Quatre personnages se disputent l'espace du Café bonheur pour raconter les histoires originales d'aujourd'hui. La compagnie Gosto s'est produite du 23 au 26 février au Palais de la culture Moufdi Zakaria de Kouba. Les convives ont pu apprécier à sa juste valeur un spectacle original. A travers Le Gourbi ya mon ami, le dramaturge algérien, Ziani Cherif Ayad, a essayé de retremper le public dans un café-théâtre en faisant appel à la mémoire collective. En l'espace d'une heure bien pleine, il nous a été donné de suivre les péripéties hilarantes de quatre comparses à la destinée différente mais complémentaire, reflétant la société d'aujourd'hui.Le décor typique d'un café de jadis se donne à voir avec beaucoup de nostalgie. A droite de la scène, on peut deviner le comptoir d'un vieux café. L'espace central est occupé par des chaises et des tables où le public s'est prêté volontiers au jeu de la mise en scène. Le Café bonheur appartient à Kader, un personnage d'une humeur et d'une colère fracassantes. Nostalgique d'un passé révolu à jamais, ce cafetier ne cesse de se référer à l'éducation de son père. Un père qui avait exercé cette profession durant cinquante ans. Quoique déserté durant les moments noirs qu'a traversés l'Algérie, le Café du bonheur semble se réapproprier sa clientèle, notamment étrangère. Pendant que Kader est affairé derrière son comptoir, le jeune Alilou s'atelle avec le sourire à servir les potentiels clients. Alilou est hanté par l'étranger. Ce jeune désespéré ne croit à aucun projet de société dans son pays. Son ultime rêve est de vivre ailleurs. Nourreddine est un chansonnier qui se plaît à porter son smoking et son nœud papillon en prévision d'éventuelles grandes scènes. Evitant de se mêler aux sautes d'humeur du cafetier Kader, il s'enferme dans son monde. Un monde fait de musicalité d'antan. Pour sa part, Lamri est un client loufoque et exubérant à la fois. Sapé de son éternel bleu de Shanghai, de ses lunettes de soleil et sa casquette vissée à la Che Guevara, il est, lui aussi, déçu, par tous les rêves qu'il n'a pu réaliser, dont celui de l'octroi d'un logement décent. Sinistré du tremblement de terre de 2003 en Algérie, il vit en compagnie de sa famille dans une tente. Dans un jeu d'acteur époustouflant, l'artiste est revenu avec un zeste d'humour décapant sur les déboires et la bureaucratie. Ces histoires plurielles, exhumées du quotidien de chacun, ont donné naissance à des répliques bien agencées entre comparses. Le logement, la malvie, le rêve, l'embellie… sont entre autres les thèmes abordés avec une pointe de philosophie et de recul. Ces dialogues suavement concoctés ont été entrecoupés par un répertoire musical ancien, signé par des figures de proue de la chanson algérienne, à l'image de Rachid Ksentini, Mohamed Touri, Sid Ali Fernandel, Khelifi Ahmed ou encore Abdelhamid Abbabsa. Le ténor de la musique andalouse, Nourreddine Saoudi, a eu la lourde tâche d'interpréter ce répertoire ancestral. Le dramaturge Ziani Cherif Ayad, nous explique en aparté : «On ne reprend pas les sketches d'hier, mais on essaye de raconter des histoires originales d'aujourd'hui. On essaye de trouver cette émotion dans cet univers de café littéraire d'antan. Il y a des similitudes et des recoupements entre hier et aujourd'hui. Les personnages racontent l'histoire d'une société désenchantée qui n'a pas pu réaliser, à l'instar de ses aînées, ses aspirations profondes». Le Gourbi y a mon ami sera à l'affiche, ce soir, à partir de19h30 au niveau du centre culturel Aïssa Messaoudi de la Radio nationale. Il est à noter par ailleurs que Le Gourbi y a mon ami sera suivi prochainement de deux autres pièces, L'Agence de là-bas et Rana h'na.