BBC Arabic a envoyé une équipe à Tripoli, après le début de la révolte populaire contre le régime d'El Gueddafi. Les reporters ont été fortement malmenés par les milices du colonel. Un journaliste a été tabassé. Une autre équipe est toujours présente à Benghazi, ville dominée par l'opposition libyenne. Contrairement à Al Jazeera ou Al Arabiya, BBC Arabic n'a pas subi de brouillage de ses signaux émis par satellites. BBC Arabic, selon ses responsables, est devenue plus visible grâce aux événements qui secouent le monde arabe depuis quatre mois. «Nous ne sommes pas gênés par la concurrence. Nous présentons nos informations en respectant l'objectivité et la crédibilité. Il appartient au téléspectateur ou à l'auditeur de choisir de suivre les informations sur la BCC ou sur d'autres médias. Nous tentons toujours d'être critiques dans ce que nous faisons pour améliorer notre travail», a indiqué Farès Couri, rédacteur en chef de BBC Arabic, rencontré au siège de la chaîne Portland Place, à Londres. Les 300 millions de téléspectateurs arabes permettent, d'après lui, à tous les supports médiatiques arabophones d'avoir un public aussi large que possible. Il a reconnu que les médias, dont la BBC, n'ont pas réellement prévu l'accélération des événements en Tunisie. «La couverture de l'actualité égyptienne était mieux, car nous avons tiré les leçons des ratages en Tunisie. De plus, la BBC a traditionnellement une grande présence au Caire. Nous n'avons pas hésité à couvrir les troubles au Bahreïn. Notre correspondante, partie remplacer un collègue, a été retenue pendant vingt heures à l'aéroport de Manama avant d'être empêchée d'entrer au pays sans aucune raison», a-t-il expliqué. Au Yémen, le correspondant de la chaîne a été agressé. «Il a eu le nez cassé. Malgré cela, il poursuit la couverture des événements à Sahat Al Taghyir, à Sanaa. Et il reçoit toujours des menaces. Il tente de donner la parole à toutes les parties. Sur la No Fly Zone sur la Libye, nous présentons les choses telles qu'elles sont. L'implication de la Grande-Bretagne dans cette opération ne change rien», a précisé le rédacteur en chef. Farès Couri a remarqué qu'en lançant des chaînes d'expression arabe (BBC, DW Arabic, Al Hurrah, France 24, Russia Al Yaoum), l'Occident et la Russie veulent mieux communiquer avec le monde arabe. «BBC Arabic et Al Hurrah s'intéressent à l'actualité arabe de l'intérieur. Le but de la BBC Arabic n'est pas de répercuter les informations relatives à la Grande-Bretagne. Nous diffusons les news britanniques de la même manière qu'on le fait pour les nouvelles venues d'autres pays», a-t-il noté, rappelant que BBC, en tant que média, a une existence qui dépasse les 70 ans. La BBC n'est, selon lui, pas tenue de s'aligner sur la politique extérieure de la Grande-Bretagne. «Notre politique éditoriale est axée sur la crédibilité et sur l'objectivité. Nous ne diffusons que les informations tirées de sources sûres. Nous rapportons la réalité telle qu'elle est. Nous avons diffusé sans aucune hésitation les nouvelles relatives à l'attaque d'une mosquée à Daraa, en Syrie. Notre source était à l'intérieur de la mosquée. Nous avons également diffusé la version des autorités syriennes», a-t-il précisé. Farès Couri reconnaît la faible action de BBC Arabic au Maghreb. «Nous avons à plusieurs reprises tenté d'avoir une présence en Algérie. Sans succès. Il est encore difficile d'ouvrir un bureau ou d'avoir un correspondant à Alger. A Rabat, il est facile d'avoir un direct (duplex) à travers un prestataire de services. Cela est impossible en Algérie. La Télévision algérienne refuse d'assurer un tel service et quand elle fait des offres, l'opération est fort coûteuse», nous a-t-il expliqué. Selon lui, la chaîne a tenté d'envoyer un correspondant à Alger avant la participation algérienne en Coupe du monde de football, l'été 2010. «Ce journaliste d'origine algérienne a attendu dix jours durant l'obtention d'une accréditation pour réaliser des reportages sportifs. Il n'a eu aucune explication», a-t-il appuyé. Il a confié avoir reçu des dizaines de CV de reporters algériens voulant travailler pour la chaîne. «Nous sommes encore hésitants compte tenu des difficultés que nous avons trouvées à Alger», a-t-il dit. Depuis la chute de la dictature de Ben Ali, le travail des journalistes de la BBC Arabic est, selon lui, plus facile en Tunisie. BBC Arabic envisage d'ouvrir un bureau permanent à Tunis.