C'est un cri de détresse lancé par des personnes que nous rencontrons tous les jours dans la rue. Leur apparition sur les places publiques est de plus en plus fréquente. Ils réclament des droits et se plaignent de la négligence et du laisser-aller des pouvoirs publics à leur égard : ce sont les handicapés. Leur incapacité physique et mentale n'est malheureusement pas la seule source de leurs problèmes auxquels s'ajoutent les contraintes de la vie si difficiles à surmonter. Ils ont une pension estimée à 4000 dinars par trimestre. Elle n'a pas bougé depuis plusieurs années. Ils la reçoivent avec énormément de retard. Cette somme dérisoire est insuffisante pour répondre aux besoins combien urgents de cette catégorie. «On a vu les grands titres des journaux annonçant la hausse de cette pension à 10 000 dinars, mais sur le terrain, nous n'avons rien touché» affirme un handicapé rencontré au marché de Aïn Benian. «Ould Abbas l'a bien promis depuis plus de deux ans, mais il a quitté le département de la Solidarité sans qu'il ne concrétise cette mesure. Son successeur n'y pense même pas. Nous sommes des laissés-pour-compte depuis longtemps», dira-t-il avec grand regret. Ce jeune homme de 30 ans n'ose même pas parler de sa situation. Handicapé depuis sa naissance, ayant grandi au sein d'une famille pauvre, il n'a jamais eu droit à une vie paisible et digne. Il est conscient qu'il n'y a rien à faire avec une pension de 4000 dinars cumulable qu'il touche une fois par an. Mais que peut-il faire face à l'absence d'écoute ? Le principe de la gratuité du transport, au profit de cette catégorie, a été délaissé. Les handicapés non valides sont humiliés quotidiennement dans les différents moyens de transport des secteurs public et privé et sont sommés de payer leur place au même titre que les autres. L'annulation de cette gratuité a eu un impact direct sur la santé de ces personnes, notamment chez celles ayant plusieurs séances de soins par semaine dans les structures spécialisées. Beaucoup ont été contraints d'abandonner le déplacement chez les kinésithérapeutes en dépit de l'importance des soins. Cela s'ajoute aux autres problèmes dus notamment à l'inexistence de ce spécialiste dans certains centres de soins ou encore l'insuffisance de la prise en charge consacrée à cette catégorie de personnes ayant des besoins spécifiques. «C'est l'un des facteurs à l'origine de complications pour les handicapés. Le malade perd plusieurs heures sur son fauteuil roulant à attendre une séance d'une demi- heure de massage, ce qui est souvent insuffisant pour calmer toute la fatigue occasionnée par la position assise» affirme un handicapé qui souligne qu'il existe des soins spécifiques pour handicapés adultes et qui ne sont pas assurés dans tous les centres.Si les personnes appartenant à ces catégories fragiles de la société arrivent à trouver des bricoles pour quelques sous de plus, les jeunes handicapés ne peuvent même pas prétendre à cette solution. «Il n'y a personne qui peut se mettre à sa place. Il ne bouge pas et parle peu depuis des années. Il ne s'habille pas bien. Son cas nécessite une prise en charge médicale, psychologique et autres mais qu'il ne peut pas se permettre en raison de sa modique pension. Il souffre en silence. Il souffre énormément», a poursuivi le compagnon d'un handicapé. Outre la revalorisation de la pension, les handicapés interpellent les pouvoirs publics afin d'instaurer l'indemnité spéciale pour handicapés adultes, infirmes reconnus au taux de 100%, afin qu'ils puissent se permettre une prise en charge convenable. C'est un cri de détresse lancé par des personnes que nous rencontrons tous les jours dans la rue. Chacun a son histoire, chacun a sa souffrance.