Une foule compacte composée exclusivement de jeunes attend patiemment dans une salle exiguë à l'entrée de la direction de l'emploi de Constantine. C'est jour de réception en ce mardi pour le directeur qui va recevoir un à un les prétendants aux contrats de préemploi et les convaincre d'attendre le quota suivant, car celui de 2005 est consommé depuis plusieurs mois déjà. Dur pour ces jeunes universitaires, qui attendent depuis de longs mois d'avaler la pilule amère, mais la réalité n'est guère plus douce. Avec les 1754 postes dégagés cette année contre plus de 20 000 demandes, la partie n'est évidemment pas jouable. Et pourtant, la part de la wilaya concernant cette formule sociale d'insertion a connu une augmentation importante ces deux dernières années alors qu'elle n'a eu que 1500 postes durant la période 1998-2003. L'engouement des jeunes diplômés pour ce dispositif n'est en vérité qu'un pis-aller faute d'investissement à Constantine. Les 9000 étudiants sortis cette année de l'université de Constantine viendront en majorité grossir les rangs des chômeurs en l'absence de grands projets économiques capables d'absorber la demande. C'est la raison pour laquelle ils se rabattent sur la direction de l'emploi dans l'espoir de décrocher un CPE et se faire une petite place dans une société. Un contrat temporaire qui permet, cependant, l'insertion dans le monde du travail et une petite expérience qui pourrait satisfaire l'exigence des offres d'embauche. Même si le dispositif relève de la gestion sociale et non économique du problème du chômage, le gouvernement devrait lui consacrer davantage de considération pour en tirer un maximum de bénéfices, et ce ne sont pas les fruits qui manquent. A Constantine, l'expérience est intéressante à plusieurs égards et classe la wilaya en position de leader en matière de permanisation. Avec 35% des bénéficiaires permanisés au terme de leur année de CPE, Noureddine Boulassel, directeur de l'emploi, ne cache pas sa fierté de décrocher un tel score et de permettre aux jeunes de retrouver la stabilité. Un tel score est dû, selon lui, aux entreprises publiques qui forment le tissu industriel, comme l'ENMTP, German, CMT et PMO et qui adhèrent au principe du dispositif, contrairement au secteur privé qui n'offre aucune satisfaction. Avec le vent en poupe, M. Boulassel souhaite voir son quota revu à la hausse pour 2006 et pouvoir transférer le siège de la direction dans des locaux dignes de sa mission et des efforts fournis par son personnel. Un personnel composé à 50% de jeunes recrutés dans le cadre du CPE et qui réalisent un travail titanesque dans des conditions déplorables à cause de l'étroitesse des lieux et le manque de moyens matériels. La direction de l'emploi de Constantine ressemble de cette manière au cordonnier mal chaussé. Son rôle est pourtant loin d'être secondaire et mérite autant d'attention que les autres secteurs jugés névralgiques. L'emploi, comme le logement, sauvegarde la dignité humaine et offre la stabilité individuelle qui, elle, garantit la stabilité sociale.