Le compte à rebours pour la dissolution des entreprises publiques économiques Alfatus Annaba et Pipegaz Ghardaïa a été enclenché depuis quelques jours. Il est le résultat du revers subi par les gestionnaires de ces entreprises, filiales du groupe Sider. Leur soumission portant fourniture de 600 km de tubes, destinés à la réalisation de l'oléoduc NK1 pour le transport des hydrocarbures liquides et gazeux, a été rejetée. Bien que sa proposition de prix soit supérieure de 3% à celles des entreprises algériennes, une société turque a réussi à décrocher le marché. L'événement intervient au moment même où des brigades des services de sécurité sont entrées en action pour enquêter sur les actes de sabotage de différentes installations du complexe sidérurgique Metal Steel El Hadjar. Pour plus de 2000 travailleurs, cadres gestionnaires et d'exécution d'Alfatus et Pipegaz, ce revers signifie que l'application d'un volet social avec compression d'effectifs est déjà lancée. Si du côté du directoire du groupe l'on se garde de toute déclaration à la presse, il n'en est pas de même au niveau de la plateforme syndicale UGTA de Sidi Amar. Son secrétaire général Aïssa Menadi a mobilisé ses troupes. « C'est une décision politique prise par le gouvernement. Des centaines de travailleurs risquent d'en pâtir. Le rejet de la soumission Alfatus et Pipegaz a été planifié. Cette action vise à liquider le reste de notre potentiel industriel. Nous avons été informés de source officielle qu'Alfatus et Pipegaz ont été cédées à la société anglo-allemande Primary et Bender. Contrairement à la proposition de la société Metal Steel également intéressée par ces deux unités dont une est implantée dans l'enceinte du complexe, Primary et Bender vont procéder à des coupes sombres dans les effectifs », a-t-il affirmé. L'opposition des travailleurs devrait se cristalliser dans les prochains jours par des actions sur le terrain. Comme pour donner plus de poids à cette opposition, le secrétaire général de la plateforme syndicale et ses homologues d'Alfatus et de Pipegaz ont enterré leurs antagonismes à la faveur du rejet de la soumission et de la cession d'Alfatus et de Pipegaz. L'affaire du sabotage des installations de production a transformé le complexe sidérurgique, où est également implantée Alfatus, en poudrière avec plusieurs foyers d'agitation des travailleurs et de leurs syndicats respectifs. Pour preuve, la déclaration contenue dans la correspondance transmise aux ministres de l'Industrie et de l'Energie, le syndicat Alfatus souligne : « Nous réitérons notre appel aux autorités et aux responsables de la compagnie Sonatrach afin de prendre les mesures qu'il faut pour rendre effectif le décret sur la préférence nationale. Les travailleurs et travailleuses des usines algériennes sont, cette fois-ci, déterminés à aller jusqu'au bout pour que la loi soit appliquée, car il y va de leur devenir. » La préférence nationale précisée par les syndicalistes donne légalement la priorité aux entreprises algériennes dans une limite de 15% par rapport au moins-disant étranger. Cette revendication est d'autant légitime quand on sait qu'Alfatus et Pipegaz, sociétés spécialisées dans le monoproduit, sont certifiées aux normes ISO 9001-2000 et API Q1 SL depuis 2001. Leur savoir-faire et leur maîtrise technologique sont prouvés par les 15 000 km de tubes fournis ces dernières années à leur seul et unique client, Sonatrach. Ces arguments massue ont été avancés par les syndicalistes pour affirmer que « l'absence d'un plan de charge et, de là, la mise en veilleuse de leur outil de production sont le résultat d'une concurrence sauvage, déloyale, pour laquelle elles n'ont pas été préparées. Que pourraient-elles faire face à des sociétés turques et russes qui n'hésitent par à pratiquer le dumping, aidées en cela par leurs gouvernements respectifs pour mettre la main sur le marché national et précipiter la disparition des entreprises algériennes ? ». Sous le sceau de l'anonymat, des cadres gestionnaires d'Alfatus ont indiqué que la décision de rejet de la soumission Alfatus/Pipegaz émane de la chefferie du gouvernement dans sa stratégie de marketing à destination des investisseurs étrangers. Selon eux, le passage entre des mains étrangères de tous les symboles de l'industrie algérienne est programmé et inéluctable.