La succession ouverte à la direction générale du Fonds monétaire international, après la démission de Dominique Strauss-Kahn, a donné lieu à un véritable «chassé-croisé» à travers les capitales des pays qui comptent des premiers prétendants déclarés au poste désormais vacant. Si la Française Christine Lagarde semble bien partie dans la course en vertu d'une règle non écrite, en vigueur depuis 1946, qui veut que la fonction de directeur général du FMI a toujours été occupée par un Européen et celle de la Banque mondiale par un Américain, il n'en demeure pas moins qu'il lui reste encore à convaincre pour obtenir le consensus indispensable, notamment de la part des pays émergents. Elle est attendue en Arabie Saoudite et en Egypte, ce week-end, à la suite de réserves formulées par New Delhi et Pékin lors de la tournée qu'elle a entamée la semaine dernière par le Brésil. Le ministre chinois des Affaires étrangères s'est d'ailleurs borné à déclarer que «les jeux étaient ouverts» pour le poste de directeur général du Fonds après avoir reçu Mme Lagarde. Pendant ce temps, son concurrent, le gouverneur de la Banque centrale du Mexique, était reçu à Ottawa où les responsables canadiens l'auraient assuré qu'ils accueilleraient favorablement la candidature d'un pays émergent. La ministre française de l'Economie, soutenue par l'Allemagne, la Grande-Bretagne et l'Italie, part grande favorite et peut compter sur l'appui de l'Union européenne qui se considère comme premier bailleur de fonds du FMI, un argument de poids pour revendiquer la direction générale. Et surtout qu'en pleine crise qui secoue l'Europe, celle-ci a encore plus besoin de l'institution monétaire internationale pour renflouer la Grèce, le Portugal aujourd'hui fortement mis à mal. On peut supposer que la chancelière allemande, Angela Merkel, n'aura pas manqué de mettre en avant ces arguments auprès du président américain, Barack Obama, lors des entretiens qu'elle a eus lors de sa visite officielle aux Etats-Unis. Pour s'aliéner le soutien des pays émergents – les BRICS (Brésil, Inde, Chine et Afrique du Sud) – elle s'est engagée, au cours de sa tournée, à faire en sorte qu'ils aient plus de poids au sein de l'institution monétaire internationale, si elle était élue. Pour la petite histoire et comme argument «supplémentaire», la Française a suggéré malicieusement qu'une fois élue, elle serait d'aplomb en tant que femme pas nécessairement en pantalon et avec un niveau plus faible de testostérone. L'Afrique du Sud n'écarte pas l'éventualité de susciter la candidature de son ancien ministre des Finances, Trevor Manuel, d'ici le 10 juin. D'ailleurs le président sud-africain s'est entretenu avec son homologue brésilienne Dilma Roussef, ce qui semble peu probable. Toujours est-il qu'au-delà de ces déclarations laconiques et de ces propos sibyllins, les pays émergents entendent peser de manière conséquente au sein du Fonds monétaire international, loin du simple formalisme que susciterait la désignation de son directeur général.