Certaines informations en provenance de Libye risquent d'aggraver la méfiance et l'inquiétude à l'égard de ceux que l'on dénomme les «révolutionnaires libyens». Deux sources, à savoir Amnesty International et le célèbre Wall Street Journal, font état de comportements fortement attentatoires aux droits de l'homme. Citant un article du Wall Street Journal, le site américain on line Black Star News affirme, dans un éditorial daté du 26 juin, qu'on assiste à «un nettoyage ethnique des Libyens noirs». Le Wall Street Journal, dans un article intitulé «La ville libyenne déchirée par des luttes tribales», indique que les «rebelles» de Misrata, en Libye, ont chassé toute la population noire de la ville. Toujours selon la même source, les «rebelles» ont pour intention de prendre Tawergha, une petite ville pas loin de Misrata, et «se proposent de la nettoyer de tous les Noirs dès qu'ils l'auront conquise». Selon toujours le même journal, certains de ces «révolutionnaires» se considèrent comme des «brigades dont la mission est de purger le pays des esclaves à la peau noire». Le Wall Street Journal cite un commandant rebelle, Ibrahim Al Halbous, qui aurait dit, en parlant des Noirs : «Il faut qu'ils fassent leurs valises.» Amnesty International est l'autre source faisant état de graves atteintes aux droits de l'homme. Le site français d'information on line Rue 89 a, pour sa part, interviewé le 16 juin dernier Donatella Rovera, conseillère sur la réaction aux crises à Amnesty International. Celle-ci est rentrée de Libye après un séjour de trois mois dans les villes de Misrata, Benghazi, Ajdabiya et Ras Lanouf. La chasse aux Noirs Ce qu'elle rapporte n'est pas du tout flatteur pour les révolutionnaires libyens. «Il y a eu une certaine hystérie, de la part des médias, autour de la question des mercenaires, il s'agissait surtout de pauvres jeunes gens terrorisés, pas forcément liés au conflit», affirme Mme Rovera, qui précise à propos des Algériens : «J'ai rencontré un jeune Algérien dans une prison de Misrata. Il n'était pas du tout mercenaire, il travaillait dans une pâtisserie. Son patron a dû faire une lettre pour prouver qu'il ne mentait pas.» Ce que rapporte Mme Rovera à propos des populations noires est encore plus grave : «On n'a pas vu de mercenaires, sauf si cela s'est passé dans l'Ouest où nous n'avions pas accès. Nous avons rencontré des étrangers et des Libyens noirs qui ont été pris pour cible par les anti-Gueddafi. Ils (les combattants) ont commis des violations graves.» Elle précise encore : «Les rebelles sont responsables de nombreuses attaques contre les étrangers et les Libyens noirs, soupçonnés d'être des mercenaires. Certains ont été assassinés. Il faut agir maintenant. Les gens du Conseil national de transition sont contre ces pratiques. Je les crois sincères, mais ils ne contrôlent pas la situation.» La question des mercenaires, par exemple, «le Conseil national de transition en a beaucoup parlé au début du conflit, notamment sur Al Jazeera qui est très regardée en Libye. Ils devraient avoir le courage de retourner sur Al Jazeera et sur la nouvelle chaîne d'opposition libyenne pour démonter cette rumeur et condamner les violences. Mais ils ne le font pas. Ce n'est pas une priorité pour eux». Cette situation ne peut être tolérée tout simplement parce que ces hommes en armes combattent un dictateur sanguinaire. C'est justement pendant les heures les plus difficiles que les hommes engagés dans un combat libérateur se doivent de veiller au respect des principes préservant la vie et la dignité humaine.