L'Union générale des travailleurs algériens (UGTA) sera encore une fois le seul représentant syndical à la prochaine tripartite qui regroupera aussi le gouvernement et le patronat le 28 mai prochain. Une tripartite consacrée aux questions économiques. Le gouvernement continue d'avoir les mêmes réflexes d'il y a dix ans en ignorant les syndicats autonomes. L'UGTA, qui a choisi de se mettre du côté de l'Exécutif en tournant le dos aux revendications sociales des Algériens, ne représente pourtant plus l'ensemble de la classe ouvrière. La contestation est depuis plusieurs années menée par les syndicats autonomes dans des secteurs tels que l'éducation, la santé, l'université et la Fonction publique. A Skikda, des responsables de l'UGTA ont été chassés par les travailleurs du complexe pétrochimique alors que les postiers ne veulent pas être représentés par le syndicat de Abdelmadjid Sidi Saïd. Contesté à l'intérieur même de l'ex-syndicat unique, ex-organisation de masse du FLN, ce même Sidi Saïd s'est permis dernièrement d'insulter les syndicats autonomes en les accusant de vouloir «déstabiliser le pays». Un argument sécuritaire qui a fait rire les animateurs du mouvement syndical libre. «Il y a une volonté politique de mettre tout le monde dans le bain pour travailler ensemble», a pourtant dit Abdelkader Malki, responsable à l'UGTA, à propos de la tripartite du 28 mai. Un simple discours ? Il est évident que sans la présence des syndicats autonomes, qui représentent des centaines de milliers de salariés, la tripartite du 28 mai n'aura aucune crédibilité. Ses décisions n'engageront que ceux qui étaient présents. Curieusement, le gouvernement accepte une pluralité des organisations patronales et pas une pluralité des syndicats. Une manœuvre, devenue ridicule au fil des ans, pour imposer ses points de vue. Ahmed Ouyahia a tout fait pour éviter le dialogue social tant avec les syndicats qu'avec le patronat. Les émeutes ? Les manifestations ? «Celui qui a mal à la tête sort dans la rue», a-t-il dit ironiquement lors de son passage à l'APN. Abdelaziz Bouteflika a, lui, dès son arrivée au pouvoir en 1999, montré son aversion à l'égard des syndicats, des partis, de la société civile et des médias. Douze ans après, il n'a pas changé d'un iota sa position malgré son annonce de «réformes» politiques. «Réformes» engagées sous la pression des événements internationaux marqués par les révoltes des peuples arabes contre les dictatures. La manière avec laquelle la tripartite est préparée prouve que l'esprit du parti unique est toujours aussi «collant» au palais d'El Mouradia et ailleurs. Des syndicalistes autonomes s'interrogent sur la manière de récupérer la Maison du peuple, siège de l'UGTA, à la place du 1er Mai à Alger. Selon eux, cet immense espace, propriété des travailleurs algériens, doit revenir à l'ensemble des syndicats et pas uniquement à l'UGTA. Des actions politiques doivent être engagées en ce sens surtout qu'à leurs yeux, il n'y a pratiquement plus rien à espérer de l'UGTA. Les syndicalistes attendent un soutien de la société civile, de l'opposition, des députés et des médias pour restituer la Maison du peuple à la communauté nationale. Cette question de l'économiste Abderrahmane Mebtoul, posée dans un texte publié par le site Algerie-Focus, mérite réflexion : «Comment se fait-il que l'UGTA, dont la majorité de ses dirigeants sont sénateurs, députés, affiliés à des partis politiques (essentiellement RND-FLN où ils doivent choisir entre la fonction politique ou syndicale,) malgré ses appels au vote massif aux dernières élections législatives, ces deux partis ont eu moins de 11% des voix par rapport aux inscrits ?» D'autres interrogations se posent sur la manière avec laquelle sont gérés les fonds et les budgets de l'UGTA. Mais, là, c'est un autre débat Le budget de l'UGTA n'est-il pas pratiquement érigé en secret d'Etat ?