ainsi, même pour une lune. Pourtant, au dixième jour du Ramadhan, au moment de se suicider, Assia a eu un doute. Et si le suicide ne réglait rien ? Et s'il n'y avait rien après la mort que la mort vraiment morte ? Et si la mort n'était qu'une vague (re)naissance réincarnée dans la peau d'une femme au foyer à Tidjelabine ? C'est en proie au doute que Assia n'est pas morte et que Assia est allée finir sa chorba sans rien dire.