Même si ses réserves énergétiques lui donnent encore un sursis de quelques années, l'Algérie a bien fini par comprendre que l'après-pétrole se prépare dès à présent. La réflexion autour du développement des énergies renouvelables (ENR) s'est accélérée au cours des derniers mois bien qu'à l'instar de la question des exportations hors hydrocarbures, le débat autour de l'après-pétrole a été engagé depuis de longues années. Courtisée par les initiateurs du méga projet Desertec, l'Algérie a choisi de réserver sa réponse. cela ne l'empêche pas toutefois d'avoir, semble-t-il, sa propre vision sur la stratégie à développer pour promouvoir les énergies renouvelables. Une stratégie dont on ignore encore les détails tant le programme prévu par le gouvernement en la matière n'a pas encore été approuvé par le Conseil des ministres. Le ministre de l'Energie et des Mines, Youcef Yousfi, a fait savoir au début du mois de janvier que ce programme sera mis en oeuvre à partir du premier trimestre 2011. Il porte sur plus d'une soixantaine de projets et vise à l'horizon 2030 à porter la part des énergies renouvelables dans la production d'électricité à 40%. Même s'il n'a pas encore été adopté, ce programme jugé très ambitieux par les observateurs étrangers a au moins le mérite de donner une idée sur les ambitions de l'Algérie en matière d'énergie renouvelable, de quoi rassurer ses partenaires potentiels dans la mise en œuvre de cette stratégie. Il faut dire que jusque-là, le gouvernement algérien a davantage multiplié les discours de bonne volonté que les actions concrètes. La preuve en est que la part des énergies renouvelables dans la production énergétique globale n'excède pas les 0,1%. Pourtant, selon les experts, l'Algérie dispose d'un gisement en matière d'ensoleillement qui est le plus important de la région d'Afrique du Nord. On estime qu'il atteint une moyenne annuelle variant entre 2 550 heures dans le nord à 3 819 heures dans le Sahara avec une capacité de production respective de 1 700 et 2 650 Kwh/m2/an. Force est de constater que les initiatives du gouvernement en matière de développement des énergies renouvelables restes limitées. On peut citer le projet de centrale hybride (gaz-solaire) de Hassi R'mel, d'une capacité de 150 MW qui n'est pas encore livrée et une ferme éolienne de 10 MW dans la wilaya d'Adrar. Sonelgaz vient d'annoncer que le projet d'usine de fabrication de modules photovoltaïques de Rouiba, d'une capacité annuelle de 100 MW devrait démarrer en 2012 pour un d'investissement de 100 millions de dollars. Changement de cap Pour certains chefs d'entreprise allemands présents la semaine dernière à Alger dans le cadre d'un séminaire sur les énergies renouvelables, ces initiatives timides témoignait de «l'hésitation» de l'Algérie à se lancer définitivement dans ce secteur. Mais une hésitation relativisée par la complexité et l'importance des investissements qui y sont reliés. Par ailleurs, étant donné qu'une partie de l'énergie produit sera destinée à l'exportation, il s'agit, selon un économiste du conseil national économique et social, d'avoir une vision claire sur les tarifs d'électricité qui seront pratiqués, de sorte à ce qu'ils soient «suffisamment élevés pour assurer un retour sur investissement», tout en étant accepté par la partie européenne. En 2010, le gouvernement algérien a prévu dans la loi de finances 2010, la création d'un fonds national pour le développement des énergies renouvelables dans le but de contribuer au financement des actions et projets inscrits dans le cadre de la promotion de ce type d'énergie. La même année où il a annoncé l'ambitieux programme d'ENR à l'horizon 2030. D'un autre côté, l'Algérie a signé en août dernier un accord avec le Japon portant sur un projet appelé «Sahara Solar Breeder Super Apollo Project», financé à hauteur de 5 millions de dollars par le Japon et qui consiste dans un premier temps à monter une usine pilote en Algérie pour la fabrication du silicium, utilisé dans l'industrie des panneaux solaires. Des signaux considérés par les partenaires de l'Algérie comme révélateurs de la nouvelle volonté politique algérienne d'aller de l'avant dans ce secteur. D'ailleurs, selon un expert auprès du gouvernement allemand présent à Alger à l'occasion du séminaire cité plus haut, ce n'est qu'à partir de 2010 que la position de l'Algérie est devenue claire. «Il y a deux ans, nous n'étions pas sûrs que l'Algérie s'intéresserait aux énergies renouvelables», nous a-t-il déclaré. Enfin rassurés sur les ambitions algériennes, les futurs partenaires allemands attendent néanmoins plus de détails sur le contenu du programme national d'ENR pour définir dans quelle mesure ils apporteront leur expertise et leur savoir-faire technologique dans un secteur où ils sont des leaders mondiaux. La directrice de la stratégie au niveau de Sonelgaz, Djamila Mohammedi a expliqué que le programme algérien sera axé sur le solaire. Quant à l'éolien «il faudra d'abord en évaluer le potentiel et des études seront menées dans ce cadre pour déterminer par la suite la démarche à suivre», a-t-elle expliqué. Même si l'Algérie n'a pas encore définit sa position finale vis-à-vis de l'initiative Desertec, cela ne constitue pas un obstacle pour les entreprises allemandes, ont rassuré leur représentants. Cela d'autant plus que le projet Desertec lui même n'est pas encore totalement bouclé. Paul van Son, le directeur général de Desertec a affirmé il y a quelques mois s'être fixé comme objectif de définir d'ici fin 2012 les grandes lignes de Desertec (emplacement des installations, financement, répartition approximative entre solaire et éolien). Echéance à laquelle «il sera mis en route au moins un projet de référence». Cela alors que la première centrale thermique pourrait connaître une première mise en service vers 2020. On estime d'ores et déjà que le mégaprojet devrait coûter autour des 500 milliards d'euros. Le projet, rappelle-t-on prévoit la construction d'une trentaine de centrales solaires et de fournir jusqu'à 15% de la consommation d'électricité européenne. Pour l'heure, c'est Cevital qui représente l'Algérie. Le groupe compte d'ailleurs investir plus de 600 millions de dollars dans la réalisation d'une usine de fabrication de panneaux solaires, selon son PDG Issad Rebrab.