Quand des personnalités en sont à appeler à l'organisation d'élections «démocratiques et transparentes», c'est qu'il y a manifestement problème. Autrement dit, celles qui ont été organisées jusque-là n'ont été ni démocratiques ni transparentes. Ce n'est pas seulement un label, mais le critère qui validerait toute opération électorale, comme le soulignent tous les constitutionnalistes. C'est la norme sans laquelle une élection cesse d'en être une. Rappelons-nous ce chef de gouvernement qui promettait, en 1991 déjà, «des élections propres et honnêtes» comme pour marquer la rupture tant attendue avec l'époque précédente et inaugurer un nouveau chapitre dans l'histoire des élections en Algérie : celui de la crédibilité des élections et de la légitimité des urnes. C'est celle-ci seulement qui devait être consacrée, car elle seule peut rapprocher l'électeur de l'autorité qu'il a choisie en toute connaissance de cause. Ce qui signifie la fin de toutes les autres légitimités. Alors que cela devait aussi nous rapprocher de la norme universellement admise, sauf dans les régimes totalitaires, bien entendu, à croire que des décennies plus tard, l'Algérie n'en est pas encore là et que par voie de conséquence, le paysage politique manque de lisibilité, en ce sens qu'il est difficile, sinon impossible de mesurer avec exactitude le nombre de voix, de mesurer l'audience d'un parti. La faute ne revient pas aux partis qui ont accepté de s'engager dans une compétition électorale, mais au système qui autorise de telles dérives. Qui fait ou contrôle quoi aussi bien en amont qu'en aval de l'acte électoral ? Immanquablement, la question revient avec autant d'insistance qu'il y a des décennies quand l'Algérien ne pouvait choisir que des candidats d'une seule liste, donc d'un même parti, pour des élections locales ou parlementaires, tandis que la présidentielle, avec son unique candidat, se transformait en plébiscite. Il n'y avait aucun choix, et la notion même de choix renvoie à celle de liberté, forcément inexistante. Depuis 1989, la donnée n'est plus la même avec le multipartisme qui, lui, autorise le choix. Autoriserait, devrait-on dire, puisque le problème se pose encore et toujours au regard de toutes ces interrogations autour de l'acte électoral. Cette fois, la question est relancée par le président du groupe parlementaire du tiers présidentiel au Conseil de la nation, une instance élue au suffrage indirect pour les deux tiers de ses membres. Mohamed Boukhalfa vient d'appeler à l'organisation d'élections (législatives 2012) «démocratiques transparentes», à même de permettre l'émergence d'une «majorité légitime», ou plus simplement, réellement sortie des urnes et, par voie de conséquence, conforme au choix des électeurs. Ce sera aussi, fera-t-il remarquer, une «minorité respectable et utile». Elire, c'est choisir, et c'est ainsi que se définissent les élections. Pas de coup de force, mais une véritable représentation, avec son contre-pouvoir et au bout du mandat, la sanction de l'électorat. Il a suffi de quelques mots – transparence, démocratie, légitimité – au sénateur pour soulever un problème majeur. Les moyens législatifs ne manquent pas pour cerner le paysage politique. La question du mode de scrutin, puisqu'il s'agit de cela, avait été soulevée en 1991 déjà, et ceux qui en avaient pris l'initiative déclaraient vouloir anticiper sur ce fameux bond que l'Algérie s'apprêtait à faire avec son entrée dans le pluralisme.