C'est dans une salle archicomble que le débat a été entamé par le modérateur et réalisateur Ahmed Rachedi. Pour ce dernier, il y a une réelle connexion entre la littérature et le cinéma. «C'est un sujet, dit-il, vaste et débattu depuis 30 000 ans. L'image, dira-t-il, s'est trouvée asservie de mots. Le cinéma a été obligé de puiser dans la littérature pour faire des films. Il est difficile de transcrire un film en images. Il y a eu plusieurs options dans l'adaptation cinématographique». Il est difficile de respecter une œuvre telle qu'elle a été écrite. Preuve en est avec Emile Zola ou encore Madame Bovary de Gustave Flaubert. Ahmed Rachedi estime que le langage des images ne reflète pas le langage des mots. Il y a un décalage entre une scène d'écrivain et une scène de films. «Le cinéma est une industrie. Les exploitants ont demandé à ce que les films ne dépassent pas les deux heures. Un film de deux heures ne peut pas reprendre l'intégralité d'un livre de 300 pages. L'adaptation reste une mission impossible. Le cinéma permet juste de relancer l'intérêt pour un livre oublié», explique-t-il. Pour sa part, Azouz Begag, spécialiste en socio-économie urbaine de Lyon depuis 1980, a soutenu que le monde de l'image est beaucoup plus puissant que les livres. De son côté, la scénariste et romancière syrienne, Abeer Esber, réfute l'idée que le cinéma soit une conséquence du roman. Selon elle, le roman a précédé le cinéma. Le cinéma et la littérature découlent d'une expression qui se complète. Leda Guidi, responsable des services de communication aux citoyens de la municipalité de Bologne, en Italie, est convaincue que l'émergence des nouvelles technologies peut engendrer de nouvelles formes d'analphabétisme. «Les citoyens de Bologne participent activement à la vie de la ville. Ils s'expriment à travers un portail sur internet. C'est la collectivité qui s'exprime dans différentes formes. Les espaces virtuels sont importants dans la vie publique», dit-t-elle. Le dernier intervenant italien, Maurizio Fantoni Minnellia, a brossé un tableau peu reluisant de la cinématographie italienne. A la fois voyageur, écrivain, essayiste cinématographique, journaliste, documentariste et spécialiste de littérature en langue espagnole, l'intervenant a indiqué que le cinéma italien contemporain n'est pas connu. C'est un cinéma dépassé aujourd'hui par la réalité. Le cinéma italien a abdiqué à sa fonction de raconter l'histoire italienne. «La société italienne n'est pas une société civile. Notre cinéma est en pleine décadence. Nous avons perdu cette capacité de nous adresser au monde. L'héritage du cinéma de l'avant-fascisme, nous l'avons perdu depuis deux décennies.» Pour notre interlocuteur, ces dernières années des romans médiocres ont été adaptés au cinéma.