La poésie engagée s'est invitée sur les planches du Théâtre régional de Béjaïa (TRB) Malek Bouguermouh. La jeune troupe du TRB a redéboulé at home pour présenter, c'est une première, un montage poétique scénarisé. Le réalisateur de la performance, Yasser Nacereddine, a voulu faire revivre un instant des moualaqate, poèmes suspendus, une époque où les poètes accrochaient à leur guise dans l'espace public leurs textes pour qu'ils soient lus par les passants. Le rideau s'est levé sur une invite à l'écoute. A dire le mot, «awal, el kalima». Cela pour dire aussi que la performance sera déclamée dans toutes les langues. A la manière du goual, les comédiens exécuteront le premier tableau par une entrée en scène de derrière le public. Naguère, les jours de marché, l'auditoire ne faisait pas face au meddah, mais entourait de près celui-ci, pour communier avec lui. Le montage ouvre sur un préambule résumant les thématiques. Des mots qui «défrichent le néant, montrent des chemins». Les mots clefs de ces thématiques seront liberté, démocratie, révolte…. Ou tout simplement l'exhortation à vivre son Etre et sublimer son bonheur d'homme, «être un homme, pas un adulte». Yasser Nacereddine a convoqué pour cela la poésie de Pablo Néruda, Nazim Hikmet, Mohia, Mahmoud Darwich, Antonio Machado et Victor Jara. La scénographie a reproduit l'espace public, la rue, où sous l'éclairage d'un réverbère, le déclamateur enlevait son masque pour lire librement son poème. Les comédiens comme pour passer le flambeau et inciter les autres à «dire», se feront relayer par les jeunes animateurs du café littéraire qui n'ont pas montré moins de talent. La scénographie a manqué en mouvements et apparats mais pour une première expérience, si l'on s'en tient à la réaction du public au tomber de rideau, celle-ci mérite diversement d'être reproduite.