Hier, l'armée égyptienne, en charge de la gestion du pays depuis le départ du raïs, a indiqué la dissolution du Parlement et la suspension de la Constitution, qui sera amendée. Dans son «communiqué no5», le Conseil suprême des forces armées, à qui le président déchu a transmis le pouvoir vendredi, annonce «la dissolution de l'Assemblée du peuple et de la Choura», les deux chambres du Parlement largement dominées par des membres du Parti national démocrate (PND) du pouvoir Moubarak. La dissolution du Parlement, après des élections, l'an dernier, marquées par une fraude massive dénoncée par l'opposition, et la révision de la Constitution, laquelle limite les conditions de candidature à la Présidence, constituent les principales revendications des manifestants anti-Moubarak. Le Conseil suprême annonce aussi, dans ce texte lu par une présentatrice à la télévision d'Etat, la «suspension de la Constitution» et la création d'une commission pour l'amender et organiser un référendum sur ces changements. Le Conseil suprême, formé d'une vingtaine de généraux, ajoute qu'il «prend en charge la direction des affaires du pays provisoirement pendant six mois, ou jusqu'à la fin des élections législatives et pour la présidence de la République». Il indique en outre que le chef du Conseil suprême des forces armées, en l'occurrence le maréchal Mohamed Hussein Tantaoui «le représentera auprès de toutes les parties à l'intérieur et à l'extérieur». Autre décision : «le Conseil suprême des forces armées publiera des décrets à valeur de loi pendant la période transitionnelle». Entre temps, «le gouvernement d'Ahmed Chafic est chargé de continuer à travailler jusqu'à la formation d'un nouveau gouvernement», selon le texte. L'armée s'engage à «tenir des élections pour les chambres haute et basse» du Parlement et «pour la présidence». Enfin, «l'Etat s'engage à appliquer tous les traités et pactes internationaux dont il fait partie». Pour rassurer la population égyptienne et la communauté internationale, l'armée s'est engagée à une «transition pacifique du pouvoir» qui «prépare le terrain à un pouvoir civil élu en vue de construire un Etat démocratique libre» et au respect des traités internationaux. Il s'agit d'un message en direction surtout des Etats-Unis et d'Israël, inquiets des conséquences des bouleversements en Egypte sur les accords de paix de Camp David signés en 1979 entre Anouar Sadate et Menahem Begin. Accords qui font du Caire un partenaire de poids et stratégique dans la région. Dans ce cadre aussi, Washington consacre chaque année 1,3 milliard de dollars à titre d'aide pour l'armée égyptienne. Vendredi matin, l'armée avait déjà assuré qu'elle serait garante d'élections «libres et transparentes» et qu'elle mettrait un terme, dès que la situation serait redevenue normale, à l'état d'urgence en vigueur depuis l'assassinat du président Anouar Sadate, en 1981. Par ailleurs, le ministre de la Défense israélien, Ehud Barak, a déclaré dans un entretien diffusé hier par la chaîne américaine ABC, que les récents événements vécus par l'Egypte ne présentent «aucun risque» pour les relations avec Israël. «Je pense qu'aucun risque ne pèse sur les relations entre Israël et l'Egypte et qu'aucun risque opérationnel quelconque ne nous attend au coin de la rue», observe-t-il. Le même responsable qualifie le mouvement qui a provoqué le départ démission de Moubarak «spontané» et n'a «rien de similaire» à la révolution iranienne de 1979. «Je pense que les Egyptiens font les choses à leur façon», constate Ehud Barak. Les manifestations, poursuit-il, «n'ont pas été organisées par des mouvements extrémistes d'origine islamiste» et «je pense qu'il faut respecter les intentions et les besoins».