Censé être le moteur du développement du continent africain, l'industrialisation est au plus mal. Aujourd'hui, le continent ne représente plus que 1% environ de la production manufacturière mondiale. L'industrie africaine reste encore dominée par le secteur de l'extraction. C'est le constat négatif dressé par la Cnuced dans son rapport 2011 sur le développement économique en Afrique, publié récemment et préparé conjointement avec l'Organisation des Nations unies pour le développement industriel (ONUDI) sous le titre «Promouvoir le développement industriel en Afrique dans le nouvel environnement mondial». Le document souligne que le niveau d'industrialisation et l'évolution récente du secteur manufacturier diffèrent d'un pays africain à un autre, mais globalement il ressort que le continent «a perdu du terrain dans les activités manufacturières à forte intensité de main-d'œuvre, qui constituent généralement la première étape du développement industriel». Ainsi, la part de ces activités dans la Valeur ajoutée manufacturière (VAM) est tombée de 23% à 20% entre 2000 et 2008. A l'inverse, la production manufacturière à forte intensité technologique, notamment dans le secteur de la chimie, se porte bien puisque la part des activités de moyenne et haute technologie dans la VAM est passée de 25 à 29% dans la même période. La place de l'industrie dans le PIB du continent dépassait à peine les 10% en 2008 contre 12,8% en 2000. «Un certain nombre […] de pays, malgré leur niveau passé de production manufacturière élevée, ont connu durant les 20 dernières années un ralentissement de la croissance industrielle», explique Nobert Lebale, le rapporteur sénégalais de la Cnuced. Ce résultat s'explique d'abord par les spécificités de l'industrie africaine formée majoritairement de petites voire de micro-unités (les grandes entreprises sont étrangères ou publiques) et dominée par le secteur informel. Les articles manufacturés dans les exportations africaines ont baissé à 39% en 2008 contre 43% en 2000. Des solutions sur mesure ! Pour stimuler le développement industriel, le rapport évoque des stratégies «sur mesure» qui doivent être adoptées par chacun des gouvernements concernés. La politique industrielle devrait aussi être orientée de manière «à encourager les processus de recherche par le secteur privé afin que celui-ci puisse découvrir ce qui peut être produit de manière compétitive», indique la Cnuced. Elle considère que le soutien de l'Etat aux chefs d'entreprise est nécessaire pour orienter leurs investissements et leurs activités commerciales vers des secteurs porteurs de croissance économique à long terme et créateurs d'emplois. Mais cette aide ne devrait pas être illimitée. Elle devrait même être suspendue si les résultats − par exemple, la production de biens d'exportation compétitifs − n'est pas au rendez-vous dans les délais requis. Selon le rapport, un mécanisme de contrôle, d'évaluation et de responsabilité est nécessaire pour voir quels projets marchent, doivent être modifiés ou abandonnés. En outre, elle insiste sur l'essor des relations économiques avec les pays voisins, considérant que les marchés régionaux peuvent constituer une véritable clientèle pour les biens manufacturés. Les règles de l'Organisation mondiale du commerce, l'émergence des Bric (Brésil, Russie, Inde et Chine), l'internationalisation de la production industrielle, l'économie verte, sont autant de données à prendre en compte pour développer le secteur industriel africain. Toutefois, le développement du secteur manufacturier ne doit pas se faire au détriment du secteur agricole, qui est une source importante de recettes, d'emplois et de devises à court et à moyen termes, avertit la Cnuced qui invite les pays africains à établir des liens synergiques entre les secteurs agricole et non agricole de leur économie.