Longtemps considéré comme un lieu plus ou moins épargné par la délinquance, le centre de la capitale est en train de connaître, ces jours-ci, un banditisme effarant. Les actes de violence, d'une rare brutalité, se multiplient sans que les agents de sécurité aient la possibilité d'y mettre un terme. Il n'est pas un seul endroit qui soit épargné par cette déferlante criminelle. Les citoyens semblent désemparés et ne savent à quel... policier se vouer. Raser les murs reste la seule parade pour éviter ces délinquants d'un genre nouveau. Les exemples, pour cela, sont légion. Mais aussi des témoignages de vol à la tire et d'agression à l'arme blanche et autres. Constat des lieux... Première halte, la rue Bouzrina (ex-rue de la Lyre), dans la Basse Casbah, ou comme l'appellent communément les Casbadjis, Leqouas. La proximité du commissariat de police et la présence d'agents de l'ordre n'ont pas empêché des vols et des agressions d'être commis. Les témoignages sont effarants et ne laissent personne indifférent. « Il n'est pas indiqué aux femmes de s'y aventurer, sans se faire accompagner par un proche, de préférence un homme », dira, de prime abord, cet homme habitant la rue des Frères Ousslimani (ex-rue du Lézard). « Ce n'est plus comme avant, même si la rue Bab Azzoun et Djamaâ lyhoud se sont forgés une notoriété certaine, j'ai été témoin d'un vol à la tire, survenu dans cette rue, du temps où les commerçants informels y faisaient régner leur loi. Les voyous ont usé d'un imaginaire formidable, en s'attaquant à une femme se trouvant sur le siège avant d'une voiture. La circulation bloquée aidant, l'un d'eux s'est acharné sur la main pleine de bijoux de la malheureuse alors qu'un autre tenait en respect le conducteur avec un canif bien brandi. N'était l'assistance inespérée des passants, le malheur de ces deux victimes aurait duré bien longtemps », témoigna notre interlocuteur. « Les propriétaires préfèrent vider eux-mêmes le soir leur magasin avant que les autres ne le fassent. Les descentes pendant la nuit sont monnaie courante », renchérit-il en évoquant les trésors d'ingéniosité des délinquants venus pour la plupart de l'extérieur de la localité. Les ressortissants étrangers, quant à eux, faisant les foundouqs et boui-boui des alentours, ajoutent un peu de leur « génie ». Des rixes entre communautés sont notables. La rue Didouche Mourad connaît, elle aussi, ces scènes. Les policiers ont « ébruité », il y a un moment déjà, dans l'une de leurs conférences, cette affaire où un jeune se sentant blessé, à leurs dires, dans son amour-propre, s'en prend à une jeune femme, la défigurant à tout jamais avec une lame. « Les jeunes préfèrent jouer les éternels badauds et agacer les passants s'ils ne les agressent pas », lâcha ce libraire des hauts de l'ex-rue Didouche. Il trouve que la nouvelle physionomie de notre « Champs Elysées » national est désagréable. Les étudiants sont l'autre catégorie victime de ces actes répréhensibles. Des jeunes filles sont devenues la proie facile de cette « pègre », même leurs portables sont souvent volés dans des bousculades qui se forment aux portes des bus universitaires. Des vols, commis dans l'enceinte même des campus et résidences, sont signalés sans que les administrateurs daignent faire un geste salutaire pour protéger les franchises universitaires. La Maison de la presse n'est pas non plus épargnée par ce flux de bandits « sans honneur » qui s'exhibent avec empathie dans ces alentours. Ces gens, en « chargeant » des employés de l'établissement, veulent s'offrir une réclame à moindre frais. Les groupes de HLM sont devenus « des coupe-gorges ». Piqués au vif par un article sur les agressions survenues aux alentours de la Maison de la presse, des lecteurs ont réagi. « Je suis écœuré par la tournure qu'ont pris les événements », tonna Zeghbèche Abdelkader, ancien brigadier de l'ordre public, qui tient à apporter son petit piment : « La justice doit épauler les policiers dans leur travail. Il est intolérable que les gens soient aussi bassement passés à tabac. » Autre lieu infesté par la délinquance, c'est la rue Mohamed Belouizdad. Les jeunes venant pour la plupart des hauteurs de la ville prennent à partie les passants. « Des gens ont vu des délinquants prendre à la sortie du stade du 20 Août des femmes sans défense. Ils les ont agressées, en entrant dans leur voiture par le toit ouvrant. Fait étonnant, il est révélateur de la déliquescence de notre tissu social, déjà fortement malmené par la décennie écoulée », déclara un jeune travaillant dans une société privée de gardiennage. Ce dernier procédé, apparu il n'y a pas si longtemps en Algérie, est devenu le seul recours des sociétés et des gens nantis. « Des fils qui ne sont pas sortis des jupons de leur mère jouent du couteau », attesta cet homme résidant à El Biar qui trouve que son quartier a perdu sa sérénité d'autrefois. Le Caroubier est un autre endroit où se jette cette « faune ». Les voyous interceptent les bus et délestent leurs occupants de leurs biens. Le passage souterrain, pas loin de là, est le théâtre d'agressions répétées. Faire, pour finir, un décompte des agressions est un exercice vain.