Il faut bien l'avouer, il y a des Algériens qui ne se sentent pas concernés par l'étrange digestion du chef de leur Etat ; et pourtant, la situation est devenue source de toutes les hypothèses. La première ? Bouteflika n'a pas été empoisonné. S'il s'est précipité à Paris, c'est qu'il n'a aucune confiance en la médecine de son pays. Il va rentrer après un bref déjeuner végétarien avec son ami Jacques Chirac et prendre l'avion du soir. A Alger, il va probablement accuser, dans un discours télévisé, les « cercles revanchards » et les « tayabate el hammam » d'avoir insidieusement insinué et de l'avoir enterré trop vite, vilipendant les « couches de la déraison que le peuple a déjà identifiées ». Le peuple, justement, va applaudir et oublier l'incident pour retourner à son occupation favorite, trouver un travail ou de l'argent, avec une nette option pour le second, pendant que le Président va retourner à ses inaugurations de chantiers et signatures de protocoles. Deuxième hypothèse ? Abdelaziz Bouteflika va mourir. A 68 ans, après une vie bien remplie, d'Oujda à El Mouradia, des premières années de lutte pour l'indépendance aux dernières, celles du dur combat pour guérir un pays malade en contentant toutes les forces du déséquilibre pour trouver l'équilibre global. Que va-t-il se passer ? Un deuil de quarante jours et un hommage appuyé. Pour le reste, les dirigeants algériens sont devenus experts en la matière. Entre les licenciements (Chadli), les morts violentes (Boudiaf), les nominations directes (Kafi) et les démissions (Zeroual), ils rebondiront une fois de plus et trouveront un Président pour les Algériens orphelins. Bien sûr, de ces deux hypothèses, c'est la première qui sera retenue. Bouteflika n'est pas mort puisque le chef du gouvernement a expliqué qu'il était en bonne santé. On imagine très mal Ahmed Ouyahia mentir aux Algériens.