Le colloque international consacré aux violences à l'égard des femmes n'aura pas lieu aujourd'hui à l'hôtel Essafir, Alger. La direction de la réglementation et de l'administration générale (DRAG), auprès de la wilaya d'Alger, n'a pas jugé opportun de répondre à la demande d'autorisation déposée par les organisateurs il y a… un mois. Faute de ce document, la direction de l'hôtel a refusé hier la tenue de la conférence, en dépit du fait que de nombreux invités algériens et étrangers étaient déjà arrivés et installés. Du côté de la wilaya, il nous a été impossible d'obtenir des explications. Tous nos efforts pour prendre attache avec le wali, son chef de cabinet ou le DRAG se sont avérés vains. A en croire leurs secrétaires, ils étaient tous en réunion, et ce, durant tout l'après-midi. Du côté des organisateurs du colloque, c'était la panique. Une réunion houleuse s'est tenue dans la précipitation pour décider de la suite à donner à la manifestation. Un communiqué a été rendu public. Ainsi, le collectif des douze associations, ayant préparé la conférence avec la collaboration de l'Association algérienne du planning familial (AAPF), a «pris acte de la non autorisation qui leur a été signifiée oralement et tardivement», et a tenu à «réaffirmer» sa «volonté de se battre contre les violences que subissent avec toutes les Algériennes». Pour le collectif, la non-autorisation de la tenue de ce colloque est une «violence contre l'expression et les luttes des femmes contre les violences qui leur sont faites». De ce fait, il considère que cette mesure «disproportionnée et intolérable traduit bien la situation sur le terrain des droits des femmes en Algérie» et conclut qu'«au moment où les femmes du monde entier commémorent cette journée, les Algériennes sont sommées de compter silencieusement leurs victimes». Ainsi, l'annulation de la conférence a suscité colère et frustration des nombreux invités arrivés hier. La décision de ne pas répondre à la demande d'autorisation augurait, selon eux, un refus que la wilaya n'a pas eu le courage d'assumer. Plus grave, elle donne une très mauvaise image de l'Algérie : celle d'un pays qui refuse toute expression en dehors des institutions gouvernementales. Pour preuve, aujourd'hui, le ministre de la Solidarité se rendra avec des journalistes au Centre national pour femmes victimes de violences de Bou Ismaïl, pour s'enquérir des conditions de prise en charge. Une activité qui entre dans le cadre de la commémoration de la Journée internationale de lutte contre les violences à l'égard des femmes. Force est de constater que le débat contradictoire, même quand il s'agit de défendre le droit à la dignité, reste banni en Algérie. Cette même Algérie s'est engagée devant la rapporteuse spéciale des Nations unies sur les violences contre les femmes, lors de sa visite au début de ce mois-ci à Alger, à associer la société civile à sa stratégie de lutte contre les violences.